M. Armand Jung attire l'attention de M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité sur le problème des salariés transfrontaliers qui se retrouvent en maladie longue durée. Beaucoup d'Alsaciens exercent une activité salariée en Allemagne. Lorsqu'un salarié français qui travaille en Allemagne est en arrêt maladie, il touche des indemnités journalières pendant 18 mois. Au bout de ces 18 mois, il est exclu de la sécurité sociale allemande car la caisse allemande ne le prend plus en charge. Il ne perçoit donc plus aucune indemnité. Il doit donc soit reprendre son travail soit introduire une demande d'invalidité. Les démarches sont alors particulièrement compliquées et longues. Dans un premier temps, il s'agit de faire une demande d'invalidité en France si le salarié y avait exercé à un moment donné une activité. S'il n'a que peu travaillé en France, il ne touchera qu'une petite pension ou cette dernière lui sera tout simplement refusée. Il faut ensuite introduire une demande de pension en Allemagne avec tout ce que cela comporte en difficultés administratives car la caisse dont dépend le malade est souvent éloignée de son domicile puisque l'Allemagne est découpée en Länder. Si la pension d'invalidité est octroyée, cette deuxième démarche peut mettre également de 4 à 6 mois pour aboutir. Le patient, qui se retrouve de ce fait très souvent sans ressources pendant environ 10 mois, plonge progressivement dans une situation précaire. Il souhaite savoir si le Gouvernement va prendre des mesures pour éviter que les salariés transfrontaliers en attente d'invalidité ne plongent dans la précarité.
Le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a pris connaissance avec intérêt de la question relative aux difficultés rencontrées par certains travailleurs frontaliers en situation d'invalidité. Les difficultés rencontrées par ces salariés transfrontaliers en situation d'incapacité de travail prolongée dépendent du fait qu'il n'y a pas en général de concordance des conditions de reconnaissance de l'état d'invalidité entre les législations des États membres de l'Union européenne, ce qui est le cas notamment pour la France et l'Allemagne. Afin de favoriser la libre circulation des travailleurs, et plus largement des citoyens européens, une coordination des systèmes de sécurité sociale au sein de l'Union a été instaurée pour éviter justement que des travailleurs ayant exercé une activité professionnelle dans plusieurs États membres ne se trouvent, au moment de faire valoir leurs droits à une prestation sociale, empêchés de satisfaire les conditions d'attribution du fait de leur mobilité. Le règlement européen n° 883/2004 et son règlement d'application n° 987/2009, mis en application depuis le 1er mai 2010, coordonnent à cette fin les législations nationales de sécurité sociale. Mais les États membres de l'Union européenne n'ont pas souhaité s'engager dans un processus d'harmonisation des systèmes nationaux de sécurité sociale, préférant se limiter à une coordination de ces systèmes. Si chaque État membre garde donc toute latitude dans l'organisation de son système de sécurité sociale, son financement et la définition et les conditions d'octroi des prestations, il est donc tenu d'appliquer les règles de coordination. Toutefois, ces règles n'apportent pas de solution permettant une reconnaissance commune de l'état d'invalidité lorsque les législations concernées divergent sur ce point. Comme le souligne le considérant 26 du nouveau règlement n° 883/2004, « il importe en matière de prestation d'invalidité, d'élaborer un système de coordination qui respecte les spécificités des législations nationales, notamment en ce qui concerne la reconnaissance de l'invalidité et son aggravation ». Lorsqu'il y a concordance entre les législations sur les conditions de reconnaissance de l'état d'invalidité. Il est possible pour les États concernés d'être inscrits dans l'annexe VII du règlement (ce qui est le cas entre la Belgique, la France et l'Italie pour certains groupes d'invalides) et en vertu des dispositions de l'article 46, paragraphe 3, dudit texte, la décision prise par l'institution d'un tel État membre quant au degré d'invalidité de l'intéressé s'impose à l'institution de tout autre État concerné également inscrit. Mais au-delà, les États membres ont la possibilité de conclure entre eux des accords bilatéraux visant à rapprocher ou mieux coordonner encore leurs systèmes de sécurité sociale, par exemple pour établir une reconnaissance mutuelle des décisions prises en matière de reconnaissance de l'état d'invalidité. Une telle possibilité a été envisagée à plusieurs reprises avec l'Allemagne et un accord adéquat proposé à ses autorités, mais ces dernières ont jusqu'à présent toujours refusé de s'engager dans la négociation d'un tel accord. Les autorités françaises ne rejettent pas néanmoins l'idée d'évoquer à nouveau cette question à l'occasion d'une prochaine rencontre officielle avec leurs homologues allemands.
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