Mme Valérie Rosso-Debord alerte Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur la lettre ouverte aux maires de France adressée par certains parlementaires qui dénonceraient "une nouvelle fois la politique de désengagement de l'État au détriment des collectivités territoriales". Ces arguments semblent manquer d'impartialité et ne tiennent pas compte des efforts entrepris pour garantir de manière constitutionnelle le financement des transferts de compétences ou pour accompagner les collectivités aux ressources plus modestes. Aussi, elle souhaite connaître l’ensemble des mesures mises en oeuvre dans la loi de finances en faveur des collectivités locales.
La compensation des transferts de compétences obéit depuis 1983 au principe de la neutralité financière, appréciée au « coût historique ». Ce principe a été érigé en principe constitutionnel à l'occasion de la révision constitutionnelle du 28 mars 2003 et figure depuis au sein de l'article 72-2 de la Constitution qui dispose que « tout transfert de compétences entre l'État et les collectivités territoriales s'accompagne de l'attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice » (4e alinéa). La compensation financière est ainsi intégrale, concomitante, contrôlée (via la Commission consultative sur l'évaluation des charges - CCEC), conforme à l'objectif d'autonomie financière inscrit dans la Constitution (par l'attribution de ressources de nature fiscale notamment) et garantie, dans la mesure où elle ne doit pas se dégrader dans le temps. En matière de création et d'extension de compétence, aucune obligation de compensation intégrale des charges ne pèse sur l'État, qui doit néanmoins les « accompagner de ressources déterminées par la loi » (art. 72-2 de la Constitution). Le législateur dispose ainsi d'un pouvoir d'appréciation sur le montant des financements attribués, à condition de ne pas dénaturer le principe de libre administration des collectivités territoriales (décision n° 2004 DC du 13 janvier 2005, décision n° 2011-144 QPC). Comme plusieurs rapports parlementaires l'ont souligné, et notamment celui relatif à la compensation des transferts de compétences récemment soutenu par les sénateurs Yves Krattinger et Roland du Luart dans le cadre des travaux de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation, l'État a toujours veillé, sous le contrôle de la CCEC, à respecter ses obligations constitutionnelles en matière de compensation des transferts, créations ou extensions de compétences. Ainsi, par ses décisions du 30 juin 2011 n° 2011-142/145, 2011-143 et 2011-144 QPC, le Conseil constitutionnel a confirmé que les mécanismes de compensation attachés au financement de quatre prestations sociales de solidarité à la charge des départements - le revenu minimum d'insertion (RMI), le revenu de solidarité active (RSA), l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) et la prestation de compensation du handicap (PCH) - sont conformes aux articles 72 et 72-2 de la Constitution. Sans considérer l'ensemble des compensations versées au titre de l'acte I de la décentralisation, le montant des compensations versées aux collectivités territoriales au titre de la décentralisation s'élève à plus de 19 Mdeuros pour 2012. Les compensations versées annuellement par l'État aux collectivités territoriales au titre des compétences transférées sont ainsi significatives et respectueuses du cadre constitutionnel qui organise les compensations des transferts, extensions et créations de compétences. Par ailleurs, l'État met en oeuvre des mécanismes de péréquation afin de corriger les écarts de charges et de richesses entre les collectivités. Les masses financières consacrées aux dotations de péréquation, et donc aux collectivités les plus modestes, n'ont cessé d'augmenter ces dernières années. La part de la DGF consacrée à la péréquation (tous niveaux de collectivité) est ainsi passée de 4,5 Mdeuros en 2004 (12,3 % de la DGF) à 7,08 Mdeuros en 2011 (17,1 % de la DGF). La progression des dotations du secteur communal a été particulièrement dynamique, avec notamment pour la dotation de solidarité urbaine (DSU) et la dotation de solidarité rurale (DSR), des montants qui ont plus que doublé entre 2004 et 2011, pour atteindre respectivement en 2011, 1,3 Mdeuros et 852 Meuros. Des marges de manoeuvre supplémentaires au profit de la péréquation ont été dégagées par le biais de l'écrêtement du complément de garantie de la dotation forfaitaire des communes. Ce mécanisme a permis depuis 2009 de redéployer plus de 100 Meuros (130 Meuros en 2011) chaque année vers les dotations de péréquation. En 2011, la modulation de cet écrêtement en fonction de la richesse de la collectivité a permis de concentrer les prélèvements sur les collectivités présentant les potentiels financiers les plus élevés. D'autres réformes ont permis de mieux cibler les communes les plus défavorisées, notamment dans le cadre de la répartition de la DSU et de la DSR. S'agissant de la DSU, la réforme engagée en 2009 a conduit à concentrer la progression de la dotation sur un nombre plus restreint de communes, identifiées comme les communes urbaines ayant le plus de difficultés à faire face à leurs charges. Ainsi, en 2011, les 250 premières communes de plus de 10 000 habitants, classées selon un indice synthétique de ressources et de charges, ainsi que les 30 premières communes ayant une population comprise entre 5 000 et 10 000 habitants, bénéficient en sus de leur attribution de droit commun, d'une attribution au titre de la « DSU cible ». En 2011, 56 des 77 Meuros d'accroissement de la DSU ont été répartis au titre de cette fraction. S'agissant de la DSR, la loi de finances pour 2011 a institué, sur le modèle de l'architecture DSU, une troisième fraction « cible » en sus des fractions « bourg-centre » et « péréquation » afin de concentrer l'accroissement annuel de la dotation sur les 10 000 communes rurales les plus défavorisées. En 2011, la moitié de l'accroissement de la DSR y a ainsi été consacré, soit près de 24 Meuros. Le projet de loi de finances pour 2012 prévoit la poursuite du développement des dotations de péréquation de chacune des catégories de collectivités, malgré le gel de l'enveloppe des concours financiers de l'État sur la durée du triennal 2011 - 2013. La DSU devrait ainsi encore augmenter d'au moins 60 Meuros et la DSR d'au moins 39 Meuros. En outre, la péréquation assise sur des transferts de ressources entre collectivités territoriales (péréquation horizontale) connaît un essor sans précédent. Ainsi, après la mise en oeuvre du fonds de péréquation des droits de mutation à titre onéreux des départements en 2011, (26 départements contributeurs, 71 départements bénéficiaires, 440 Meuros redistribués), le projet de loi de finances pour 2012 prévoit la mise en oeuvre effective du Fonds national de péréquation des recettes fiscales intercommunales et communales. Ce dispositif doit redistribuer une masse financière de 250 Meuros dès 2012 : il contribuera grandement à l'équité entre les territoires. Il est appelé à monter en charge d'ici 2015, avec un objectif de redistribution à cette date d'1 Mdeuros. La péréquation horizontale s'enrichira, par ailleurs, en 2013, d'un mécanisme de péréquation sur la croissance de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) perçue par les régions et les départements. Au total, l'ensemble de ces dispositifs a bien pour vocation de garantir des marges de manoeuvre aux collectivités aux ressources les plus modestes.
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