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Patrick Braouezec
Question N° 18489 au Ministère du Budget


Question soumise le 11 mars 2008

M. Patrick Braouezec attire l'attention de M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique sur la réforme annoncée du livret A autorisant toutes les banques à proposer à leurs clients d'ouvrir un livret A, jusqu'à présent accessible uniquement auprès des caisses d'épargne et de La banque postale. Cette réforme fait suite à l'injonction de Bruxelles d'élargir, au nom de la libre concurrence, la distribution du placement préféré des Français. Mais cette réforme recèle, de manière sous-jacente, de nombreuses menaces d'une part, pour le logement social et pour les 46 millions de détenteurs et, d'autre part, pour l'accès des personnes modestes aux services bancaires et pour le modèle Caisse d'épargne. Autoriser l'ensemble des banques à "drainer" l'épargne du livret A, sans condition, c'est prendre le risque d'un "siphonage" de milliards d'euros vers des produits plus rémunérateurs pour des banques qui ont démontré leur peu d'appétence à la distribution de produits d'épargne populaire réglementés. Ces milliards d'euros seraient soustraits au circuit de financement du logement social. Dès lors, il est évident que le coût de cette ressource augmentera au détriment des organismes d'HLM sur lesquels repose le logement social. Ces dix dernières années, l'écart entre le taux du livret A et le coût des emprunts d'État a permis à la Caisse des dépôts et consignations (qui centralise les fonds du livret A pour reprêter aux organismes HLM) à la fois de rémunérer les caisses d'épargne et La Banque Postale en "dédommagement" des coûts de collecte et de gestion du livret A, et de financer le logement social. Ce système peut fonctionner tant qu'il s'appuie sur une collecte largement excédentaire. Or, la réforme du livret A, telle qu'elle est conçue, aggravera le coût du financement du logement social, à un moment inopportun. Chacun sait en effet que, dans de nombreuses villes de France, les prix et le manque de disponibilité foncière renchérissent la construction de logements sociaux, plus que le taux du crédit souscrit par les organismes HLM. Par ailleurs, les caisses d'épargne, avec leurs 3,5 millions de sociétaires et leurs 26 millions de clients, sont enracinées dans la Nation et la conscience collective des Français. Elles sont au service des besoins collectifs, et ancrées dans les territoires et les zones sensibles. Plaçant l'homme au coeur de leur action, les caisses d'épargne, banques coopératives différentes et engagées, donnent un sens à la recherche de la rentabilité, et mettent celle-ci au service de l'intérêt général. N'oublions pas qu'elles ont, en sept ans, consacré 280 millions d'euros au financement de plus de 14 000 projets d'économie locale et sociale dans des domaines associatifs participant à l'autonomie des plus fragiles, au lien social ou encore au retour à l'emploi. En conclusion, il aimerait savoir ce que le Gouvernement compte faire pour que la modernisation du livret A ne remette pas en cause l'efficacité et l'utilité publique ainsi que l'intérêt général de cet outil éprouvé du financement du logement social et symbole de l'épargne populaire, instrument d'accès aux services bancaires des personnes à faibles ressources.

Réponse émise le 27 mai 2008

Le Gouvernement a souhaité engager une réforme de la distribution du livret A qui poursuit trois objectifs : généraliser à toutes les banques la distribution du produit d'épargne préféré des Français, facilitant ainsi encore son accès et son utilisation par tous ; réduire le coût de financement du logement social afin d'appuyer l'effort du Gouvernement en matière de construction à un moment où le besoin de logement représente un enjeu essentiel pour notre pays ; renforcer l'accessibilité bancaire. Ce projet de réforme s'inscrit dans le cadre des orientations fixées par le Président de la République le 11 décembre dernier à Vandoeuvre-lès-Nancy, et notamment le respect de l'équilibre économique des réseaux qui distribuent aujourd'hui le livret A, à savoir les Caisses d'épargne et La Banque Postale, ainsi que le Crédit mutuel pour le « livret bleu ». Un accès facilité au livret A : vu de l'épargnant, les caractéristiques du livret A ne changeront pas après la réforme : le livret A restera un produit d'épargne gratuit, disponible à tout instant et totalement défiscalisé. En revanche, toutes les banques pourront désormais distribuer le livret A, et non plus seulement La Banque Postale, les Caisses d'épargne et le Crédit mutuel, comme c'est le cas aujourd'hui. Après la réforme, ce sont ainsi 40 000 agences bancaires, c'est-à-dire deux fois plus qu'aujourd'hui, qui pourront distribuer le livret A. Chacun pourra ainsi trouver le livret A plus près de chez lui. Le financement du logement social sera renforcé : les banques qui distribuent le livret A touchent aujourd'hui des commissions importantes pour distribuer ce produit. Lorsqu'un épargnant dépose 100 euros pendant un an sur son livret A, la banque qui tient le livret reçoit des pouvoirs publics 1,12 euro en moyenne. Le Gouvernement propose de réduire de près de moitié cette commission en la faisant passer de 1,12 % aujourd'hui à 0,6 % après la réforme. Pour les réseaux distributeurs historiques (La Banque Postale, les Caisses d'épargne et le Crédit mutuel), la transition sera progressive afin de respecter leurs équilibres économiques. Le Gouvernement propose que les économies dégagées par la réduction des commissions payées aux banques soient utilisées pour renforcer le financement du logement social. C'est ainsi l'engagement du Gouvernement en faveur de la construction de logements qui se trouvera conforté. Les sommes collectées sur le livret A continueront de financer le logement social par des prêts des fonds d'épargne de la Caisse des dépôts et consignations. Les fonds d'épargne bénéficieront du même niveau de ressources qu'aujourd'hui pour effectuer ces prêts. Une meilleure accessibilité bancaire pour tous : actuellement le livret A participe à l'accessibilité bancaire au coté du droit au compte. La généralisation de la distribution du livret A est l'occasion de renforcer l'accessibilité bancaire en améliorant l'effectivité du droit au compte. À cet effet, le projet de loi du Gouvernement demande aux banques d'élaborer une charte définissant les modalités précises de mise en oeuvre de ce droit. Cette charte sera homologuée par le ministre de l'économie de l'industrie et de l'emploi, et son respect sera contrôlé par la Commission bancaire. Le fonctionnement et l'efficacité du droit au compte seront ainsi améliorés au bénéfice de tous. Parallèlement, La Banque Postale continuera de jouer le rôle qu'elle joue aujourd'hui en matière d'accessibilité bancaire à travers le livret A. Elle recevra une compensation spécifique pour cette mission. À travers le projet de loi de modernisation de l'économie, le Gouvernement propose de donner au livret A une nouvelle jeunesse et de renforcer les missions d'épargne populaire, de financement du logement social et d'accessibilité bancaire.

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