M. Joël Giraud reprenant une question restée sans réponse lors de la dernière législature attire l'attention de M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique sur la situation paradoxale de ressortissants européens à qui l'on refuse l'intégration dans la haute fonction publique. En effet, trois personnes de nationalité allemande avaient pu suivre avec succès la scolarité de l'École nationale d'administration après s'être soumises à un concours spécifique puisqu'à la date de leur entrée la France n'avait pas encore transposé en droit interne les règles européennes. Souhaitant servir l'État français, elles ont pu intégrer l'administration sous statut contractuel, dans l'attente d'une modification de notre droit. Celle-ci est intervenue par la loi du 26 juillet 2005 et les personnels ont sollicité leur titularisation, soutenus par leur ministère employeur. Or la réponse apportée le 13 octobre 2005 considère que cette loi ne modifie en rien les règles de recrutement dans les corps, fixées par les statuts particuliers, et invite les intéressés à présenter le concours de droit commun, ce qui reviendrait à suivre une deuxième fois la scolarité de l'ENA. Sans mettre en doute l'intérêt et l'excellence des formations dispensées, il ne semble pas que cette réponse soit satisfaisante. La volonté du législateur était bien, par la loi votée le 26 juillet 2005, de transposer le principe de non-discrimination entre nationaux et étrangers et de permettre l'accès de ressortissants européens ayant satisfait aux mêmes concours que les ressortissants de nationalité française, à la fonction publique. Il le remercie de lui apporter les informations sur ce dossier et de lui préciser quelle solution rapide il pense apporter à ce problème.
Le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique a pris connaissance avec intérêt de la question relative à la situation des ressortissants européens anciens élèves de l'ENA qui se voient refuser leur intégration dans la haute fonction publique française. La situation des élèves étrangers ayant accompli le cycle international long de l'ENA n'est pas comparable, à plusieurs égards, à celle des élèves recrutés par l'un des trois concours d'accès à cette école. Tout d'abord, ces élèves sont sélectionnés à partir de tests linguistiques et d'entretiens dans leur pays d'origine, tandis que les fonctionnaires stagiaires de l'école sont lauréats d'un concours de recrutement particulièrement sélectif, conformément aux dispositions de l'article 19 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État. Ensuite, la formation qu'ils accomplissent est différente de celle des lauréats de l'un des trois concours d'accès à l'ENA. Cette différence est justifiée dès lors que les finalités pédagogiques du cycle international long (CIL) sont distinctes de celles de la scolarité sur laquelle débouchent les concours de recrutement de l'ENA. En effet, si les lauréats de l'un des concours de l'ENA sont des fonctionnaires stagiaires ayant vocation à être titularisés dans la fonction publique, le CIL n'a pas vocation, quant à lui, à former de futurs serviteurs de l'État français, mais permet à des ressortissants étrangers, notamment de l'Union européenne, de bénéficier d'un complément de formation en administration publique qu'ils pourront mettre à profit dans leur parcours professionnel, quel que soit leur employeur. Cette distinction, tant dans le mode de recrutement que dans la finalité de la scolarité, se retrouve dans la durée de la formation qu'accomplissent les élèves du CIL et les fonctionnaires stagiaires de l'ENA. Ainsi, les élèves du CIL suivent une scolarité de dix-huit mois, contre vingt-sept mois pour les fonctionnaires stagiaires. Cette différence de durée ne permet pas d'effectuer une comparaison objective de la formation suivie par les élèves du CIL et les stagiaires de l'ENA. Enfin, à l'issue de leur scolarité, les élèves étrangers ne sont pas soumis à une procédure de classement, à l'inverse des fonctionnaires stagiaires, pour lesquels ce classement détermine en grande partie le choix de leur affectation dans la fonction publique. Compte tenu de ce qui précède, les élèves étrangers du CIL, y compris ceux d'entre eux qui sont ressortissants d'un pays membre de la Communauté européenne, ne peuvent prétendre aux mêmes droits que les fonctionnaires stagiaires de l'ENA, et notamment à la titularisation dans un corps de la fonction publique. Il en est de même pour les anciens élèves du CIL recrutés par voie contractuelle sur le fondement de l'article 4-2 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984. D'un point de vue juridique, la titularisation des contractuels dans un corps de la fonction publique n'est pas prévue par le statut général des fonctionnaires. Seul le concours de droit commun permet d'accéder à un corps ou cadre d'emploi de la fonction publique. Sur le fond, le contrat de droit public est une modalité de recrutement à part entière pour entrer dans la fonction publique. Son régime a fait l'objet d'importantes évolutions ces dernières années. Depuis la loi du 26 juillet 2005, les agents non titulaires employés en contrat à durée déterminée peuvent ainsi bénéficier de la reconduction, dans certaines conditions, de leur contrat en contrat à durée indéterminée. De nouvelles garanties leur sont par ailleurs offertes par le décret n° 2007-338 du 12 mars 2007 : réexamen régulier de leur niveau de rémunération, nouveaux outils de mobilité, harmonisation des droits sociaux, généralisation des commissions consultatives paritaires pour l'examen des décisions individuelles, etc. Enfin, dans le sillage du Livre blanc sur l'avenir de la fonction publique, de nouvelles évolutions sont à prévoir, s'agissant de l'équilibre entre les emplois statutaires et les emplois contractuels dans la fonction publique, et de l'harmonisation, à cet effet, des conditions d'emploi des agents. Ces évolutions permettront aux anciens élèves du CIL recrutés en qualité d'agents non titulaires de construire, plus facilement qu'aujourd'hui, un parcours professionnel durable et diversifié dans l'administration, dans des conditions comparables à celles des fonctionnaires titulaires recrutés par le concours de l'ENA.
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