M. Jean-Marc Nesme attire l'attention de M. le secrétaire d'État chargé de l'industrie et de la consommation sur la récente étude publiée par l'INSEE en collaboration avec le comité national des conseillers du commerce extérieur de la France qui met en évidence un certain nombre de handicaps rencontrés par les industriels français par rapport aux pays concurrents, à savoir une fiscalité trop lourde et un coût du travail trop élevé. Un industriel sur cinq prévoit ainsi de créer une nouvelle activité de production à l'étranger et un sur six d'y transférer des activités de production. Il souhaite savoir ce qu'il envisage de proposer pour remédier à cette situation et éviter de telles délocalisations qui pénalisent tant l'emploi que la création d'emplois dans notre pays.
L'enquête d'opinion réalisée par l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), en collaboration avec le Comité national des conseillers du commerce extérieur de la France, permet de rendre compte de la perception qu'ont les entreprises industrielles en France des principaux handicaps et atouts de l'économie française en termes de compétitivité et d'attractivité. Deux principaux résultats émergent de cette étude : concernant les déterminants des choix de localisation des entreprises interrogées, deux tiers des entreprises ayant délocalisé, ou qui envisagent de le faire, considèrent le coût du travail comme le principal handicap rencontré en France, pour deux entreprises industrielles sur cinq, la fiscalité désavantageuse est également un élément important de la décision de délocaliser ; concernant l'ampleur des projets d'investissements à l'étranger, un peu plus de 20 % des entreprises prévoiraient, dans les prochaines années, de créer de nouvelles activités à l'étranger (contre 12 % sur la période 2002-2007) et 16 % des entreprises interrogées prévoiraient de délocaliser ses activités à l'étranger (contre 12 % sur la période 2002-2007). Une telle évolution représenterait une accélération notable des délocalisations et pose la question des mesures prises par le Gouvernement pour remédier à cette situation et éviter de telles délocalisations. L'étude de l'INSEE est une enquête d'opinion qui cherche à évaluer auprès des entreprises industrielles localisées en France l'attractivité de l'étranger. Si ces conclusions semblent pessimistes, elles doivent être relativisées au regard d'autres sources d'informations sur l'attractivité de la France. Ainsi, lorsque l'on considère les flux d'investissements directs en provenance de l'étranger, la situation française apparaît moins inquiétante. Avec 81 Mds$ de flux d'investissements directs étrangers reçus en 2005 et 2006, la France se situe au 3e rang des pays développés en termes d'attractivité du territoire, après les États-Unis et le Royaume-Uni (source : CNUCED, World Investment Report 2007). Une étude de l'INSEE, publiée en juillet 2005 (« Dossiers - Délocalisations et réductions d'effectifs dans l'industrie française »), estime que 95 000 emplois industriels ont été supprimés en France et délocalisés vers l'étranger entre 1995 et 2001, soit environ 13 500 emplois par an. Sur la période plus récente (2000-2003), le nombre d'emplois délocalisés a augmenté avec environ 15 000 emplois détruits par an. Plus d'un emploi délocalisé sur deux l'a été à destination d'un pays développé, (essentiellement les pays limitrophes de la France et les États-Unis). Ces délocalisations répondent principalement à une logique de restructuration des groupes au sein des pays développés et ne peuvent donc être réduit à une logique de recherche de réduction des coûts. Par ailleurs, d'après les données de l'Agence française pour les investissements internationaux (AFII) (rapport de l'AFII 2007 sur les investissements étrangers en France), le nombre d'emplois créés ou maintenus en France, du fait des investissements étrangers, s'élèvent sur la période 1995-2001 à 189 000, soit environ 27 000 emplois par an. Ce chiffre apparaît donc significativement supérieur aux destructions d'emplois mesurées par l'INSEE. Après un ralentissement sur la période 2001-2005, l'AFII constate une accélération de la création d'emplois en France (avec environ 40 000 emplois