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Patrick Beaudouin
Question N° 34203 au Ministère de la Justice


Question soumise le 4 novembre 2008

M. Patrick Beaudouin interroge Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur l'applicabilité de l'article 706-35-1 du code de procédure pénale. Introduit par la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance, cet article permet, sous certaines conditions, aux officiers ou agents de police judiciaire de participer sous un pseudonyme aux échanges électroniques, d'être en contact par ce moyen avec les personnes susceptibles d'être les auteurs de certaines infractions, d'extraire, transmettre, acquérir ou conserver des contenus illicites. Ces méthodes peuvent être employées pour constater des infractions telles que la provocation à l'usage ou au trafic de stupéfiants, la provocation à commettre un crime ou un délit, la corruption de mineurs, l'enregistrement ou de la diffusion d'images pornographiques de mineurs. La loi disposant que ces opérations s'effectuent « dans des conditions précisées par arrêté », il souhaiterait d'abord avoir confirmation de l'existence de cet arrêté. Il voudrait ensuite savoir dans quelles conditions ces opérations d'infiltration sont compatible avec le principe de loyauté des preuves, récemment rappelé par la chambre criminelle de la Cour de cassation (arrêt du 6 juin 2008), qui le déduit de l'article 6 § I de la Convention européenne des droits de l'Homme et de l'article préliminaire du code de procédure pénale.

Réponse émise le 10 mars 2009

La garde des sceaux a l'honneur d'apporter les éléments de réponse suivants à l'honorable parlementaire. L'article 35-III de la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance a introduit dans le code de procédure pénale un article 706-35-1 ainsi rédigé : « Dans le but de constater les infractions mentionnées aux articles 225-4-1 à 225-4-9, 225-5 à 225-12 et 225-12-1 à 225-12-4 du code pénal et, lorsque celles-ci sont commises par un moyen de communication électronique, d'en rassembler les preuves et d'en rechercher les auteurs, les officiers ou agents de police judiciaire agissant au cours de l'enquête ou sur commission rogatoire peuvent, s'ils sont affectés dans un service spécialisé et spécialement habilités à cette fin, dans des conditions précisées par arrêté, procéder aux actes suivants sans en être pénalement responsables : 1° Participer sous un pseudonyme aux échanges électroniques ; 2° Être en contact par ce moyen avec les personnes susceptibles d'être les auteurs de ces infractions ; 3° Extraire, transmettre en réponse à une demande expresse, acquérir ou conserver des contenus illicites dans des conditions fixées par décret. La difficulté de mise en oeuvre soulevée par l'honorable parlementaire a été prise en compte par le législateur lors de la rédaction de cet article. C'est en effet, la provocation à la preuve de l'infraction qui est admise et organisée par les dispositions nouvelles, et non pas une provocation à la commission même de l'infraction. C'est pourquoi, le dernier alinéa de l'article 706-35-1 précise : « à peine de nullité, ces actes ne peuvent constituer une incitation à commettre ces infractions. » Une méconnaissance de ces dispositions constituerait une atteinte au principe de la loyauté des preuves et au droit à un procès équitable. La garde des sceaux précise à l'honorable parlementaire qu'un décret n° 2007-699 du 3 mai 2007 est venu compléter les dispositions précisées. Le décret précise les conditions de conservation des éléments de preuve recueillis par les officiers de police judiciaire de manière à garantir leur intégrité et leur confidentialité. La garde des sceaux rappelle à l'honorable parlementaire qu'il ne lui appartient pas de formuler des appréciations sur les décisions de justice ou leurs auteurs. Il peut néanmoins être précisé que l'appréciation du caractère loyal ou non d'une opération d'infiltration fait l'objet d'un contrôle de la part des juridictions. Il ne saurait être déduit d'une décision de la chambre criminelle de la Cour de cassation censurant un arrêt de cour d'appel ayant validé l'utilisation des dispositions de l'article 706-35-1 du code de procédure pénale dans un contexte déterminé que le principe même de l'utilisation de cette procédure est remise en cause dans toutes les hypothèses. Il résulte des dispositions en effet de l'article 427 du code de procédure pénale que les infractions peuvent être établies par tout mode de preuve, le juge décidant d'après son intime conviction. En conséquence, il appartient au magistrat d'apprécier si la preuve qui lui est présentée a été recueillie dans le respect du principe de loyauté et si celle-ci est de nature à emporter sa conviction.

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