M. Jean-Louis Gagnaire interroge Mme la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative sur le plan Alzheimer et sur l'action publique en matière de recherche. La maladie d'Alzheimer touche aujourd'hui 850 000 personnes dans notre pays et 225 000 nouveaux cas sont diagnostiqués chaque année. Il s'agit dorénavant de la première cause de dépendance des personnes âgées. Cette maladie neurodégénérative cause une souffrance et une détresse très profondes chez les malades et leur entourage. Malheureusement, l'industrie pharmaceutique ne propose aucun traitement réellement efficace. La maladie d'Alzheimer n'accorde aucun espoir de guérison. Il existe seulement des traitements très onéreux retardant l'évolution de la maladie et leurs effets secondaires restent parfois problématiques. Pourtant, de nombreuses études scientifiques soulignent les effets prometteurs de l'ibuprofène, anti-inflammatoire notamment utilisé contre les rhumatismes. La recherche permettrait de valider ou non cette hypothèse. Malheureusement, des travaux de chercheurs allemands ont récemment été interrompus faute de financement alors qu'ils avaient déjà mis au point une molécule dérivée de l'ibuprofène et que les résultats s'avéraient particulièrement prometteurs. Cette expérience est relatée par un documentaire allemand de Thomas Liesen, « l'énigme Alzheimer » récemment diffusé en France. Il semblerait que l'industrie pharmaceutique se désintéresse de cette possibilité car le développement d'un médicament à partir d'un principe actif déjà connu offre moins d'espace aux brevets et donc moins de perspectives de rentabilité. C'est précisément dans les cas de ce type que les pouvoirs publics ont la responsabilité de financer la recherche publique afin de vérifier la validité d'une hypothèse porteuse d'espoirs pour de nombreuses personnes. Il s'agit d'une intervention d'intérêt général. Il lui demande donc si le volet « recherche publique » du plan Alzheimer prévoit de soutenir les études sur les effets de l'ibuprofène sur la maladie d'Alzheimer ainsi que les intentions du Gouvernement en la matière.
Les perspectives d'avenir concernant le traitement de la maladie d'Alzheimer s'accompagnent de recherches actuellement menées par de nombreuses équipes scientifiques dans le but de développer des médicaments (dont des approches immunologiques qualifiées à ce stade de « vaccins thérapeutiques ») destinés à lutter contre les symptômes et/ou la progression de la maladie. Par ailleurs, de nombreux essais cliniques sont également menés en France avec différents produits afin d'évaluer leur efficacité et leur profil de tolérance chez des patients atteint de cette maladie. Cependant, aucune demande d'autorisation d'essai clinique concernant l'évaluation de l'efficacité d'un anti-inflammatoire non stéroïdien (AINS) dans la prévention de la maladie d'Alzheimer n'est actuellement déposée à l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS). Seules des études épidémiologiques ont suggéré que l'utilisation des AINS, y compris les inhibiteurs de la cyclo-oxygénase de type II (Cox), diminueraient l'incidence de la maladie. En effet, chez le rat et la souris, ces médicaments agiraient en diminuant la production de la protéine amyloïde-bêta, composant principal de la plaque amyloïde. En outre, d'autres effets expérimentaux sur la maladie sont également suggérés. Aussi, une étude clinique en double insu, dénommée JAMA, publiée en juin 2003, portant sur une période d'une année, comparant un Cox-2 (refecoxib) versus naproxen et placebo, réalisée chez des patients atteints de la maladie d'Alzheimer d'intensité légère à modérée, n'a pas démontré d'efficacité des traitements étudiés. Il en est de même pour l'étude préventive en double insu dénommée Arch Neuro, publiée en mai 2008, comparant un Cox-2 et le naproxen au placebo. Enfin, une étude épidémiologique rétrospective sur une base de données américaine, parue récemment dans la revue Neurology, conclut que l'exposition à terme (plus de cinq ans) des AINS en général pourrait diminuer le risque d'avoir une maladie d'Alzheimer. Cet effet serait plus important avec l'ibuprofen. Par ailleurs, les AINS ayant une action expérimentale sur la protéine amyloïde n'ont pas montré d'effet préventif. Cependant, les arguments scientifiques expérimentaux et cliniques restant à ce jour relativement modestes, ils ne permettent pas d'encourager ce type d'études, en particulier sur l'ibuprofène, dans la maladie d'Alzheimer.
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