M. Hervé Féron appelle l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la situation des avoués suite au rapport Attali rendu public le 23 janvier 2008. Inquiétudes et interrogations en découlent en effet. Sur le fond, il apparaît simplement que le rôle de la justice n'est pas de relancer la croissance, but des propositions de la commission Attali, car cette justice serait alors à considérer comme un bien de consommation ou un marché. Le degré de technicité des procédures d'appel et les contacts privilégiés avec les magistrats font des avoués et de leurs collaborateurs et salariés des personnels indispensables au service public de la justice, pour le bien des justiciables. Il souhaite avoir la confirmation du ministère sur sa volonté de sauvegarder ce pan important de notre système judiciaire. La décision n° 213 du rapport précité évoque un surcoût non justifiable devant les justiciables. Or, la « valeur ajoutée » bénéfice à la justice et à ses usagers : leur rémunération est calculée de façon à permettre à tous l'égal accès de tous les justiciables au second degré de juridiction. En mutualisant les coûts, la tarification évite les dérives, puisque le coût du procès d'appel n'est pas librement fixé et sera le même quelque soit l'avoué choisi. De plus, l'application de cette décision aurait de graves conséquences sociales. En effet, la disparition des avoués aurait pour effet de supprimer plus de 2 700 emplois, dont la quasi-totalité bénéficie de contrat à durée indéterminé avec une forte stabilité pour les salariés. Et cette perte d'emploi ne serait nullement compensée par des emplois nouveaux. Ainsi, le nombre d'affaires en appel de chacun des quelques 44 000 cabinets d'avocats est suffisamment faible pour que l'augmentation de la charge de travail qui en résulterait pour chacun d'eux puisse être absorbé par le personnel existant. Ces licenciements, outre la prise en charge par l'État des indemnités correspondantes, entraîneront un manque à percevoir des cotisations sociales correspondantes (22,4 millions d'euros de cotisations sociales patronales en 2006). Il est à craindre par ailleurs que la remise en cause de la profession d'avoué ait pour effet de mettre en difficulté et sans doute en liquidation le régime des retraites CREPA, commun aux professions d'avoués et d'avocats. Si la part des avoués est relativement limitée, les cotisations versées par la profession restent indispensables à l'équilibre extrêmement précaire de ce régime de retraite CREPA qui vient de sortir d'une période d'observation, sous laquelle l'avait placé l'ACAM du fait de sa situation financière. Il aimerait savoir si le Gouvernement a bien pris en compte ces données à l'étude du rapport Attali. Enfin, la transposition en droit français de la directive Bolkestein suscite de nombreuses inquiétudes. En effet, le rapport du sénateur Jean Bizet sur la transposition de la « directive services » souligne la volonté de la chancellerie d'exclure du champ d'application de cette directive les fonctions de notaire et d'avocat, sans préciser ce qu'il en sera pour les avoués. Il aimerait avoir la confirmation qu'il s'agit là d'un oubli et que cela sera donc modifié.
La garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire qu'aucune décision n'est à ce jour arrêtée quant à la proposition faite par le rapport de la Commission pour la libération de la croissance française, remis au Président de la République le 23 janvier dernier, de supprimer les avoués près les cours d'appel. Dans la perspective des suites à donner à ce rapport, le Gouvernement a décidé d'engager une concertation approfondie avec la profession et d'évaluer l'ensemble des conséquences que pourraient avoir la suppression de la représentation obligatoire par avoué près les cours d'appel et la fusion des professions d'avoué et d'avocat. Aucune réforme ne saurait en effet être envisagée sans que l'ensemble de ses conséquences aient été appréciées, notamment en ce qui concerne la situation de toutes les personnes qui travaillent dans les études d'avoués, dont l'engagement et la compétence sont reconnus. S'agissant de la transposition de la directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur, le Gouvernement en est là aussi au stade d'une réflexion concertée.
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