M. Jean Launay attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale sur les inquiétudes et craintes liées à la mise en oeuvre, sans concertation, ni réel débat, du fichier Base élèves. En dépit de quelques modifications apportées en réponse aux recommandations de la CNIL, diverses zones d'ombre subsistent. A la différence du fichier Sconet qui avait fait l'objet d'un arrêté ministériel en 1995, le fichier Base élèves, alors qu'il est en phase de généralisation, n'a fait l'objet d'aucune publication officielle, encadrant juridiquement les dispositions d'un tel fichier. Par ailleurs, alors que la CNIL, dans sa recommandation du 10 avril 2008, rappelait que l'inscription scolaire est obligatoire pour les enfants de 6 à 16 ans, le fichier Base élèves intègre également les enfants de moins de 6 ans sans aucun motif de justification. Dès lors, nous pouvons nous étonner de l'utilisation faite de ce fichier. La réalisation d'audits réguliers de sécurité a également été évoquée récemment. A ce jour, nous n'avons eu aucune connaissance des conclusions des dits audits, et il n'est pas anormal de s'interroger sur les conditions de leur réalisation. Le fichier Base élèves fait référence à un numéro d'identifiant national, alors que parallèlement le fichier est considéré comme anonyme au-delà du niveau académique, son utilité devant être uniquement statistique. Dès lors, il est normal de se poser la question de l'utilité d'un tel numéro. Enfin, après la phase d'expérimentation initiale, aucun retour d'expérience, aucune concertation n’a été organisée avec les principaux intéressés que sont les parents d'élèves, collectivités territoriales, enseignants. A l'heure où les fichiers se multiplient, ne doit-on pas faire appel au principe de précaution sur une telle collecte d'informations nominatives, les recoupements, les partages de cette base de données avec d'autres restants envisageables ? D'autre part, de nombreux parents d'élèves s'opposent par écrit auprès des directeurs d'école et des inspecteurs d'académie, à la saisie de données sur leur enfant dans Base Élèves. Il en résulte que les directeurs, respectant le choix des parents, se voient sanctionner pour ne pas avoir renseigné la base. Quelle suite le Gouvernement envisage-t-il de donner aux sanctions envers ces directeurs ? Aussi, pour ces raisons, il lui demande quelles dispositions il entend prendre pour suspendre la mise en oeuvre de ce fichier, en attendant la tenue d'un débat public, à l'Assemblée Nationale, sur ce sujet. Enfin, est-il possible d'obtenir une réponse plus précise aux divers points susmentionnés, que les réponses types déjà données à 13 des 24 questions écrites déjà posées par des collègues parlementaires au cours de ces derniers mois.
Après une phase d'expérimentation, qui avait donné lieu à déclaration à la CNIL conformément à la loi de 1978 modifiée en 2004, le ministre de l'éducation nationale a pris, en date du 20 octobre 2008, un arrêté portant création d'un traitement automatisé de données à caractère personnel relatif au pilotage et à la gestion des élèves de l'enseignement du premier degré intitulé « base élèves 1er degré », en vue de sa généralisation. Les données recueillies sont strictement listées dans cet arrêté et correspondent aux nécessités de la gestion et du pilotage du premier degré : identification et coordonnées de l'élève ; identification du ou des responsables légaux de l'élève ; autres personnes à contacter en cas d'urgence ou autorisées à prendre en charge l'élève à la sortie de l'école ; dates d'inscription, d'admission et de radiation de l'élève dans l'école, classe, niveau et cycle ; activités périscolaires (garderies, études surveillées, restaurant et transport scolaire). Ce traitement automatisé concerne l'ensemble des écoles publiques et privées, afin d'effectuer des constats de rentrée exhaustifs et fiables pour le premier degré, comme cela est déjà le cas depuis longtemps pour le second degré. L'instruction est obligatoire de 6 à 16 ans, mais dès lors qu'il y a scolarisation (par exemple à l'école maternelle), l'inscription des enfants est obligatoire, afin de permettre la gestion des élèves. Toutes les informations relatives aux finalités et au contenu de cette application de gestion des élèves sont communiquées aux parents d'élèves par les directeurs d'écoles, les inspecteurs de circonscription et les inspecteurs d'académie, directeurs des services départementaux de l'éducation nationale. La sécurité des accès à l'application est assurée par un dispositif d'authentification forte des utilisateurs, aujourd'hui généralisé, qui a fait l'objet d'échanges avec la CNIL. Les données nominatives ne sont accessibles qu'à un nombre restreint d'acteurs locaux : elles ne sont accessibles ni aux rectorats, ni à l'administration centrale. Le numéro appelé « identifiant national de l'élève » est un outil de fiabilisation des comptages d'effectifs ; en effet, il évite les « doublons », c'est-à-dire les élèves inscrits simultanément dans deux écoles. Il n'est en aucune façon « signifiant » : il est attribué de façon aléatoire et ne donne aucune information concrète sur l'élève. Tout comme les données nominatives, il n'est accessible qu'à un nombre restreint d'acteurs. La décision du Conseil d'État, en date du 19 juillet 2010, a confirmé l'intérêt du dispositif « base élèves premier degré » pour le fonctionnement du service public de l'éducation. Cette décision rappelle que les informations demandées dans cette base ne portent pas atteinte à la liberté des personnes.
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