créés en 2006 et 34 500 emplois créés en 2007). La majorité de ces emplois résultent d'investissements des pays développés. Au regard de ces éléments, le développement de l'attractivité de la France vis-à-vis des pays développés apparaît comme le moyen le plus efficace de lutter contre les effets de la mondialisation sur l'emploi. À moyen terme, dans les économies dites de la connaissance, l'attractivité est largement déterminée par le développement du potentiel d'innovation. L'intervention publique pour favoriser la compétitivité des entreprises et l'attractivité du site France vise principalement à soutenir l'effort d'innovation en France. Le Gouvernement a également pris un certain nombre de mesures pour réduire la charge fiscale qui handicape l'industrie française. La réforme majeure du crédit impôt recherche (CIR), adoptée dans le cadre de la loi de finances 2008, devrait directement accroître l'attractivité de la France pour les activités à fort potentiel d'innovation. Cette réforme renforce le soutien public à la dépense privée de recherche et développement (R&D) en augmentant significativement le taux du crédit d'impôt appliqué sur le volume des dépenses qui a été porté à hauteur de 30 % pour les dépenses de R&D jusqu'à 100 MEUR, contre 10 % auparavant (auquel s'ajoutait un taux de 40 % sur l'accroissement des dépenses). Au-delà, les entreprises bénéficient d'un crédit d'impôt de 5 %. En outre, les entreprises nouvellement créées bénéficient d'une majoration de leur crédit d'impôt à 50 % la première année et 40 % la deuxième. Le CIR français est aujourd'hui l'un des dispositifs de soutien à la R&D privée le plus généreux au monde, ce qui en fait un élément essentiel de l'attractivité du territoire pour les laboratoires de recherche et les activités d'innovation des entreprises. En stimulant l'effort de R&D des entreprises, la réforme du CIR devrait renforcer la capacité d'innovation de la France et donc l'attractivité du territoire pour les activités à forte valeur ajoutée. Les pôles de compétitivité contribuent à soutenir des projets innovants ayant une visibilité internationale et devraient ainsi permettre d'accroître l'attractivité de la France. La France compte ainsi 71 pôles de compétitivité dont 17 pôles mondiaux. Ces pôles sont au centre de la politique d'innovation de la France. L'enveloppe totale des financements de l'État a été fixée sur la période 2006-2008 à 1,5 MdEUR. Elle est principalement destinée au soutien des projets à forte intensité de recherche et aux projets à dominante industrielle ainsi qu'à des exonérations fiscales spécifiquement destinées aux entreprises implantées dans les zones de R&D et qui participent à des projets collaboratifs (deux entreprises et un centre de recherche). L'étude réalisée par les cabinets de conseil Boston Consulting Group (BCG) et CM-International entre novembre 2007 et juin 2008, à la demande du Gouvernement, a montré que cette politique a permis de renforcer les positions françaises en termes de recherche et d'innovation. Elle sera donc reconduite pour les trois prochaines années (en bénéficiant d'une enveloppe identique). L'allègement de la fiscalité sur les personnes physiques, institué par la loi TEPA (août 2007), permettra également de soutenir les petites et moyennes entreprises (PME) dans leur phase de développement. Les personnes soumises à l'impôt sur la fortune (ISF) peuvent bénéficier d'une déduction fiscale en cas de souscription au capital de PME (à hauteur de 75 % des sommes investies et dans la limite de 50 000 EUR). Cette mesure contribuera à pallier certaines difficultés rencontrées par les PME pour financer leurs projets dans leur phase d'amorçage, de démarrage et d'expansion, et devrait donc favoriser l'emploi. Les mesures récentes en faveur d'un allègement de la fiscalité sur les personnes physiques devraient également constituer un élément favorable à l'attractivité des travailleurs étrangers qualifiés : le taux maximum d'imposition a été fixé 40 % (identique à celui du Royaume-Uni), et la création du bouclier fiscal fixe à 50 % du revenu le montant maximum du prélèvement (au lieu de 60 % auparavant).
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