M. Patrick Braouezec alerte Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur la situation des demandeurs d'asile dont le premier examen a donné lieu à un rejet. En France, pendant la procédure d'asile accélérée (dite prioritaire), les demandeurs n'ont pas accès au séjour ni à tous les droits sociaux (hébergement, allocation) dès l'examen en première instance ; surtout, en cas de rejet, ces personnes peuvent être renvoyées à tout moment vers leur pays où elles ont des craintes de persécutions. En effet, cette procédure ne permet pas aux demandeurs d'asile de rester sur le territoire français le temps que la cour nationale du droit d'asile statue sur leurs craintes en cas de retour. En 2007, plus de 8 000 personnes ont été concernées par cette procédure accélérée. Pourtant, dans le cadre des travaux de l'Union européenne sur l'asile, en juillet 2007, la France avait fait part de son souhait que « au regard des difficultés posées par une harmonisation formelle des procédures de recours soit reconnu à tout le moins, le principe d'un recours systématiquement suspensif pour les demandeurs d'asile » (contribution française de juillet 2007 au livre vert de la Commission européenne). À l'heure où la France prend la présidence de l'Union européenne, le renforcement des garanties offertes aux demandeurs d'asile en France serait un signal fort sur la tenue de ses engagements, alors même que des vies humaines sont "en jeu''. En conclusion, il aimerait connaître ce que le Gouvernement compte faire pour que la procédure d'asile en France soit conforme au droit international des réfugiés, ce qui somme toute ne fait que correspondre aux recommandations du comité contre la torture des Nations unies, du Haut commissariat pour les réfugiés et du commissaire européen aux droits de l'Homme.
Conformément aux dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, tout demandeur d'asile a, en principe, le droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) et, si un recours a été formé contre une décision négative de l'OFPRA, jusqu'à la décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA). Cette procédure, dite procédure normale est la procédure de droit commun d'examen des demandes d'asile. Toutefois, en application des dispositions de l'article L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les recours formés devant la CNDA par les demandeurs d'asile dont la demande est instruite selon la procédure dite prioritaire prévue par l'article L. 723-1 du même code n'ont pas pour effet de suspendre l'exécution de la mesure d'éloignement. Cette procédure est applicable dans des cas exceptionnels, énumérés limitativement par l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ainsi, elle est mise en oeuvre dans l'hypothèse ou le demandeur d'asile est un ressortissant d'un pays que l'OFPRA ne considère plus comme présentant des risques particuliers de persécutions (clause 1C5 de la convention de Genève du 28 juillet 1951) ou qui figure sur la liste des pays d'origine sûrs. Cette procédure concerne également les demandeurs d'asile dont la présence en France représente une menace grave pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sûreté de l'État. Enfin, la procédure prioritaire s'applique aux personnes dont la demande d'asile est manifestement abusive ou frauduleuse, ou n'est déposée qu'en vue de faire obstacle à une mesure d'éloignement. La procédure prioritaire vise à concilier l'exigence d'un examen effectif des craintes de persécutions ou de mauvais traitements par 1'OFPRA et la nécessité de faire face à des demandes d'asile dilatoires présentées pour des motifs étrangers à une recherche de protection. Cette procédure a été jugée conforme au droit d'asile, tel que garanti par la Constitution, par le Conseil constitutionnel (décision n° 93-325 DC du 13 août 1993). Il convient enfin de noter que la décision de l'OFPRA refusant la reconnaissance du statut de réfugié n'implique pas par elle-même et nécessairement l'éloignement du demandeur d'asile débouté. La mesure d'éloignement constitue en effet une décision distincte prise par le préfet et soumise elle-même à un contrôle juridictionnel approfondi exercé par la juridiction administrative. Lorsqu'il est saisi d'un recours, le juge administratif procède à un examen détaillé de la situation du demandeur d'asile débouté, en ce qui concerne la procédure qui lui a été appliquée, mais également en ce qui concerne ses craintes de mauvais traitements dans son pays d'origine et son droit à mener une vie privée et familiale normale, conformément aux articles 3 et 8 de la convention européenne des droits de l'homme. Le recours dirigé contre la mesure d'éloignement revêt un caractère suspensif et la décision de reconduite ne peut être exécutée avant l'expiration d'un délai de quarante-huit heures suivant sa notification ou, en cas de recours, avant que le président du tribunal administratif ait statué. Tout demandeur d'asile débouté par l'OFPRA, qu'il ait été placé en procédure de droit commun ou en procédure prioritaire, peut donc bénéficier d'un recours suspensif devant une juridiction indépendante, préalablement à son éloignement du territoire français. La volonté de ménager les droits légitimes des demandeurs d'asile, d'une part, la nécessité de lutter contre les demandes abusives qui nuisent finalement à l'examen des situations plus sensibles, d'autre part, justifient le maintien en l'état de la procédure prioritaire. S'agissant de la réponse de la France au livre vert de la Commission européenne, il sera rappelé que ce dernier expose le programme des actions qui devront être menées conjointement par la Commission et les États membres en vue de l'harmonisation des procédures d'asile et de la mise en place du futur régime européen commun. La France, comme l'ensemble des États membres, a fait connaître sa position quant à ces propositions et suggéré certaines orientations pour aboutir à cette harmonisation. Ces deux documents sont donc prospectifs, dépourvus de valeur contraignante et leurs recommandations ne pourront être mises en oeuvre qu'après négociations et en accord avec l'ensemble des États membres et la Commission et devront s'inscrire dans le cadre d'une démarche globale d'harmonisation. Aussi, il est prématuré, pour des raisons de sécurité juridique, d'envisager de procéder unilatéralement à une révision en profondeur de la procédure en vigueur en France, alors même que les dispositions qui seront finalement retenues par la Commission européenne et par nos partenaires européens ne sont pas définies.
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