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Bérengère Poletti
Question N° 28038 au Ministère de la Santé


Question soumise le 22 juillet 2008

Mme Bérengère Poletti alerte Mme la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative sur les dangers de la prescription des médicaments tels que les anti-dépresseurs et anxiolytiques aux mineurs de 16 ans. Récemment, une enquête sur la santé physique et mentale d'enfants âgés de 5 ans, réalisée par la fondation MGEN, a fait l'objet d'un débat éthique qui a conduit à son retrait. Cette polémique fait suite à celle provoquée en septembre 2005 par un rapport de l'INSERM sur les troubles des conduites des enfants, qui recommandait le dépistage systématique et une prise en charge psychothérapeutique des enfants porteurs de troubles, voire un traitement médicamenteux. Le projet de dépistage des troubles du comportement a avorté en 2006. Le Comité consultatif national d'éthique, saisi sur l'expertise de l'INSERM, soulignait un certain nombre de risques éthiques, notamment le risque de stigmatisation des enfants, de confusion entre les rôles du corps médical et des tiers, le risque médicamenteux, d'une médecine prédictive et soulignait la tendance actuelle à médicaliser des problèmes qui relèvent de l'environnement social, économique et culturel. Ces types de dépistages et de prises en charge médicamenteuses sont devenus courants aux États-unis. Il convient cependant de s'interroger sur les risques liés à la consommation de psychotropes chez les jeunes. Bien que d'utilité reconnue chez les adultes, mais trop souvent surprescrits, les psychotropes présentent des risques chez les enfants et adolescents. Ces médicaments peuvent faire naître une dépendance chez les jeunes à laquelle il apparaît difficile de se soustraire, ce qui augmente tendanciellement les risques de tentatives de suicide. Aussi, face aux dangers de ces types de traitements, elle souhaiterait connaître le bilan qui peut être dressé de l'utilisation des psychotropes chez les jeunes, face à un recours devenu trop systématique.

Réponse émise le 12 mai 2009

L'utilisation des médicaments psychotropes chez l'enfant et l'adolescent fait l'objet de peu d'études en Europe, et les données disponibles à ce sujet sont donc rares. Toutefois, une étude française a été récemment menée sur l'utilisation de médicaments psychotropes chez l'enfant et l'adolescent par la fondation MGEN et publiée dans le Journal of Child an Adolescent Psychopharmacologie (2008, n 18, p. 281-289). Cette étude, menée entre 2003 et 2005, avait pour objectif de décrire l'étendue et les caractéristiques de l'utilisation de médicaments psychotropes dans la population des enfants et des adolescents pris en charge par la MGEN, ainsi que leur évolution au cours des dernières années. Elle permet ainsi d'avoir une estimation de cette évolution sur une période relativement longue (trois ans), mais son interprétation doit être nuancée. En effet, la population suivie correspond aux enfants dont les parents sont adhérents à la MGEN, et forme donc un échantillon non représentatif de la population générale. Par ailleurs, l'étude ne prend pas en compte les traitements non pris en charge par les organismes sociaux ni ne donne d'informations complètes sur le traitement suivi (durée, indication, éventuelle prise en charge psychologique associée, antécédents médicaux). De ce fait, il est difficile, à partir de ces résultats, d'évaluer le bon usage ou le mésusage des psychotropes chez ces enfants et adolescents. Cependant, cette étude apporte quelques informations intéressantes. Tout d'abord, il ressort de l'enquête que les anxiolytiques et les hypnotiques sont les psychotropes les plus utilisés chez l'enfant et l'adolescent. Toutefois, 71 % des enfants suivis n'ont fait l'objet que d'une seule prescription de médicaments psychotropes, ce qui laisse supposer une utilisation majoritairement ponctuelle de ces médicaments. S'agissant plus spécifiquement des anxiolytiques, ceux-ci sont prescrits pour moitié dans le traitement de l'épilepsie ou de convulsions. Concernant les hypnotiques, ceux-ci sont pour 94 % des médicaments de phytothérapie, et tous prescrits pour traiter les troubles du sommeil. Cette étude montre également que 13,6 % des médicaments psychotropes prescrits aux enfants et adolescents ne disposent pas d'indication pédiatrique. Sur ce point, il faut noter qu'au sein de la population incluse dans l'étude aucun antipsychotique n'a été prescrit à des enfants de moins de 11 ans et aucun antidépresseur n'a été prescrit à des enfants de moins de 6 ans. Par ailleurs, le fait qu'aucune tendance à la hausse dans l'utilisation de ces médicaments n'a été observée entre 2003 et 2005 dans cette population est rassurant, mais ne présume pas de la tendance générale au sein de la population. En tout état de cause, l'utilisation des psychotropes chez l'enfant et l'adolescent fait l'objet d'une surveillance particulière de la part des autorités sanitaires nationales. Ainsi, en janvier 2008, l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) a actualisé ses recommandations sur le bon usage des antidépresseurs au cours de la dépression chez l'enfant et l'adolescent. Cette mise à jour s'inscrivait dans le cadre de la nouvelle indication accordée par l'Agence européenne du médicament (EMEA), en août 2006, au Prozac (fluoxétine) et devrait être suivie prochainement par une mise au point sur le bon usage des traitements de l'hyperactivité et des troubles de l'attention dans cette population. En outre, dans le cadre de la démarche active de surveillance et de gestion des risques, l'AFSSAPS a mis en place, en collaboration avec les laboratoires commercialisant la fluoxétine en France, un dispositif spécifique de suivi de pharmacovigilance au niveau national. Son objectif est de mettre en évidence tout risque (effets indésirables ou mauvaise utilisation) associé à l'utilisation de la fluoxetine chez l'enfant et l'adolescent.

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