M. Étienne Mourrut attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur la fragilité du secteur d'activité des fruits et légumes. Si les coûts de production du secteur en France sont largement supérieurs à ceux pratiqués en Espagne et en Italie, nous sommes en mesure de constater également que les prix de vente pratiqués dans le secteur des fruits et légumes sont bien souvent inférieurs aux coûts de revient. Ce constat serait notamment la cause de pratiques commerciales aléatoires qui ne répondent pas à une logique de pérennité. Les prix seraient en effet fixés par la grande distribution selon des paramètres pas toujours objectifs. Selon une étude relative à la perception du niveau des prix des fruits et légumes, réalisée en 2007 par le CREDOC, ils seraient perçus trop chers par les consommateurs alors que paradoxalement leur prix restent stables depuis 5 ans. La raison de ce décalage entre perception et réalité est expliquée par la variation quotidienne des prix qui entraîne une confusion chez le consommateur et le pousse à freiner sa consommation. Aussi, et afin de permettre une meilleure linéarité dans les prix pratiqués, il serait souhaitable que des règles puissent être mises en place entre les producteurs et le secteur de la grande distribution sous une forme contractuelle. Cette contractualisation aurait pour effet, d'une part, de normaliser les prix et ainsi de redonner confiance aux consommateurs et, d'autre part, d'assurer la pérennité d'un secteur aujourd'hui très fragilisé malgré les investissements qualités, le renouvellement variétal et l'engagement fort pris par les producteurs de fruits et légumes en matière de respect de l'environnement. Au regard de la nécessité de soutenir le secteur d'activité des fruits et légumes, il lui demande de bien vouloir lui communiquer son avis sur ce projet de contractualisation ainsi que sur l'éventuelle mise en place d'une commission tripartite entre les producteurs, la grande distribution et le Gouvernement.
La question des relations entre les fournisseurs et les distributeurs est au centre des préoccupations des acteurs de la filière fruits et légumes. Le caractère périssable des productions de fruits et légumes frais place les opérateurs dans une situation particulièrement vulnérable vis-à-vis des acheteurs, notamment la grande distribution. Par ailleurs, l'atomicité de l'offre face à une demande très structurée, l'inélasticité de la production et son caractère aléatoire provoquent une variabilité des prix et un partage du profit entre l'amont et l'aval défavorables à l'efficacité économique. La contractualisation entre producteurs et distributeurs existe dans le secteur des fruits et légumes sur base volontaire. Ces contrats visent à développer des relations de long terme entre producteurs et distributeurs, en les engageant sur des volumes prévisionnels et en encadrant les prix de cession. Cependant, la contractualisation peine à s'imposer, notamment du fait de l'existence de la pratique du « prix après-vente » (PAV). Il s'agit d'une pratique commerciale courante dans le secteur des fruits et légumes frais entre les grossistes et les metteurs en marché. Le ministère de l'agriculture en lien avec la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes a proposé dans le cadre d'un groupe de travail de l'Office national interprofessionnel des fruits, des légumes, des vins et de l'horticulture, courant 2006, un dispositif d'encadrement de cette pratique en insérant dans les codes d'usage professionnel des recommandations sur le transfert de propriété, les délais de paiement et les mentions obligatoires devant figurer dans le bon de livraison. Il n'a malheureusement pas été accepté par les représentants des producteurs, qui rejettent une pratique sans fixation ou encadrement du prix. De plus, l'extrême volatilité des prix et la faible organisation économique du secteur favorisent les ruptures de contrat. À ce titre, le Conseil national de la concurrence note dans son avis du 7 mai 2008 que « la variabilité des prix contribue elle-même à l'échec des moyens efficaces qui pourraient la contenir ». Compte tenu de ces constats, le ministère de l'agriculture et de la pêche cherche à apporter des solutions au travers d'une meilleure organisation économique, permettant de rééquilibrer le rapport de force entre amont et aval et de développer les relations commerciales contractuelles. L'Interprofession des fruits et légumes frais (INTERFEL) représente une instance de dialogue et de négociation des partenaires professionnels au sein de la filière, du stade de la production à la distribution. Selon la volonté des familles, il est possible d'étendre des règles concernant l'élaboration de contrats types compatibles avec la réglementation communautaire. Par ailleurs, en cas de crise avérée sur le marché, le ministère a prévu des procédures d'urgence, permettant de réunir sous l'égide du ministre les différents représentants de la filière afin d'envisager les solutions pouvant être mises en oeuvre conjointement. Enfin, la nouvelle organisation commune du marché des fruits et légumes ouvre de nouvelles opportunités à saisir pour la filière. Elle permet de renforcer l'organisation économique du secteur en cofinançant les projets d'entreprises des organisations de producteurs visant à améliorer la commercialisation de leurs produits, à moderniser les outils de production ou à faire évoluer les pratiques culturales. Des moyens financiers supplémentaires ainsi que de nouveaux moyens juridiques ont été obtenus, notamment au regard du droit de la concurrence. La nouvelle OCM est notamment dotée d'un dispositif ambitieux de prévention et de gestion des crises. Ces nouveaux outils et moyens doivent être mobilisés pour permettre d'aboutir à des situations de marché stabilisées. Dans ce contexte, il faut avant tout favoriser une approche fondée sur l'organisation économique. La concertation interprofessionnelle ainsi que l'organisation de la première mise en marché, basée sur une relation de confiance entre les différents maillons d'une filière doivent être renforcés. À ce titre, le ministre de l'agriculture et de la pêche a engagé une réforme ambitieuse de la gouvernance de la filière fruits et légumes, visant à faire du renforcement de l'organisation économique et du développement de la concertation interprofessionnelle deux priorités d'action. L'ensemble de ce nouveau dispositif inscrit dans la charte nationale de gouvernance des filières fruits et légumes, a été validé par les professionnels réunis au sein du conseil de direction spécialisé de l'office (VINIFLHOR) le 13 mai dernier. Sa mise en oeuvre est en cours.
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