M. Christian Estrosi interroge Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, afin de connaître son opinion sur la proposition formulée par le rapport de l'institut Montaigne intitulé « Comment rendre la prison (enfin) utile » consistant à inciter fiscalement les entreprises à utiliser la main d'oeuvre carcérale.
La garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que l'administration pénitentiaire a axé ces dernières années sa réflexion et ses propositions sur un rapprochement entre la situation du travail en prison et celle qui existe à l'extérieur : revalorisation de la rémunération, notamment au service général en la faisant progresser au moins au rythme de l'évolution du SMIC, amélioration des conditions d'hygiène et de sécurité au travail, mise en oeuvre d'un support d'engagement professionnel. Cette réflexion prend également en considération les contraintes inhérentes à tout établissement pénitentiaire qui induisent une réduction de la productivité et de la rentabilité des activités de production. Ainsi, des dispositions particulières ont déjà été prises afin que le coût du travail en milieu pénitentiaire offre un avantage économique aux entreprises qui y interviennent (cf. dispositions de l'article D. 103 du code de procédure pénale selon lesquelles les conditions de rémunération des détenus travaillant sous le régime de la concession sont fixées conventionnellement en tenant compte des spécificités de la production en milieu carcéral). Si des incitations fiscales pouvaient encourager les entreprises à recourir davantage au travail en milieu pénitentiaire, leur coût en serait très important. Les entreprises fournissant du travail en milieu pénitentiaire bénéficient déjà d'un taux de charges sociales peu élevé (environ 16,5 %) par rapport à celui du droit commun. L'exonération totale des cotisations sociales représenterait un effort de près de 6 millions d'euros pour l'État. La proposition de mettre en place des incitations fiscales aurait un coût budgétaire particulièrement élevé, dans une période économiquement difficile. Cet élément a d'ailleurs été relevé sur un plan plus global dans le rapport général du Sénat sur le projet de loi de finances pour 2009. Le rapporteur spécial pour le travail et l'emploi, Serge Dassault, indiquait que dans le contexte économique actuel « l'efficacité des allègements généraux de cotisations sociales, au regard de la politique de l'emploi, doit faire l'objet d'une évaluation par le Gouvernement ». Le développement d'incitations fiscales n'a donc pas été retenu dans le cadre des réformes envisagées par la chancellerie. Le développement du travail en prison n'en demeure pas moins une priorité pour l'administration pénitentiaire. Ainsi, un plan spécifique d'actions, le programme Entreprendre, a été mis en oeuvre dès le début de l'année 2008. Destiné aux établissements, il doit permettre d'améliorer l'ensemble des facteurs influant dans l'organisation des activités de production réalisées en prison et définit des axes de progrès en matière de travail en fixant des objectifs stratégiques. Il s'agit, sur une période de dix-huit mois, d'améliorer les procédures de gestion des activités (recrutement et formation des opérateurs, gestion des temps de travail, flexibilité des horaires), d'intervenir sur les infrastructures dédiées au travail (aménagements des accès, des zones de travail et de stockage), de renforcer le respect des règles d'hygiène et de sécurité et de développer le dialogue entre l'administration et les entreprises. Par ailleurs, compte tenu du fait que la population détenue est en général peu ou pas qualifiée, éloignée des normes du marché du travail, en situation d'exclusion et ayant au mieux une courte expérience professionnelle, le projet de loi pénitentiaire prévoit l'intervention en milieu pénitentiaire de structures d'insertion par l'activité économique.
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