M. André Gerin attire l'attention de Mme la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative sur les menaces que les exigences de la commission européenne font peser sur les sociétés d'exercice libéral (SEL) de santé et sur notre système de soins lui-même. La législation actuelle impose que la majorité du capital social de ces structures soit détenue par des biologistes, médecins ou pharmaciens. Ce dispositif, commun à l'ensemble des professions libérales de santé, permet aux professionnels de rester maîtres de leur outil de travail. Cela signifie qu'ils peuvent exercer, en toute indépendance et dans le respect des règles déontologiques, sans se trouver soumis à une quelconque pression, notamment financière, qui viendrait compromettre leur exercice professionnel. L'ouverture, sans limite, du capital des SEL de santé exigée par la Commission de Bruxelles entraînera nécessairement la perte de cette indépendance professionnelle. Il n'est nul besoin de rappeler, au vu de l'actualité, que les desseins financiers n'obéissent à aucune règle éthique. Or, dans le domaine de la santé, l'éthique est essentielle ; la perte de la déontologie aura donc des conséquences dévastatrices, quand entreront en concurrence l'exigence d'une bonne prise en charge du patient et l'obligation de résultat vis-à-vis d'un actionnariat, qui peut être international, et, en tout cas, attiré exclusivement par l'appât du gain. L'arrivée des financiers dans le capital des SEL de santé nourrira un phénomène de spéculation autour de ces établissements de soins. Nous risquons de voir apparaître des situations de quasi-monopole avec la constitution de véritables réseaux, sur lesquels les pouvoirs publics n'auront plus de possibilités d'arbitrage et les professionnels de la santé concernés plus aucune maîtrise. Notre système de santé, fondé sur la solidarité nationale, ne saurait se soumettre à des objectifs de rentabilité de grands groupes, financiers internationaux, qui, en outre, bénéficieraient de la manne de notre sécurité sociale. Il souhaiterait connaître les dispositions qu'elle entend prendre pour préserver les exigences d'une véritable politique de santé publique.
La directive 2006/123/CE du Parlement européen et du conseil du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur, dite « directive services », exclut explicitement de son champ d'application par son article 2.2.f « les services de soins de santé, qu'ils soient ou non assurés dans le cadre d'établissements de soins et indépendamment de la manière dont ils sont organisés et financés au niveau national ou de leur nature publique ou privée ». Cette directive ne fait donc aucunement obligation d'ouvrir le capital des sociétés d'exercice libéral existant dans le champ de la santé. Les éventuelles évolutions envisagées dans ce domaine tireraient leur fondement de l'évolution de l'interprétation jurisprudentielle des règles des traités européens par la Cour de justice des Communautés européennes. Elles ne sauraient être adoptées sans un ensemble de garanties visant à préserver l'indépendance des professionnels concernés et à éviter les conflits d'intérêt, garanties qui, en tout état de cause, feraient l'objet de concertation préalable avec les intéressés.
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