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Jacques Bascou
Question N° 31374 au Ministère de l'Intérieur


Question soumise le 30 septembre 2008

M. Jacques Bascou attire l'attention de Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur les inquiétudes des défenseurs des libertés suite à la mise en place par décret du nouveau fichier dit Edvige. La portée du fichier «EDVIGE» (acronyme de Exploitation documentaire et valorisation de l'information générale) né du décret n° 2008-632 du 27 juin 2008 dépasse largement celle de l'ancien fichier des renseignements généraux. Ce fichier vise en effet toutes les personnes physiques dès l'âge de 13 ans menaçant l'ordre public, notion vague, ainsi que les personnes physiques et morales engagées dans la vie de la cité. Il permet d'enregistrer un spectre très large d'informations concernant les personnes jouant un rôle dans les domaines politiques, syndicaux, religieux, associatif, y compris des données personnelles sur leur santé, leur sexualité, leurs opinions, leurs fréquentations. La CNIL a émis les plus grandes réserves sur ce fichier relevant notamment l'absence de limite dans la durée de conservation des données, l'insuffisance des garanties quant aux conditions de leur accès. Le contrôle de la CNIL reste par ailleurs largement privé d'effet concret faute de droit à rectification. Si l'État doit être informé sur les personnes présentant des risques avérés pour la sûreté publique, l'État de droit implique la protection de la vie privée des citoyens. Il semble donc très inquiétant qu'un même fichier englobe à la fois des individus menaçants effectivement la sécurité publique et des citoyens mis en fiche du seul fait de leurs activités dans les domaines politique, syndical, social, religieux ou associatif. Il lui demande si le Gouvernement a bien conscience des dérives que pourraient entraîner le développement sans limites d'un tel fichier et si, compte tenu de l'enjeu de société sous-tendu par un tel fichage généralisé et systématique, l'importance des moyens financiers et humains qui seront nécessaires pour le renseigner, l'entretenir et l'exploiter, il pourrait venir défendre son point de vue devant le Parlement.

Réponse émise le 24 février 2009

La réforme du renseignement mise en oeuvre par le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales a conduit à la création, le 1er juillet, de la direction centrale du renseignement intérieur (DCRI) et à la disparition de la direction de la surveillance du territoire (DST) et de la direction centrale des renseignements généraux (DCRG). L'une des missions qu'exerçait la DCRG, la mission d'information générale, incombe désormais à la sécurité publique (et à Paris à la préfecture de police). Afin de permettre à la sécurité publique d'assurer sa nouvelle mission et donc de reprendre l'usage du fichier précédemment géré par la DCRG (amputé de ce qui concerne le renseignement intérieur, transféré à la DCRI, et les courses et jeux, transférés à la police judiciaire), il a été nécessaire d'instituer un nouveau cadre juridique, par un décret du 27 juin 2008. Ce fichier appelé EDVIGE constituait donc purement et simplement une reprise partielle du fichier des renseignements généraux créé par décret du 14 octobre 1991, intégrant les modifications apportées par une directive de 1995 et une loi de 2004. Son texte, soumis au Conseil d'État, prenait en compte des demandes de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL). Il a pourtant suscité des inquiétudes et des malentendus. Afin d'y apporter des réponses, le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales a ouvert une vaste consultation puis décidé de présenter un nouveau décret. Il convient à cet égard de souligner qu'eu égard notamment à la décision du ministre de retirer le décret portant création d'EDVIGE, le Conseil d'État, saisi en référé, a rejeté le 29 octobre un recours présenté par plusieurs associations tendant à la suspension du décret du 27 juin. Ce dernier a été retiré par un décret du 19 novembre 2008. Le nouveau fichier ne comportera que des données directement liées à la sécurité publique ou permettant de répondre aux demandes d'enquêtes de recrutement imposées par la loi. Il apporte des garanties renforcées à la liberté individuelle et au droit au respect de la vie privée, tout en préservant les moyens nécessaires aux forces de police pour assurer efficacement la sécurité des Français.

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