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Patrick Braouezec
Question N° 20375 au Ministère de l'Immigration


Question soumise le 8 avril 2008

M. Patrick Braouezec interroge M. le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire sur le phénomène d'externalisation de la politique de contrôle mis en place par la France lors de certaines liaisons aériennes entre Bamako et Paris, via Ouagadougou. L'externalisation des contrôles, qui limite les arrivées aux frontières et interdit l'accès au territoire, renforce les mesures. Ainsi la France, comme toute l'Union européenne, les a multipliées : « officiers de liaison » des États membres de l'Union envoyés en poste dans des pays tiers pour contribuer à renforcer le contrôle des flux vers l'Europe, par des échanges dans les consulats et des activités de formation, mais également en effectuant eux-mêmes des contrôles des documents de voyage dans les aéroports de départ ; « visas de transit aéroportuaire » imposés aux ressortissants de pays de plus en plus nombreux pour rendre toujours plus difficile le transit et l'arrivée dans les aéroports européens ; « sanctions » imposées aux transporteurs pour les « responsabiliser », ce qui les incite à sous-traiter les contrôles à des agences privées de sécurité difficilement contrôlables. Cela s'est ainsi fait le 22 mars 2008, lors de l'escale de Ouagadougou. La compagnie Air Burkina a demandé aux passagers ayant embarqué, une heure plus tôt, à Bamako de présenter leurs pièces d'identité aux agents de sécurité d'une société privée venant de monter à bord. 3 hommes pour lesquels il y a eu doute quant à l'authenticité de leurs passeports, ont été contraints de quitter l'avion. Ils ont été renvoyés à Bamako. Cette logique insidieuse de sous-traitance et de privatisation des contrôles aux frontières entraîne un traitement discriminatoire des voyageurs africains et des manquements inévitables au respect des droits des passagers avec une quasi-impunité. Pourtant, selon le Conseil constitutionnel, les dispositions relatives aux sanctions des transporteurs « ne sauraient s'entendre comme conférant au transporteur un pouvoir de police aux lieu et place de la puissance publique ». Au contraire, elles ont « pour finalité de prévenir le risque qu'une entreprise de transport refuse d'acheminer les demandeurs d'asile au motif que les intéressés seraient démunis de visa d'entrée en France ». Des associations, comme l'ANAFE et RESF, s'inquiètent de ce phénomène d'externalisation de la politique répressive de pays comme la France, confiée au bon vouloir de personnels qui ne devraient pas pouvoir se substituer à des personnels habilités à exercer des missions de police. En conséquence, il aimerait savoir ce que le Gouvernement compte mettre en place pour que soient respectés la protection et l'accueil des étrangers, et en particulier des demandeurs d'asile, et que ne soit plus favorisée la volonté de renforcer le contrôle des flux migratoires.

Réponse émise le 1er juillet 2008

Le principe de la responsabilité du transporteur résulte de l'annexe 9 de la convention de Chicago, ratifiée par la France depuis le 13 novembre 1946, qui dispose que « les exploitants d'aéronefs prendront les précautions nécessaires au point d'embarquement pour s'assurer que les passagers sont en possession des documents prescrits par les États de transit et de destination » et que « l'exploitant d'aéronefs réacheminera la personne non admissible au point où elle a commencé son voyage ou à tout autre endroit où elle peut être admise ». L'article 26 de la convention de Schengen et la loi du 26 février 1992 ont entendu sanctionner le non-respect de cette obligation par la mise en place d'un système d'amendes. C'est donc en application d'engagements internationaux que le cadre légal de la responsabilisation des transporteurs a été défini. C'est ainsi qu'au terme des articles L. 625-1 à L. 625-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, toute entreprise de transport ayant débarqué sur le territoire français un étranger non ressortissant de l'Union européenne, démuni des documents de voyage requis - c'est-à-dire authentiques et valables - pour rejoindre sa destination finale, encourt une amende d'un montant maximum de 5 000 EUR, lequel a été fixé conformément à la directive européenne n° 2001-51 du 28 juin 2001. Les vérifications documentaires exigées peuvent être effectuées par un agent d'embarquement, c'est-à-dire un professionnel ayant reçu une formation suffisante pour reconnaître, à l'oeil nu, les falsifications ou contrefaçons les plus grossières. Il ne s'agit pas d'un contrôle d'identité, qui relève de la compétence exclusive d'un fonctionnaire de police, lequel est habilité à utiliser des moyens approfondis tels que la consultation du fichier des personnes recherchées ou la coercition. En pratique, dans les aéroports ouverts au trafic international, de plus en plus de compagnies aériennes ont recours à une société de services dont les agents sont spécialement formés aux techniques de rapprochement documentaire. Il n'appartient pas aux autorités françaises de s'immiscer dans cette relation contractuelle d'ordre privé, ni d'intervenir de quelque manière que ce soit dans un espace où s'exerce la souveraineté d'un État tiers. Il est enfin à noter qu'afin de préserver en toute circonstance l'exercice du droit à solliciter l'asile, l'article L. 625-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile exonère le transporteur de sa responsabilité lorsque la demande d'asile d'un voyageur a été, à l'arrivée en France, considérée comme non manifestement infondée.

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