M. Alain Suguenot attire l'attention de Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur le problème rencontré par les communes dans lesquelles se trouve un site naturel ouvert à tous, mais sans zone de loisirs aménagée. Dans ce cas précis, et, en cas d'accident, les communes concernées font l'objet d'une mise en cause et d'une condamnation pour défaut suffisant d'information et/ou absence de moyens de sécurité. Il lui demande, par conséquent, de lui faire connaître les modalités concrètes permettant aux communes de s'exonérer de toute responsabilité en la matière.
L'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT) attribue au maire une compétence en matière de police municipale. Celle-ci a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publique. Cet article, en son 5° met à la charge du maire une obligation générale de prévention des accidents naturels et des fléaux de toute nature. En outre, l'article L. 2212-4 du même code impose au maire de prendre, en cas de « danger grave ou imminent, les mesures imposées par les circonstances ». Ces deux dispositions visent des situations dans lesquelles existe un danger ou un risque objectif. Il s'agit de dangers particuliers, c'est-à-dire de ceux que les personnes peuvent difficilement prévoir ou surmonter par elles-mêmes (CE. 26 février 1969, Gravier). La responsabilité du maire s'agissant de sites naturels ouverts à tous ne sera engagée que s'il a négligé de prendre une mesure dont l'intervention s'imposait au regard d'un risque dont il ne pouvait ignorer l'existence. Les espaces en question sont, par exemple, constitués par les baignades non aménagées ou encore par le domaine skiable. D'une manière générale, le maire n'est pas tenu de prendre des mesures de surveillance ou d'installer un dispositif de signalisation en un lieu situé en dehors de la baignade aménagée et qui ne présente pas des dangers excédant ceux rencontrés habituellement dans les cours d'eau (CE. 11 juin 1969, commune de Cournon-d'Auvergne). Toutefois, les baignades non aménagées mais qui font l'objet d'une fréquentation importante doivent être dotées, par la commune, de moyens permettant l'intervention rapide des secours (CE. 13 mai 1983, Lefebvre). Le juge a recours dans ce domaine à la notion de risque contre lequel ceux qui s'adonnent à la pratique du loisir doivent normalement se prémunir (CE. 12 décembre 1986, Rebora). Les mêmes critères d'appréciation prévalent en matière d'activités de montagne : certains sites - au cas précis les pistes de ski - nécessitent des aménagements alors qu'au contraire les parcours se situant « hors pistes » ne nécessitent pas en principe de dispositif particulier. Toutefois, en matière de pratique de la montagne comme s'agissant des baignades et au-delà de ces deux secteurs d'activités, des sites qui ne seraient pas a priori concernés par une obligation de signalisation doivent l'être dès lors qu'ils sont « couramment empruntés » (CE. 18 mai 1978, Lesigne, TA Marseille. 9 décembre 2003, Vidal) ou « font l'objet d'une fréquentation régulière et importante » (CE. 13 mai 1983, Lefebvre). Enfin, l'imprudence des victimes peut être de nature à atténuer, ou à exonérer en fonction des circonstances la responsabilité du maire (CAA. Nantes 21 mars 1990, Cts Dubouloz c/commune de Saint-Jean-Trolimon). Hormis ces deux catégories ci-dessus envisagées, il n'existe aucune décision jurisprudentielle concernant les sites naturels accessibles au public. Si la fréquentation régulière et importante d'un site peut amener le maire à envisager les mesures de prévention éventuellement nécessaires, dues, par exemple, à la configuration des lieux, il faut rappeler qu'il appartient également aux personnes qui fréquentent de tels sites de « se prémunir » de façon « normale » (CE. 26 février 1969, précité) contre les risques auxquels elles sont susceptibles d'être confrontées. Outre l'engagement de la responsabilité administrative dans les conditions rappelées précédemment, la responsabilité des maires est susceptible, selon les modalités décrites ci-après, d'être recherchée, notamment en application des dispositions combinées des articles 121-3 du code pénal et L. 2123-34 du code général des collectivités territoriales. L'application de ces textes ne peut conduire à sanctionner pénalement un maire ayant créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui n'a pas pris les mesures permettant de l'éviter que s'il est, en outre, établi qu'il a « violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, ou commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'[il] ne pouvait ignorer ».
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