Mme Dominique Orliac attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la situation des personnels d'insertion et de probation de la direction de l'administration pénitentiaire. Ces personnels exercent les missions actuellement dévolues aux services pénitentiaires d'insertion et de probation (SPIP). Ces services, créés en 1999, ne sont plus de simples services socio-éducatifs, mais l'évolution de leurs missions en a fait des acteurs majeurs de l'exécution des peines et de la prévention de la récidive. Ils assurent la préparation, le contrôle et le suivi de justice. Ils coordonnent l'ensemble des actions d'insertion dans les établissements pénitentiaires et préparent tous les aménagements de peine pour les personnes détenues (63 000 personnes environ au 1er avril). Depuis 1999, le champ de l'exécution des décisions pénales restrictives ou privatives de liberté, a en effet, été considérablement modifié, par la création de nouvelles mesures (suivi socio-judiciaire, placement sous surveillance électronique fixe et mobile), mais aussi, par une réforme « structurelle », la juridictionnalisation de l'application des peines (loi du 15 juin 2000). En outre, la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, puis celles du 13 décembre 2005 et du 10 août 2007 relatives à la prévention de la récidive ont renforcé le rôle de ces services dans l'individualisation des peines et l'aménagement des courtes peines de prison. Les personnels qui exercent donc au sein de ces services contribuent, quotidiennement par le suivi et le contrôle des personnes condamnées, par l'aide à la prise de décision des juges de l'application des peines, à la réinsertion des personnes placées sous main de justice et à la prévention de la récidive. Ils en sont même les acteurs principaux mais pourtant trop méconnus du grand public. Les personnels des SPIP se posent de nombreuses questions concernant le projet de loi pénitentiaire qui consacrerait l'existence des SPIP et renforcerait sa place dans le processus d'exécution des peines. Ces évolutions à venir, doivent être anticipées en adaptant le statut des personnels à la hauteur des responsabilités qui leur sont confiées. Les organisations syndicales considèrent que ces missions induisent une complexité, une technicité et une expertise qui ne sont pas aujourd'hui prises en compte par l'administration. En effet, le projet de réforme statutaire présenté par l'administration depuis fin mars 2008 n'apporte aucune évolution au corps de base de cette filière que sont les conseilleurs d'insertion et de probation. Ceux-ci n'ont pas connu de réforme statutaire depuis 1977, le statut de 1993 n'étant que la transposition des accords Durafour reclassant l'ensemble des travailleurs sociaux de la fonction publique dans le CII dans la catégorie CII. L'UGSP-CGT et le SNEPAR-FSU, syndicats qui représentent plus de 80 % des personnels, constatent que l'actuel projet de réforme statutaire ne correspond pas à leurs attentes. Cette absence d'évolution et de reconnaissance risque d'accroître une fuite des personnels vers des horizons plus cléments et plus favorables. Ils revendiquent donc l'accès à la catégorie A de la fonction publique pour le corps des CIP. Cette évolution largement attendue ne peut être repoussée de façon hypothétique à 3 ans. C'est pourquoi elle lui demande de lui indiquer quelles mesures elle entend prendre pour répondre à leurs attentes.
La garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire l'attention qu'elle porte à la situation et aux revendications des personnels d'insertion et de probation de la direction de l'administration pénitentiaire. En effet, une partie de ces personnels a exprimé son mécontentement depuis le début du mois de mai au sujet d'un projet d'évolution statutaire dans le cadre de la réforme de la fonction publique initiée par le Gouvernement le 1er octobre 2007. La direction de l'administration pénitentiaire, consciente de l'évolution des missions confiées à la filière d'insertion et de probation au cours des dix dernières années, a procédé à d'importants recrutements qui se sont traduits par un doublement des effectifs de la filière, compte tenu des personnels administratifs qui participent également activement aux missions dévolues dans les SPIP. C'est ainsi que 1 771 agents étaient comptabilisés en 1998 pour 3 491 au 1er janvier 2008. Les années 2006 et 2007 ont vu l'arrivée dans les services de près de 500 nouveaux agents. Les grandes orientations de ce projet de réforme présentées et discutées au cours de cinq réunions avec les organisations professionnelles portaient sur les avancées suivantes : le recours aux statuts-types de la fonction publique afin de favoriser les mobilités inter filières ; la restructuration globale de la filière et simplification autour d'une articulation en deux corps et un statut d'emploi ; la suppression des zones de chevauchement de compétences ; l'accès au grade supérieur par une meilleure reconnaissance des acquis professionnels ; la construction de la filière dans une logique de progression des parcours professionnels ; le régime indemnitaire harmonisé et modernisé en application de la réforme de l'État. Ces orientations ont été rejetées par les représentants des personnels. Dans ce contexte, la garde des sceaux a demandé à Mme Charlotte Trabut, inspecteur des services judiciaires, de conduire une mission d'expertise et de propositions. À la lumière des entretiens réalisés dans le cadre de cette mission, il a été décidé qu'il n'y aurait pas de modulation de la nouvelle prime prévue pour les conseillers d'insertion et de probation, que la durée de la formation de ces personnels ferait l'objet d'un nouvel examen et que la fonction d'encadrement, quel que soit son niveau opérationnel, serait de la seule responsabilité du futur corps d'encadrement. De plus, de la même manière que le directeur de l'administration pénitentiaire a pris l'engagement de ne pas moduler l'indemnité forfaitaire d'insertion et de probation sans accord des organisation syndicales, il n'y aura pas de modulation de la future indemnité de fonctions et d'objectifs. Mme Trabut conduit sa mission en collaboration avec les autorités judiciaires et dans le cadre d'un dialogue étroit avec les organisations syndicales. Par ailleurs, les conseillers d'insertion et de probation s'interrogeant sur l'évolution de leur métier à la faveur notamment des lois pénales votées ces dernières années et d'une demande accrue de prévention de la récidive, la garde des sceaux, ministre de la justice a demandé qu'un audit soit réalisé en identifiant les principaux enjeux d'évolution. Cette mission a été confiée à Mme Isabelle GORCE, magistrat, conseiller référendaire à la Cour de Cassation. Il faut ajouter qu'à la suite des discussions conduites par la direction de l'administration pénitentiaire avec les partenaires syndicaux le 17 et 24 juin 2008, un protocole de travail a été signé avec les trois organisations syndicales représentatives, (SNEPAP, CFDT, CGT) portant sur cinq thèmes : améliorer concrètement le fonctionnement des services ; conduire une réflexion sur les perspectives métier avec les conséquences statutaires et indemnitaires ; adapter la formation professionnelle ; repenser l'organisation et le management des services ; accompagner la mise en oeuvre de la loi pénitentiaire. Une politique de communication sera mise en oeuvre pour garantir une bonne compréhension de ces différents axes de travail et de la méthode choisie par l'administration. C'est donc un chantier de grande ampleur qui s'ouvre dès à présent et qui devrait s'étaler sur plusieurs mois.
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