M. Jean-Marc Roubaud attire l'attention de Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi sur la position du médiateur de la République favorable à une réforme des préretraites, considérant que le système actuel, différent selon les régimes de protection sociale des travailleurs, est très inégalitaire. Réformer d'urgence le système de départ anticipé à la retraite des personnes ayant été exposées à l'amiante au cours de leur carrière afin de le rendre plus juste, telle est la proposition de Jean-Paul Delevoye. Ce dispositif permet aux salariés de plus de cinquante ans exposés à l'amiante de partir en préretraite tout en percevant une allocation, l'Allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (Acaata), jusqu'à ce qu'ils remplissent les conditions d'un départ en retraite à taux plein, mais le calcul de l'Acaata est compliqué et parfois défavorable aux salariés. En outre, certains régimes ne servent pas l'Acaata, note le médiateur, citant le cas de la plupart des fonctionnaires et des salariés dépendant du régime minier. Par ailleurs, le régime social des indépendants (RSI) ne dispose pas d'un système de prise en charge des maladies professionnelles. Le médiateur propose donc d'étendre le bénéfice du dispositif à toute personne reconnue atteinte d'une maladie professionnelle ou d'une maladie liée à son activité causée par l'amiante, quel que soit son régime de protection sociale. Il préconise ensuite d'étendre à l'ensemble des régimes, tout en l'encadrant, le droit d'accès à l'Acaata du fait d'avoir travaillé dans un établissement ou une activité à risque. Il souhaite enfin faire bénéficier du dispositif les salariés employés en sous-traitance ou en intérim dans les établissements listés et harmoniser les conditions de prise en charge de l'allocation au sein des différents régimes. En conséquence, il lui demande de lui faire connaître sa position à ce sujet.
L'attention du Gouvernement a été appelée sur la position du médiateur de la République favorable à une réforme des préretraites, considérant que le système actuel, différent selon les régimes de protection sociale des travailleurs, est très inégalitaire. L'exposition des travailleurs à l'amiante a généré une catastrophe sanitaire majeure. En France, les autorités publiques y ont répondu par des mesures exceptionnelles, et notamment la création, en 1999, d'un dispositif collectif de la cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (CAATA). Les lois de financement de la sécurité sociale (loi du 23 décembre 1998 modifiée) qui ont mis en place le dispositif de CAATA fixent des conditions très strictes quant à l'inscription d'un établissement sur les listes établies par arrêté. Elles ont retenu, en priorité, les activités dans lesquelles le risque amiante était le plus élevé. C'est pourquoi les établissements qui peuvent être inscrits sur ces listes pour la période de référence pendant laquelle leurs salariés ont été exposés à l'amiante sont les établissements de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, les établissements de flocage, de calorifugeage, de construction ou de réparation navales. Ces listes, ouvrant droit au dispositif CAATA, sont régulièrement complétées et corrigées, en fonction des demandes faites par les entreprises ou les salariés et des informations reçues sur la réalité de l'exposition à l'amiante pour chaque établissement et de leur appartenance aux secteurs professionnels listés dans la loi, sur la base d'enquêtes de terrain. Les pouvoirs publics ont veillé à ce que les listes d'établissements soient constituées en liaison avec l'ensemble des acteurs locaux de la prévention, après un méticuleux travail d'enquête des services de l'inspection du travail et des caisses régionales d'assurance maladie (CRAM), dont les informations sont recoupées avec celles des partenaires sociaux et des associations. En outre, une circulaire DRT/CT2 n° 2004/03 du 6 février 2004 a permis de clarifier la procédure d'enquête et d'instruction des demandes, de renforcer la transparence et les échanges d'information au niveau local, notamment avec les CRAM, et de faciliter la lisibilité des décisions tant pour les services déconcentrés que pour les partenaires sociaux. Néanmoins, l'application concrète de ce dispositif soulève des difficultés importantes. Malgré le soin apporté aux enquêtes et l'importance du travail administratif qu'elles requièrent, la reconstitution des données est extrêmement délicate dans la mesure où il s'agit d'expositions anciennes, sans aucune traçabilité, et d'entreprises parfois disparues. La deuxième difficulté tient au champ d'application du dispositif législatif, qui ne peut être étendu sans dénaturer l'esprit de la loi d'origine et entraîner une dérive financière. Sur le fond, les décisions prises dans le cadre de ce système collectif de listes d'établissements génèrent, par nature, des incompréhensions, des sentiments d'injustice et des mécontentements qui vont croissant. Concernant la revalorisation des indemnités de l'ACAATA, les règles de calcul de cette allocation sont les mêmes que celles des préretraites du fonds national de l'emploi, avec même quelques adaptations plus favorables. D'une manière générale, un