M. Pascal Terrasse attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les inquiétudes que suscite, chez les conseillers prud'hommes, un projet de décret concernant le temps de travail qu'ils doivent consacrer à l'étude et à la rédaction d'une décision de justice. Une telle volonté de décider à l'avance du temps nécessaire pour étudier et rédiger un dossier, n'existe dans aucune autre juridiction et n'est imposée à aucun autre juge. Si une telle disposition était mise en place, elle ne manquerait pas de nuire à la qualité des décisions rendues par les conseillers prud'hommes ainsi qu'à la durée des procédures. Il lui rappelle en outre que selon un arrêt récent de la cour d'appel de Chambéry du 12 septembre 2007 (arrêt 07/459), il convient de « retenir que nulle autorité ne saurait être comptable du temps que le juge consacre à son activité juridictionnelle. Il est seul face à sa conscience pour apprécier les conditions strictement nécessaires à l'élaboration de sa décision ». En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui préciser les intentions du Gouvernement sur cette question.
La garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que le régime juridique de l'indemnisation des conseillers prud'hommes reposait sur des textes anciens dont l'interprétation a conduit à des pratiques hétérogènes sur l'ensemble du territoire et à une évolution des dépenses difficilement maîtrisable. Le procureur général honoraire Henri Desclaux a rendu sur cette question un rapport, le 5 octobre 2005, qui a été bien accueilli par les organisations syndicales. C'est pourquoi le projet de réforme a entendu suivre en tout point les conclusions de ce rapport. Ainsi, la loi n° 2006-1770 du 30 décembre 2006 a été adoptée par les deux assemblées et validée par le Conseil constitutionnel. De plus, les projets de décret en Conseil d'État et décret simple soumis au Conseil supérieur de la prud'homie ont, depuis l'origine, exclu toute indemnisation forfaitaire des conseillers prud'hommes et consacré le principe d'une indemnisation au réel. Après un large travail de concertation au sein du Conseil supérieur de la prud'homie qui s'est réuni les 5 mai, 13 octobre 2006 puis les 26 février et 22 juin 2007, le dernier état des textes prévoit deux modes d'indemnisation se superposant selon le temps de rédaction nécessaire : un mode déclaratif reposant sur le seul conseiller rédacteur jusqu'à trois heures ; un mode délibératif reposant sur la formation de jugement jusqu'à cinq heures, puis sur le président, au-delà. Par ailleurs, les durées maximales indemnisables des activités administratives des présidents et vice-présidents des conseils de prud'hommes et de sections dans les juridictions de taille importante ont été augmentées, selon les cas, d'une, deux et trois heures mensuelles. Elles ont été triplées pour les sections des conseils de prud'hommes de Bobigny, Lyon, Marseille et Nanterre, passant de 16 heures annuelles à 60 heures par an. À la suite du rapport conjoint du directeur des services judiciaires et du directeur général du travail, déposé le 20 septembre 2007 et faisant le point de l'état des négociations, la ministre de la justice et le ministre du travail, des relations sociales et des solidarités ont décidé d'augmenter le taux de vacation à 7,10 euros (soit 17 % d'augmentation) et de permettre que l'étude des dossiers après audience soit toujours effectuée par deux conseillers, pour respecter le paritarisme. Le projet de décret en Conseil d'État sur l'indemnisation des conseillers prud'hommes a fait l'objet d'un examen devant la section sociale du Conseil d'État le 15 janvier dernier. Cet examen a donné lieu à des modifications des décrets essentiellement sur la forme. La publication des décrets relatifs à l'indemnisation des conseillers a dû, par ailleurs, être retardée afin de prévoir l'insertion de ces textes dans le nouveau code du travail qui entrera en vigueur le le 1er mai 2008. Ainsi, ces projets de décrets seront publiés dans la version du nouveau code du travail au cours du mois de mai 2008. Une circulaire d'application sera également diffusée à la suite de leur publication. Enfin, la Cour de cassation ne s'étant pas encore prononcée sur cet arrêt à l'encontre duquel un pourvoi a été formé, l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Chambéry, le 12 septembre 2007, ne peut être considéré comme faisant jurisprudence.
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