M. Frédéric Cuvillier attire l'attention de Mme la ministre du logement et de la ville sur l'incohérence manifeste existant entre la législation relative aux immeubles menaçant ruine et le devoir de préservation de la sécurité publique incombant au maire. En effet, le code de la construction et de l'habitation (articles L. 511-1 et suivants) comme la jurisprudence constante en la matière (CE, 26 juillet 1985, commune de Vigny ; CE 26 septembre 2001, Westerloppe) n'autorisent pas le maire, dans la cadre d'un arrêté de péril grave et imminent pris après avertissement adressé au propriétaire, à prescrire la démolition totale d'un immeuble alors même que la gravité et l'imminence du péril ont été caractérisés par un rapport d'expert nommé par le tribunal administratif et que l'expert conclut que la démolition totale de l'immeuble constitue la seule mesure de nature à faire cesser le péril dans les plus brefs délais. Dès lors, pour prescrire la démolition totale, le maire n'a d'autre choix que celui d'engager une procédure de péril ordinaire qui, si elle a pour vertu d'assurer le respect du principe du contradictoire, s'inscrit dans des délais manifestement incompatibles avec le souci de préservation de la sécurité publique en présence d'un immeuble éminemment menaçant. Il lui demande quelles mesures elle envisage de prendre en l'espèce.
La procédure de péril imminent (art. L. 511-3 du code de la construction et de l'habitat) prévoit l'obligation de faire intervenir un expert désigné par le juge administratif en tout début de procédure, sous peine d'illégalité, et en cas de travaux d'office, de voie de fait. Si le rapport de l'expert conclut à l'existence d'un péril grave et imminent, le maire ordonne les mesures provisoires nécessaires pour garantir la sécurité : étaiement, purges de parties risquant de chuter, bâchage de toiture, détermination d'un périmètre de sécurité, évacuation, voire démolition dans des cas exceptionnels. Il ne peut s'agir que de mesures provisoires, de sorte que de manière générale l'arrêté de péril imminent doit être complété d'un arrêté de péril non imminent afin de prescrire des mesures définitives de confortation du bâtiment. En cas de danger, le maire peut ordonner l'évacuation de l'immeuble, normalement à titre temporaire. Le retour des occupants peut être autorisé après l'exécution des travaux d'urgence, ou des travaux définitifs si les travaux confortatifs provisoires sont insuffisants pour assurer la sécurité des occupants (ou usagers). Dans le cas où les mesures prescrites ne sont pas exécutées dans le délai imparti, le maire les fait exécuter d'office, sans mise en demeure préalable. Dans le cas particulier et exceptionnel de travaux de démolition, le maire peut également les faire exécuter d'office, sur ordonnance du juge des référés statuant à sa demande. La jurisprudence a pu justifier dans des cas d'une extrême urgence la démolition prescrite par un arrêté de péril imminent. La procédure de péril imminent n'apparaît pas, à ce titre, en contradiction avec le devoir de préservation de la sécurité publique incombant au maire, puisqu'elle permet la réalisation des travaux d'urgence répondant à l'imminence du péril, assorti, le cas échéant, de l'évacuation provisoire de l'immeuble. La procédure de péril imminent ne peut donc a priori, et sauf exception, en cas d'extrême urgence, prescrire une démolition. En revanche, le passage à une procédure de péril ordinaire permet de respecter la phase contradictoire, qui consiste à informer le propriétaire, ou le syndic de la copropriété, des désordres constatés en joignant tous éléments utiles dont dispose la commune, et en l'invitant à formuler ses observations dans un délai au moins égal à un mois (deux mois en copropriété). Dans le cadre de cette procédure, le maire pourra alors prescrire les mesures définitives nécessaires à la sortie de péril ou la démolition. À défaut de réalisation des travaux par le propriétaire dans le délai imparti, le maire pourra faire procéder à leur exécution. Il peut également faire procéder à la démolition prescrite, sur ordonnance du juge statuant en la forme des référés, rendue à sa demande (art. L. 511-2 du code de la construction et de l'habitat).
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