M. André Gerin attire l'attention de Mme la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative sur l'autorisation de commercialisation, à partir du 15 juillet 2008, du Red Bull, boisson énergisante, malgré les réserves des autorités sanitaires. Après des années d'interdiction en France, le ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi vient de donner son accord à la firme autrichienne. Ce produit contient de la caféine et de la taurine, un dérivé d'acide aminé, qui, outre son effet d'excitant et d'accélérateur, provoque une perception amoindrie de l'alcool. Le Red Bull vise tout particulièrement un public jeune, ce qui avait légitimement alerté nos autorités de santé publique. Mme la ministre avait, en juin dernier, émis "les plus grandes réserves'' à ce sujet et informé la représentation nationale que l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) avait été saisie en vue d'une enquête. Aujourd'hui, il nous est expliqué, pour justifier la levée de l'interdiction en France, que la preuve formelle de la nocivité du produit n'est pas établie et qu'en l'absence de données scientifiques probantes, le Gouvernement a préféré l'apposition de mises en garde sur les canettes en vente. Si la France avait maintenu sa décision initiale, la société Red Bull aurait pu engager un contentieux contre notre pays, nous précise-t-on. A présent, elle invite les parents à boycotter le Red Bull. Cela signifie donc, sous les prétextes qui viennent d'être évoqués auxquels s'ajoutent celui selon lequel 23 pays de l'Union européenne commercialisent déjà le Red Bull, que la France n'est plus maîtresse de ses décisions, y compris quand il s'agit de santé publique et d'application du principe de précaution. En définitive, les intérêts commerciaux du groupe autrichien, qui a réalisé en 2007 un chiffre d'affaires de 3,80 milliards d'euros, en hausse de 16,6 % sur l'année précédente, prévalent sur les exigences sanitaires, au nom de "la concurrence libre et non faussée''. Cette situation est certes éclairante sur cette Union européenne dont les intérêts financiers des groupes capitalistes sont la boussole. Mais elle est choquante et nous la voyons préoccupante et dangereuse. Il souhaite savoir ce qu'elle compte entreprendre pour faire respecter l'avis émis par les autorités françaises de santé publique.
Jusqu'en juillet 2008, la France a interdit la commercialisation de la boisson Red Bull. La société Red Bull avait introduit un contentieux devant le Conseil d'État, fondé sur le décret n° 2006-1684 du 16 octobre 2006, qui prévoit, conformément au droit européen, que pour les produits qui circulent légalement dans un autre État membre, un État-membre ne peut l'interdire que s'il apporte la preuve de sa nocivité. La version originale des boissons Red Bull (avec taurine et glucurunolactone) est légalement commercialisée de longue date dans 25 États membres. Néanmoins, la jurisprudence communautaire, s'agissant de la protection de la santé publique lorsque des incertitudes subsistent en l'état actuel de la recherche scientifique quant à l'existence ou à la portée de risques réels pour la santé, admet que « dans de telles circonstances [...] un État membre peut, en vertu du principe de précaution, prendre des mesures de protection sans avoir à attendre que la réalité et la gravité de ces risques soient pleinement démontrées », dès lors que l'évaluation de ces risques ne se fonde pas sur des considérations purement hypothétiques. Bien que recommandant de ne pas en autoriser la commercialisation, l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) n'a jamais été en mesure de conclure quant à la sécurité de cette boisson. L'Autorité européenne de sécurité alimentaire (AESA), qui a été saisie par la Commission européenne a différé à deux reprises le rendu de son avis qui ne sera disponible au mieux qu'à l'automne 2008. Dans ces conditions, et compte tenu de l'imminence de l'issue du contentieux, sur lequel les chances du Gouvernement étaient faibles en l'absence d'éléments nouveaux probants en matière d'expertise scientifique, ce dernier a préféré prendre les devants pour négocier avec la société des mentions de mise en garde, déconseillant la consommation de ces boissons aux enfants et aux femmes enceintes. La ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative a estimé qu'il convenait de prendre les mesures suivantes pour informer le public et assurer la surveillance de la consommation de cette boisson. Elle a demandé à l'Institut de veille sanitaire (InVS) de mettre en place une surveillance active via les centres antipoison et de toxicovigilance des signalements d'effets indésirables liés à la consommation des boissons énergisantes et, en particulier, de la boisson Red Bull. S'appuyant sur les avis de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA), des recommandations sur les catégories de la population qui ne doivent pas consommer cette boisson, sur la quantité maximale à consommer, sur les effets qui peuvent survenir après consommation de cette boisson seule ou associée à des boissons alcoolisées, à des substances ou à des médicaments ayant une action sur le système nerveux central ou des effets neurologiques, sur la nécessité de signaler tout effet indésirable lié à la consommation de cette boisson à un professionnel de santé, ont été diffusées par différents moyens (site internet du ministère chargé de la santé, cartes com. diffusées en juillet 2008 dans les bars et les discothèques). Une circulaire du 11 juillet 2008 signée par les ministres chargés de la santé et de l'éducation nationale vise à interdire la vente des boissons énergisantes dans les établissements scolaires. Enfin, une vigilance sur certaines denrées alimentaires dont les boissons énergisantes sera mise en place courant 2008. Dès lors que de nouvelles données seront disponibles sur les risques, cette autorisation de mise sur le marché sera réévaluée.
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