M. Franck Reynier interroge M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur les agrocarburants. En effet, ces dernières années la recherche sur les agrocarburants s'est intensifiée en raison du développement d'énergies alternatives aux carburants issus du pétrole. Toutefois, la Banque Mondiale estime que les agrocarburants sont à l'origine d'une hausse de 75 % des denrées alimentaires dans le monde. Cette hausse serait la conséquence de trois mécanismes : détournement d'une partie des céréales destinées à la filière alimentaire vers les carburants dits verts, reconversion des terrains destinés aux produits alimentaires en plants de colza et de tournesol, amplification de la spéculation du fait de la hausse des prix. L'incidence sur les prix des denrées alimentaires est cependant difficilement quantifiable du fait de l'inégalité de coûts entre agrocarburants. Selon les experts, si la recherche sur les agrocarburants doit être poursuivie, il demeure essentiel de surveiller ce type d'effets pervers sous peine de voir s'aggraver le problème déjà préoccupant de la faim dans le monde. En conséquence il lui demande de bien vouloir lui indiquer si la poursuite des recherches sur les agrocarburants peut se faire dans le respect de la mission première de l'agriculture : nourrir les populations.
Le Gouvernement considère qu'il est fondamental que les nouveaux débouchés des matières premières agricoles, en particulier les biocarburants, ne portent pas préjudice à la sécurité alimentaire mondiale et répondent à des critères de durabilité environnementale, sociale et économique. A cet égard, l'évaluation de l'impact des biocarburants sur l'augmentation des prix des matières premières agricoles pour l'alimentation est une question complexe. Actuellement, la hausse des prix s'explique par plusieurs facteurs et les biocarburants ne sont pas un des facteurs explicatifs majeurs, en particulier lorsqu'ils sont produits en Europe. La hausse de prix des matières premières agricoles aura un impact négatif pour les régions qui sont durablement dans une situation d'importateurs nets de matières premières agricoles et énergétiques. Cependant, pour d'autres pays, l'augmentation des prix de ces matières premières résultant en premier lieu de la demande alimentaire peut contribuer positivement au développement économique, en particulier agricole et rural et s'avérer ainsi, à terme, bénéfique pour la sécurité alimentaire mondiale. La réflexion se développe actuellement sur ces sujets au niveau international, entre autres au niveau de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (OAA/FAO) qui a organisé un séminaire en juin 2008 sur ces questions. Au niveau européen, le ministère de l'agriculture et de la pêche a organisé dans le cadre de la Présidence française de l'Union européenne, une conférence permettant d'aborder d'une manière plus globale le thème de la sécurité alimentaire. Cette conférence, intitulée « Qui va nourrir le monde ? Vers des agricultures diverses et durables, moteurs du développement », et qui a eu lieu le 3 juillet à Bruxelles, a permis de débattre sur les façons de relever les défis posés à la sécurité alimentaire de la planète et à ses diverses agricultures, et sur la place de l'agriculture dans les politiques de développement, pour engendrer de la croissance, réduire la pauvreté et gérer l'environnement. Les objectifs d'incorporation de biocarburants en France et en Europe aux horizons 2010 et 2020 restent modérés et ne compromettent pas la sécurité alimentaire de l'Europe et de la France. Ils visent par ailleurs à anticiper les évolutions des marchés mondiaux dans les années à venir, en particulier des débouchés à l'exportation, grandement dépendants des aléas climatiques à court terme et, à moyen terme des équilibres mondiaux entre pays producteurs et de l'accroissement démographique dans les différentes régions du globe. Au niveau européen, l'objectif d'incorporation de 10 % d'énergies renouvelables dans les transports en 2020 sera conditionné au respect de critères de durabilité. Tout en conduisant des évaluations régulières des impacts du développement des biocarburants, le Gouvernement soutient la mise en place de ces critères, y compris sur le plan social : ils devront notamment garantir que les nouveaux débouchés des matières premières agricoles ne portent pas préjudice à la sécurité alimentaire et à l'environnement.
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