M. Philippe Plisson interroge M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, sur le désengagement de l'agence de l'eau Adour-Garonne pour le financement des travaux d'assainissement des eaux usées portés par les collectivités. Dans le cadre de la mise en oeuvre de son 9e programme d'intervention 2007-2012, l'agence de l'eau a défini comme prioritaires les opérations de traitement des eaux usées s'inscrivant dans la directive cadre européenne du 21 mai 1991 « eaux résiduaires urbaines » (ERU). Ces directives imposent des échéances réglementaires de mise en conformité des systèmes d'assainissement des eaux usées, en tenant compte des capacités de traitement de chaque station d'épuration. Au vu des investissements à réaliser sur l'ensemble du bassin Adour-Garonne, pour permettre aux collectivités de se mettre en conformité avec ces échéances et malgré une augmentation des crédits affectés à l'assainissement, l'agence ne peut pas aujourd'hui, pour tous les autres dossiers, répondre favorablement, non seulement aux engagements de principe pris en 2007, mais également satisfaire les nouvelles demandes. Cette situation met en péril les finances des communes qui avaient engagé avec volontarisme ces projets d'assainissement et qui perdent jusqu'à 25 % des financements prévus. Compte tenu de la hauteur des investissements à réaliser au regard de leurs ressources, les petites communes sont confrontées à un cruel dilemme : soit imputer durablement leurs finances avec des emprunts sur plusieurs décennies et se priver de toute possibilités d'investissement pour plusieurs années, soit abandonner les projets et se résigner à polluer durablement. En Gironde, en complément des opérations qui rentrent dans les échéances règlementaires, le conseil général de la Gironde a recensé : pour les agglomérations supérieures à 2 000 équivalents/habitants les investissements pour des extensions de traitement s'élèvent à environ 80 millions d'euros et pour la collecte (augmentation de la population, projets industriels, traitement des déchets de l'assainissement dans le cadre du plan départemental des déchets...) à près de 34 millions d'euros ; pour les agglomérations inférieures à 2 000 équivalents/habitants, les investissements concernant le traitement sont estimés à près de 86 millions et 184 millions d'euros pour la collecte. Si le désengagement de l'agence persiste pour les années à venir sur toutes les opérations non identifiées comme s'intégrant dans la directive ERU, il est raisonnable de penser que les collectivités qui, aujourd'hui, connaissent un fort développement poursuivront leurs investissements en matière de dépollution des eaux usées, grâce aux aides du conseil général, mais avec une augmentation du prix de l'eau obligatoire. Par contre, les petites collectivités hésiteront à se lancer dans des programmes lourds d'investissements, au vu de leurs moyens financiers très restreints ce qui entraînerait un prix de l'eau inacceptable pour leurs futurs abonnés. De plus, ces mêmes petites collectivités, qui jusqu'en 2007 n'étaient pas assujetties aux taxes de dépollution de l'agence, se retrouvent aujourd'hui redevables sans pouvoir bénéficier des aides financières de cette dernière pour leurs projets. À l'heure où les premières mesures du Grenelle de l'environnement viennent en discussion devant les parlementaires, où la prise de conscience de l'urgence écologique est unanime, ce désengagement financier de l'agence de l'eau Adour-Garonne, entraînant le report sine die des projets de travaux d'amélioration du traitement et de collecte des eaux usées, de mise aux normes des stations d'épuration, voire de l'accroissement nécessaire de leur capacité de traitement, fait craindre dans notre département, plus particulièrement dans les petites collectivités situées en zone rurale, un risque accru de pollution. La condamnation de la France le 23 septembre 2004 par la Cour de justice des Communautés européennes pour retard de mise en conformité des installations d'assainissement soumises à l'échéance du 31 décembre 1998, ainsi que pour insuffisance de délimitation des zones sensibles, la crainte d'une nouvelle condamnation concernant l'échéance du 31 décembre 2000, la cible de 100 % de conformité pour les stations en agglomérations de plus de 2 000 équivalents/habitants prévue pour 2015 alors que l'échéance a été fixée au 31 décembre 2005, laisse présager de probables condamnations supplémentaires assorties du paiement de très lourdes astreintes. Compte tenu de la situation en Gironde, où l'agence de l'eau est confrontée à des priorités urgentes qui imputent ses finances pour deux ans, il propose une solution qui pourrait permettre de traiter l'obligation en n'abandonnant pas le nécessaire. Il s'agirait en l'occurrence de ne pas abandonner les petites communes qui doivent réaliser urgemment leurs chantiers, mais de différer à deux ans les subventions promises. La commune ferait alors un emprunt relais à deux ans, comme pour la TVA, dans l'attente que l'agence de l'eau ait fait face à ses impératifs.
L'agence de l'eau Adour-Garonne a consacré en 2007, première année de mise en oeuvre de son 9e programme, 85 MEUR à la dépollution des eaux usées domestiques, soit une augmentation de 30 % par rapport à la moyenne de 65 MEUR engagés annuellement au cours du 8e programme (2003-2006). Cet effort sensible suffit à peine à répondre aux besoins des collectivités retardataires non conformes à la directive « eaux résiduaires urbaines » (DERU) : malgré cette difficulté, l'agence a également amplifié ses efforts en faveur des communes rurales. C'est ainsi que la part des aides accordées en 2007 à ces communes s'élève à 81 % à l'échelle du bassin. Cette part n'est certes que de 71 % en Gironde mais cela tient au poids de l'agglomération bordelaise. Néanmoins, depuis 2007, 20 MEUR de travaux ont été financés dans les communes rurales du département, pour une aide de 7 MEUR (taux d'aide moyen de 35 %) contre 8 MEUR de travaux aux communes urbaines pour 2 MEUR d'aides (25 % de taux d'aide). L'action renforcée de l'agence de l'eau en milieu rural, dans le cadre du programme Solidarité urbain-rural, fait l'objet d'un protocole signé avec le conseil général. Ce protocole prévoit en priorité le financement des collectivités rurales non conformes vis-à-vis de la DERU, et soumises à l'échéance du 31 décembre 2008. Bien qu'ayant réaffirmé le caractère prioritaire des aides financières en faveur de la mise en conformité à la directive DERU, et donc confirmé la politique de sélectivité mise en place depuis 2007, le conseil d'administration de l'agence de l'eau a enregistré un afflux imprévu de demandes émanant des collectivités rurales non concernées par les échéances réglementaires. Il a donc décidé de recourir à un emprunt de 60 MEUR auprès de la Caisse des dépôts et consignations, afin de couvrir les demandes de mise en conformité et, simultanément, dégager des moyens supplémentaires en faveur des collectivités rurales. Les modalités d'emprunt permettront de porter les dotations annuelles relatives à l'assainissement à près de 105 MEUR par an pour les années 2008 et 2009. Cette première tranche d'emprunt, conjuguée à un étalement des engagements et des mandatements des aides accordées aux collectivités urbaines actuellement non conformes vis-à-vis de la DERU, permettra de faire face à la demande, connue à ce jour et non encore satisfaite, des petites collectivités. Enfin, un différé des engagements et des mandatements destinés aux petites communes pourrait éventuellement leur permettre d'engager sans tarder les travaux, tout en bénéficiant un peu plus tôt de l'assurance de l'aide financière de l'agence de l'eau. Cette option n'a, à ce jour, pas été retenue par le conseil d'administration de l'agence de l'eau, mais pourrait lui être présentée à l'automne 2008.
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