effort financier considérable a été consacré à ce dispositif, doté depuis sa création, en 1999, de plus de 4 milliards d'euros, dont plus de 3,65 milliards provenant de la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) du régime général. Les dotations annuelles de la branche AT-MP au Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (FCAATA) ont été de 700 millions d'euros en 2006 et de 800 millions d'euros en 2007. Le fonds est, donc, très majoritairement financé par la branche AT-MP de la sécurité sociale, par exemple à 93 % en 2006. Pour toutes ces raisons, une réflexion interministérielle est en cours en vue d'une éventuelle réforme de fond, sur la base du rapport de l'inspection générale des affaires sociales (IGAS) de décembre 2005, et des recommandations des rapports du 26 octobre 2005 du Sénat (mission d'information sur le bilan et les conséquences de la contamination par l'amiante) et du 22 février 2006 de l'Assemblée nationale (mission d'information sur les risques et les conséquences de l'exposition à l'amiante). S'agissant de l'uniformisation des indemnités versées par les tribunaux, M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité ne peut que rappeler que seuls les juges du fond sont souverains dans la fixation du montant des préjudices d'une victime. En revanche, le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA) procède à la réparation intégrale des victimes sur la base d'un barème indicatif, dont la fonction est justement de garantir la meilleure homogénéité de traitement des dossiers tout en préservant bien sûr l'appréciation in concreto des préjudices. Cet effort d'homogénéisation de traitement ne semble pas entraîner une insatisfaction des victimes concernant le niveau des offres, puisque celles-ci sont acceptées à 93 %. Concernant la vigilance nécessaire au respect des règles visant à lutter contre toute nouvelle exposition, le dispositif réglementaire de prévention concernant l'amiante est complet avec, d'une part, l'interdiction générale de l'amiante, en France, depuis décembre 1996 et, d'autre part, des règles de prévention très strictes pour assurer la protection des travailleurs qui seront confrontés encore pendant de longues années à l'amiante demeure en place dans les bâtiments et équipements les plus divers. Le décret n° 2006-761 du 30 juin 2006 relatif à la protection des travailleurs contre les risques liés à l'inhalation de poussières d'amiante (codifié aux articles R. 231-59 à R. 231-59-18 du code du travail) rénove et consolide la réglementation prise il y a dix ans pour la protection des travailleurs (décret n° 96-98 du 7 février 1996), après l'interdiction de l'amiante en France. Il améliore la protection des travailleurs susceptibles d'être exposés à l'amiante encore en place. Le non-respect des dispositions relatives à la protection des travailleurs contre les risques liés à l'amiante constitue une infraction pénalement sanctionnée (art. L. 263-2 du code du travail). En outre, l'inspecteur du travail dispose, depuis 1991, du droit de faire arrêter certains travaux (art. L. 231-12 [I] du code du travail). La procédure d'arrêt de chantier a été étendue aux opérations de confinement et de retrait d'amiante par la loi n° 96-452 du 28 mai 1996. Ainsi, l'article L. 231-12 peut être utilisé par l'inspecteur du travail dès lors qu'il existe une cause de danger grave et imminent résultant de l'absence de dispositifs de protection de nature à éviter les risques liés aux opérations de confinement et de retrait d'amiante. Le plan de modernisation et de développement de l'inspection du travail vise également à donner de nouveaux moyens au corps de contrôle afin de donner aux inspecteurs du travail les moyens d'action et de dissuasion nécessaires dans l'exercice de leurs missions. Enfin, dès mars 2004, le ministère chargé du travail, la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) et l'Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS) ont organisé une campagne de contrôle ciblée sur l'ensemble du territoire. Cette démarche a été reconduite en 2005. Puis, en septembre 2006, une nouvelle campagne de contrôle a débuté, menée en liaison avec l'inspection du travail de l'ensemble des vingt-cinq États membres de l'Union européenne. Cette nouvelle campagne s'est inscrite dans le cadre de l'entrée en vigueur des nouvelles règles de protection des travailleurs exposés à l'amiante inscrites dans la directive 2003/18/CE. Son champ a été étendu aux travaux d'entretien et de maintenance. Les résultats de cette dernière campagne ont été rendus publics lors d'une conférence de presse du ministre chargé du travail le 8 février 2007. Ces campagnes conjointes ont pour objectif de repérer et de sanctionner, le cas échéant, les manquements aux règles de sécurité très strictes encadrant ces activités. Des instructions ont été données aux services de l'inspection du travail pour qu'ils continuent à exercer une surveillance particulière des chantiers. Cependant, il y a lieu de rappeler que la responsabilité de mettre fin aux irrégularités constatées relève en premier lieu des entreprises qui interviennent dans ce secteur d'activité.
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