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Patrick Roy
Question N° 30971 au Ministère de l'Intérieur


Question soumise le 23 septembre 2008

M. Patrick Roy attire l'attention de Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur le décret n° 2008-632 du 27 juin 2008 qui crée un nouveau fichier de police dénommé EDVIGE (Exploitation documentaire et valorisation de l'information générale). Contrairement à ce qu'affirme le Gouvernement, ce nouveau fichier n'est pas le simple prolongement du fichier utilisé jusqu'alors par les renseignements généraux. Auparavant, étaient susceptibles d'être fichées les « personnes majeures qui, par leurs actions violentes, sont susceptibles de porter atteinte à la sûreté de l'État » (décret de 1991). Avec EDVIGE, seront désormais susceptibles d'être fichées « les personnes physiques ou morales ayant sollicité, exercé ou exerçant un mandat politique, syndical ou économique ou qui jouent un rôle institutionnel, économique, social ou religieux significatif » et les « individus, groupes, organisations et personnes morales qui, en raison de leur activité individuelle ou collectives, sont susceptibles de porter atteinte à l'ordre public ». La notion « d'actions violentes » disparaît, la notion de sûreté de l'État est remplacée par la notion beaucoup plus vague d'ordre public. Fait sans précédent, le fichage peut concerner les mineurs dès l'âge de 13 ans ! D'autre part, l'utilisation du fichier est désormais ouverte aux enquêtes administratives préalables à une embauche dans la fonction publique ! Le fichier EDVIGE fait ainsi passer la société française d'un système de fichage strictement encadré à l'ère de la présomption de culpabilité sur chaque citoyen comptant participer à la vie de la cité et sur leur entourage ! C'est une dérive dangereuse éloignant la société française de la conception républicaine de l'État de droit. La multiplication des motifs d'inscription au fichier, l'ouverture aux mineurs, la multiplication et la nature des informations pouvant y être enregistrées et le flou des notions sur lesquelles est fondé le fichier sont parfaitement inacceptables et constituent une atteinte sans précédent aux libertés individuelles et à la protection de la vie privée. Le Gouvernement a choisi d'élargir considérablement les capacités de fichage de la population sans débat public et en ignorant les réserves émises par la CNIL (Commission nationale informatique et libertés). La CNIL a notamment souligné l'absence de durée de conservation des données, le très jeune âge à partir duquel une personne peut être fichée et la possibilité de collecter des informations personnelles relatives à l'origine ethnique, à la vie personnelle, à l'orientation sexuelle et à la santé. Il lui demande donc d'abroger dans les plus brefs délais un décret totalement incompatible avec la conception républicaine de l'État de droit.

Réponse émise le 24 février 2009

La réforme du renseignement mise en oeuvre par le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales a conduit à la création, le 1er juillet, de la direction centrale du renseignement intérieur (DCRI) et à la disparition de la direction de la surveillance du territoire (DST) et de la direction centrale des renseignements généraux (DCRG). L'une des missions qu'exerçait la DCRG, la mission d'information générale, incombe désormais à la sécurité publique (et à Paris à la préfecture de police). Afin de permettre à la sécurité publique d'assurer sa nouvelle mission et donc de reprendre l'usage du fichier précédemment géré par la DCRG (amputé de ce qui concerne le renseignement intérieur, transféré à la DCRI, et les courses et jeux, transférés à la police judiciaire), il a été nécessaire d'instituer un nouveau cadre juridique, par un décret du 27 juin 2008. Ce fichier appelé EDVIGE constituait donc purement et simplement une reprise partielle du fichier des renseignements généraux créé par décret du 14 octobre 1991, intégrant les modifications apportées par une directive de 1995 et une loi de 2004. Son texte, soumis au Conseil d'État, prenait en compte des demandes de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL). Il a pourtant suscité des inquiétudes et des malentendus. Afin d'y apporter des réponses, le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales a ouvert une vaste consultation puis décidé de présenter un nouveau décret. Il convient à cet égard de souligner qu'eu égard notamment à la décision du ministre de retirer le décret portant création d'EDVIGE, le Conseil d'État, saisi en référé, a rejeté le 29 octobre un recours présenté par plusieurs associations tendant à la suspension du décret du 27 juin. Ce dernier a été retiré par un décret du 19 novembre 2008. Le nouveau fichier ne comportera que des données directement liées à la sécurité publique ou permettant de répondre aux demandes d'enquêtes de recrutement imposées par la loi. Il apporte des garanties renforcées à la liberté individuelle et au droit au respect de la vie privée, tout en préservant les moyens nécessaires aux forces de police pour assurer efficacement la sécurité des Français.

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