Mme Delphine Batho alerte M. le ministre de l'agriculture et de la pêche suite à l'autorisation de mise sur le marché accordée au cruiser, produit phytosanitaire commercialisé par la firme Syngenta, qui soulève les plus vives inquiétudes des apiculteurs. Le Gouvernement a justifié cette autorisation de mise sur le marché par l'avis favorable de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments rendu le 20 décembre dernier. Cependant, elle remarque que l'AFSSA avait par le passé émit des avis favorables concernant le gaucho et le régent, deux insecticides qui ont été interdits par la suite, en raison de leur toxicité pour les abeilles, maillon essentiel de la biodiversité. Cette toxicité avait été démontrée par le rapport final du comité scientifique et technique de l'étude multifactorielle des troubles des abeilles, publié en 2004. Concernant le cruiser, l'avis de l'AFSSA contient un certain nombre d'éléments alarmants. Le rapport précise que « les concentrations prévisibles dans les eaux souterraines calculées sont proches de la valeur réglementaire de 0,1 g/l » et que « l'évaluation des concentrations prévisibles dans les eaux souterraines comprend encore des incertitudes ». Par ailleurs, les mentions obligatoires sur le produit précisent qu'il est « très toxique pour les organismes aquatiques, peut entraîner des effets néfastes à long terme pour l'environnement aquatique ». A l'impact du cruiser sur les abeilles, s'ajoutent donc les effets de ce pesticide sur la qualité des eaux souterraines. Enfin, l'AFSSA considère que le thiaméthoxam est susceptible d'engendrer une pollution importante et s'avère très toxique pour les abeilles, les oiseaux et les organismes aquatiques. Si l'agence a jugé les risques pour l'environnement « acceptables », c'est sous la réserve de conditions d'utilisation draconiennes. C'est pourquoi, elle le prie de bien vouloir lui indiquer quelles sont les mesures concrètes mises en oeuvre par le Gouvernement pour vérifier sur l'ensemble du territoire le strict respect de ces conditions d'utilisation. Enfin, alors que le Grenelle de l'environnement prévoit un plan de réduction de l'usage des pesticides de 50 % en dix ans et le retrait du marché des produits contenant des substances dîtes «préoccupantes », elle observe qu'une autorisation de mise sur le marché vient d'être délivrée pour le cruiser, produit dont le classement toxicologique est « N – dangereux pour l'environnement ». Dans ces conditions, elle le prie de bien vouloir lui indiquer si le Gouvernement compte respecter les engagements qu'il avait pris lors du Grenelle de l'environnement en matière de réduction et d'interdiction de certains pesticides.
Le Gouvernement vient d'autoriser dans le cadre de la procédure de la reconnaissance mutuelle une préparation phytopharmaceutique, le Cruiser, utilisée pour le traitement des semences de maïs et contenant du thiametoxam. Cette décision, qui fait suite à un avis de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) et à une consultation interministérielle, a été présentée aux associations de protection de l'environnement et aux représentants de la profession apicole. Certaines organisations apicoles font le rapprochement entre ce dossier et les dossiers relatifs aux retraits du Gaucho puis du Régent au début des années 2000. Il convient de souligner que le contexte réglementaire est aujourd'hui totalement différent : le thiametoxam a été évalué complètement et inscrit au niveau communautaire ; le dispositif d'évaluation du risque en France a été profondément réformé. L'AFSSA a été saisie en septembre 2007 pour évaluer deux préparations phytopharmaceutiques, le Poncho et le Cruiser. Ces préparations, autorisées en Allemagne et utilisées en traitement de semences de maïs, contiennent des substances actives autorisées au niveau communautaire. Sur la base d'une analyse scientifique, notamment des effets sur les abeilles, l'AFSSA a donné un avis favorable pour le Cruiser en assortissant de mesures de précaution son utilisation et, à ce stade, un avis défavorable pour le Poncho compte tenu d'un risque de contamination des eaux souterraines qui, au regard des données disponibles, ne pouvait pas être exclu. En suivant ces avis, le Gouvernement a décidé d'autoriser la préparation Cruiser dans les conditions de précaution, prévoyant notamment : une autorisation limitée à un an suivie d'une nouvelle évaluation ; une limitation de la période avant le 15 mai afin de réduire la période de floraison ; une utilisation autorisée uniquement sur le maïs ensilage, le maïs grain et le maïs porte-graine femelle. La décision d'autorisation a été présentée aux associations de protection de l'environnement et aux représentants de la profession apicole. À la demande de certains d'entre eux, un scientifique et un expert apicole ont été auditionnés par l'AFSSA à l'occasion du comité d'experts spécialisé du 15 janvier dernier. L'AFSSA considère que les éléments qui ont été présentés ne sont pas de nature à modifier les conclusions de l'évaluation sur le risque à long terme pour les abeilles de l'utilisation de la préparation Cruiser en traitement de semences. Cette autorisation permettra aux agriculteurs d'utiliser des préparations dont l'évaluation a été effectuée conformément aux procédures communautaires et nationales. Le ministre de l'agriculture et de la pêche a par ailleurs imposé la mise en place d'un suivi et d'une surveillance des ruchers portant sur trois régions minimum. Les modalités de ce suivi seront définies en concertation avec les représentants des apiculteurs et avec les associations protectrices de l'environnement. Deux réunions du comité de pilotage de l'étude des troubles des abeilles (assisté d'un comité scientifique et technique) se sont tenues les 15 février et 10 avril derniers. Le ministre a par ailleurs rencontré lors d'une réunion le 21 février les organisations professionnelles apicoles et les ONG concernées. Il leur a réaffirmé sa volonté de conduire durant l'année 2008 cette observation contradictoire en lien étroit avec toutes les parties concernées. Enfin, une mission sur la filière apicole a été confiée à M. Martial Saddier, député de Haute-Savoie. Son objectif est la mise en place d'un plan d'action apicole portant sur l'organisation de la surveillance de l'état des ruchers, l'aménagement du territoire et sur l'accompagnement technique, scientifique et économique durable de la filière.
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