M. Damien Meslot attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'attente des membres du Secours catholique au niveau du projet de loi pénitentiaire. En effet, les membres du Secours catholique regrettent que la préconisation du comité d'orientation restreint de la loi pénitentiaire (COR) de mettre en place une allocation d'insertion aux détenus ne percevant pas le RMI ne soit pas reprise, alors qu'elle favoriserait leur autonomie et leur réinsertion. En matière de travail en milieu carcéral, le projet de loi prévoit un acte d'engagement dans son article 14 alors qu'il conviendrait de le rapprocher d'un contrat de travail de droit commun. La durée du placement en cellule disciplinaire, portée dans certains cas à 40 jours, étonne aussi les membres du Secours catholique puisque le COR préconise une durée de 21 jours maximum. Ils souhaitent aussi que les fouilles corporelles internes soient effectuées par des médecins ou par le biais de moyens d'investigations modernes. Enfin, ils estiment que l'accompagnement et le suivi socio-éducatifs ne sont pas au coeur du projet de loi pénitentiaire. C'est pourquoi il lui demande de bien vouloir lui indiquer quelles mesures elle entend prendre pour tenir compte des observations émises par les membres du Secours catholique.
Mme la garde des sceaux, ministre de la justice informe l'honorable parlementaire que le projet de loi pénitentiaire est une de ses priorités. Ce texte vise à doter la France d'une loi fondamentale sur le service public pénitentiaire. Il doit garantir les droits fondamentaux des détenus, améliorer la reconnaissance des personnels pénitentiaires, s'engager pour la réinsertion des détenus, développer les aménagements de peine pour éviter la récidive et généraliser la mise en oeuvre des règles pénitentiaires européennes (RPE). Le projet de loi a été élaboré dans la consultation et la concertation grâce au comité d'orientation restreint (COR). Les organisations syndicales pénitentiaires et les associations professionnelles, comme celle des juges de l'application des peines, ont été très largement associées à ses travaux. Au final, 90 % des propositions formulées par le COR ont vocation à entrer en application dans le cadre de la future loi pénitentiaire. Plutôt que d'attribuer une allocation, il a semblé préférable au Gouvernement, d'une part, de donner la priorité à la réinsertion par le travail ou la formation professionnelle, d'autre part, de privilégier une aide ponctuelle, financière ou en nature, notamment pour les détenus les plus démunis, à une mesure d'assistance généralisée, moins responsabilisante. Le COR a préconisé la mise en place d'un contrat d'engagement professionnel. Le choix d'un acte d'engagement a été préféré pour plusieurs raisons. D'une part, l'organisation du travail en détention est incompatible avec la mise en oeuvre de contrats de travail de droit commun : ainsi les transferts ou les décisions judiciaires sont de nature à mettre un terme à la relation de travail. D'autre part, l'application du droit commun du contrat de travail créerait des droits nouveaux au profit des détenus (congés payés, droits collectifs...). Il en résulterait des charges financières dissuasives pour les entreprises et un obstacle au développement du travail en prison. Par ailleurs, la France ne se distingue pas des pays européens, dans la majorité desquels les détenus travaillent au sein des établissements pénitentiaires dans des conditions exorbitantes du droit commun : contrat de travail spécifique, relation de travail sui generis comparable à l'acte d'engagement... En tout état de cause, l'acte d'engagement consacré dans le projet de loi permettra de reconnaître le détenu comme sujet de droit en matière de travail, d'améliorer sa responsabilisation par l'énoncé de règles qui précisent ses droits et obligations au regard de l'emploi, et de fixer certains éléments relatifs à l'organisation et aux conditions de travail. Le projet de loi constitue une avancée importante en matière disciplinaire, dès lors qu'il élève au niveau législatif les principes fondamentaux du droit disciplinaire, en raison de leur caractère coercitif, et qu'il réduit la durée maximale de placement en cellule disciplinaire de quarante-cinq jours à vingt et un pour les fautes les plus graves. Est ainsi garanti le respect de la dignité des personnes détenues et l'harmonisation de nos pratiques avec les législations européennes et les règles énoncées par le Conseil de l'Europe. Il est toutefois apparu indispensable de porter à quarante jours le quantum de la sanction qui peut être prononcée à l'encontre d'acte de violence physique contre les personnes, qu'il s'agisse de personnels, d'intervenants ou de détenus. Cela s'explique par la gravité exceptionnelle que représente ces faits tant pour les personnes qui en sont victimes que pour le fonctionnement et l'ordre des établissements pénitentiaires. En matière de fouilles, le projet de loi représente un important progrès. Il précise au niveau de la loi les critères au vu desquels elles peuvent être pratiquées. En effet, il est apparu nécessaire d'adapter la nature de la fouille et sa fréquence aux circonstances de la vie en détention, ainsi qu'au profil du détenu et aux risques encourus en termes de sécurité et d'ordre, afin d'écarter tout risque d'arbitraire. Ce texte se révèle par ailleurs protecteur de l'intimité de la personne et de sa dignité dès lors qu'il rend obligatoire le recours à un médecin pour toute investigation corporelle interne, lorsque celle-ci est indispensable, à l'instar de ce qui est prévu pour les gardes à vue. Le projet de loi dispose clairement que le service public pénitentiaire contribue à la réinsertion des personnes qui lui sont confiées ainsi qu'à la prévention de la récidive. Il érige d'ailleurs au niveau législatif la mission d'insertion et de probation. Dans ce cadre ainsi défini, l'aide, le soutien et l'accompagnement aux personnes détenues et à leurs familles constituent une préoccupation majeure de l'administration pénitentiaire, qui ne peut toutefois se traduire directement dans la loi qui doit conserver un degré de généralité suffisant et respecter le principe de la séparation constitutionnelle entre les domaines réglementaire et législatif. Cependant, d'une part, de très nombreuses dispositions du projet de loi sont de nature à favoriser cet accompagnement, telles celles énoncées dans les articles 10 à 30 relatifs aux droits des détenus, ou celles énoncées dans les articles 31 à 56 relatifs au prononcé des peines, aux alternatives à la détention provisoire, aux aménagements de peines et à la détention. D'autre part, des décrets viendront en tant que de besoin préciser et compléter les grandes priorités dégagées par la loi.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.