Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Alain Rousset
Question N° 16965 au Ministère de la Santé


Question soumise le 19 février 2008

M. Alain Rousset attire l'attention de Mme la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports sur les conséquences sanitaires engendrées par les essais nucléaires français et les pathologies qui affectent nombre de personnels civils et militaires ayant travaillé sur ces zones contaminées. Si aucun lien de causalité n'a jusqu'à présent été établi entre ces essais et les pathologies dont souffrent ces personnes, le Gouvernement ne peut rester apathique face aux différents délibérés de justice ayant conduit à reconnaître la responsabilité de l'État en la matière. Le dernier en date, rendu par le tribunal des affaires de la sécurité sociale de Tulle le mardi 8 janvier 2008, a clairement reconnu la faute inexcusable de la société SOTRAPLEX qui oeuvrait à l'époque pour le compte du Commissariat à l'énergie atomique (CEA) sur le site d’essais nucléaires de Mururoa. Atteint d'une leucémie à tricholeucocytes diagnostiquée en 2003, le plaignant a donc obtenu droit à la majoration au maximum légal de la rente qui lui était servie après reconnaissance, lors d'une décision rendue par la caisse primaire d'assurance en mars 2004, du caractère professionnel de sa pathologie. Il tient à souligner qu'il est inconcevable qu'aux souffrances causées par la maladie, viennent s'ajouter la lourdeur de démarches administratives. Au regard des éléments apportés par ces dernières décisions de justice, et alors que le groupe SRC de l'Assemblée nationale a déposé une proposition de loi visant à établir la présomption d'un lien de causalité entre ces essais nucléaires et les pathologies développées par ces personnes, il souhaiterait connaître les intentions du Gouvernement en la matière.

Réponse émise le 27 mai 2008

Le suivi sanitaire des essais nucléaires français fait l'objet d'une attention particulière de la part des pouvoirs publics. C'est ainsi qu'un comité de liaison pour la coordination du suivi sanitaire des essais nucléaires français (CSSEN) a été créé en janvier 2004 par décision conjointe des ministres en charge de la défense et de la santé. Ce comité, codirigé par le président de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et le délégué à la sûreté nucléaire et à la radioprotection pour les activités et installations intéressant la défense (DSND), a adressé son rapport final au ministre de la défense et au ministre de la santé, de la jeunesse et des sports le 3 juillet 2007. Ce rapport est consultable sur le site internet du ministère de la défense (www.defense.gouv.fr), à la rubrique « Enjeux défense : politique de défense : suivi des essais nucléaires ». Les travaux du CSSEN ont porté notamment sur les risques liés aux rayonnements, et se sont donc attachés à définir les pathologies susceptibles d'être radio-induites, qu'elles soient néoplasiques ou d'une autre nature. Ces travaux se sont appuyés sur des données reconnues par la communauté scientifique internationale, tant pour ce qui concerne les études des effets des rayonnements ionisants sur la santé que pour ce qui concerne les études épidémiologiques. Dans le cadre de cette étude, le CSSEN a démontré que les niveaux de doses reçues par la population et les travailleurs sur les sites d'expérimentations étaient faibles et a constaté qu'aucun risque nouveau de cancers radio-induits n'avait été mis en évidence. Pour ce qui concerne le personnel civil, le comité n'a vu aucune raison objective de recommander l'extension d'un régime de présomption d'origine à d'autres maladies que celles auxquelles il s'applique déjà dans le cadre de la reconnaissance des maladies professionnelles, en regard du tableau des maladies professionnelles provoquées par les rayonnements ionisants (tableau n° 6, annexé au livre IV du code de la sécurité sociale). S'agissant du personnel militaire, la mise en place d'un régime d'imputabilité par présomption d'origine n'apparaît pas nécessaire pour permettre une prise en compte, même tardive, de pathologies radio-induites, telle qu'elle est définie par le régime général de la sécurité sociale et ses systèmes complémentaires. En effet, le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre permet d'ores et déjà d'indemniser tout militaire qui, s'il ne peut bénéficier de la présomption d'imputabilité, a la possibilité d'utiliser la démarche d'imputabilité par preuve. Celle-ci peut être admise par tout moyen et à tout moment, sans condition de délai, sachant que la jurisprudence du Conseil d'État admet que la preuve puisse être apportée par un faisceau de présomptions. Ce dispositif permet, dans le cas d'une exposition prolongée à certaines substances, d'admettre l'imputabilité au service des affections en cause dans le cadre des pathologies énumérées sur les listes de maladies professionnelles. Par ailleurs, le ministère de la défense a commandé une étude épidémiologique sur le risque sanitaire lié à la participation de ses personnels aux campagnes d'expérimentations nucléaires au centre d'expérimentations du Pacifique (CEP) entre 1966 et 1996. Cette étude, menée actuellement par un organisme extérieur au ministère de la défense, Sépia-Santé, a débuté en janvier dernier et s'étendra sur une période de deux ans. L'objectif de cette enquête est d'évaluer l'existence d'une éventuelle surmortalité parmi ces personnels, due en particulier à des pathologies néoplasiques, en comparant, d'une part, la mortalité des vétérans ayant une dosimétrie nulle à celle des vétérans ayant une dosimétrie non nulle, et, d'autre part, la mortalité de ces deux groupes à celle de la population française en tenant compte de l'âge, du sexe et de la période considérée. Un comité de pilotage, constitué des membres du comité scientifique de l'Observatoire de la santé des vétérans, composé d'experts appartenant pour la plupart aux agences et instituts sanitaires civils, est chargé de suivre le déroulement de cette étude et d'en garantir l'indépendance scientifique. Les résultats de cette étude devraient être connus au cours du premier semestre 2010. D'autre part, d'anciens militaires, personnels civils ou retraités du ministère de la défense ayant séjourné sur les sites d'expérimentations nucléaires français ont exprimé au ministre de la défense le souhait de bénéficier d'une consultation médicale auprès du service de santé des années. Le ministre a répondu favorablement à ces demandes en donnant des directives, fin janvier 2008, pour qu'ils puissent consulter dans les services médicaux des unités des trois armées et de la gendarmerie. À l'occasion de cette consultation médicale gratuite, réalisée selon les pratiques médicales et réglementaires par un médecin généraliste militaire, les intéressés seront informés sur les démarches leur permettant d'accéder à leurs dossiers médical et dosimétrique et, s'ils le souhaitent, un courrier sera adressé à leur médecin traitant en vue de la réalisation d'éventuels examens complémentaires. Enfin, le secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants souhaite préciser que, dans le cadre des instances engagées par des vétérans du CEP ou du Sahara, le ministère de la défense a une ligne de conduite constante, qui consiste à examiner au cas par cas chacune des situations, chaque demande constituant un cas d'espèce.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Inscription
ou
Connexion