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Jean-Paul Lecoq
Question N° 16892 au Ministère de l'Anciens


Question soumise le 19 février 2008

M. Jean-Paul Lecoq attire l'attention de M. le secrétaire d'État à la défense, chargé des anciens combattants, sur la situation des vétérans des essais nucléaires. En effet, ces personnes réunies en association AVEN depuis 2001 tentent de faire reconnaître par l'État français leur condition, à savoir les répercussions sur leur santé et celle de leurs descendants résultant de leur proximité ou présence sur un site où se sont déroulés des essais nucléaires. A ce jour, pas moins de trois propositions de loi ont été déposées en vue d'accéder aux réclamations tout à fait légitimes de ces personnes. Il y va de la reconnaissance patriotique de la France vis-à-vis d'elles. Ces vétérans demandent à ce qu'il soit établit : une présomption de lien entre le service dans une zone contaminée et la maladie ; la mise en place d'une indemnité globale et forfaitaire ; un suivi médical gratuit pour le vétéran et sa famille ; un titre de reconnaissance de la Nation (par exemple par l'attribution d'une médaille). D'autres nations comme les États-unis, la Grande Bretagne, l'Australie, qui ont eu les mêmes activités que la France en termes d'essais nucléaires ont accédé à ce type de doléance : alors pourquoi la France ne s'en inspire-t-elle pas ? Par ailleurs, la France a su faire montre de compassion à l'égard des personnes ayant travaillé sur des sites contaminés par l'amiante en prenant comme référence le lieu de contamination, pour faire découler le droit à un départ en retraite anticipée. Alors, un raisonnement similaire ne serait-il pas envisageable pour accorder à ces personnes la reconnaissance et la compassion qu'elles attendent ? Il lui demande ce qu'il compte faire pour ces vétérans et leurs familles qui souffrent des répercussions dues aux décisions politiques de la France concernant les essais nucléaires.

Réponse émise le 27 mai 2008

Le suivi sanitaire des essais nucléaires français fait l'objet d'une attention particulière de la part des pouvoirs publics. C'est ainsi qu'un comité de liaison pour la coordination du suivi sanitaire des essais nucléaires français (CSSEN) a été créé en janvier 2004 par décision conjointe des ministres en charge de la défense et de la santé. Ce comité, codirigé par le président de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et le délégué à la sûreté nucléaire et à la radioprotection pour les activités et installations intéressant la défense (DSND), a adressé son rapport final au ministre de la défense et au ministre de la santé, de la jeunesse et des sports, le 3 juillet 2007. Ce rapport est consultable sur le site internet du ministère de la défense : « www.defense.gouv.fr », à la rubrique « enjeux défense : politique de défense : suivi des essais nucléaires ». Les travaux du CSSEN ont porté notamment sur les risques liés aux rayonnements et se sont donc attachés à définir les pathologies susceptibles d'être radio-induites qu'elles soient néoplasiques ou d'une autre nature. Ces travaux se sont appuyés sur des données reconnues par la communauté scientifique internationale, tant pour ce qui concerne les études des effets des rayonnements ionisants sur la santé, que pour ce qui concerne les études épidémiologiques. Dans le cadre de cette étude, le CSSEN a démontré que les niveaux de doses reçues par la population et les travailleurs sur les sites d'expérimentation étaient faibles et a constaté qu'aucun risque nouveau de cancers radio-induits n'avait été mis en évidence. Pour ce qui concerne le personnel civil, le comité n'a vu aucune raison objective de recommander l'extension d'un régime de présomption d'origine à d'autres maladies que celles auxquelles il s'applique déjà dans le cadre de la reconnaissance des maladies professionnelles, en regard du tableau des maladies professionnelles provoquées par les rayonnements ionisants (tableau n° 6, annexé au livre IV du code de la sécurité sociale). S'agissant du personnel militaire, la mise en place d'un régime d'imputabilité par présomption d'origine n'apparaît pas nécessaire pour permettre une prise en compte, même tardive, de pathologies radio-induites, telle qu'elle est définie par le régime général de la sécurité sociale et ses systèmes complémentaires. En effet, le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre permet d'ores et déjà d'indemniser tout militaire qui, s'il ne peut bénéficier de la présomption d'imputabilité, a la possibilité d'utiliser la démarche d'imputabilité par preuve. Celle-ci peut être admise par tout moyen et à tout moment, sans condition de délai, sachant que la jurisprudence du Conseil d'État admet que la preuve puisse être apportée par un faisceau de présomptions. Ce dispositif permet, dans le cas d'une exposition prolongée à certaines substances, d'admettre l'imputabilité au service des affections en cause dans le cadre des pathologies énumérées sur les listes de maladies professionnelles. Par ailleurs, le ministère de la défense a commandé une étude épidémiologique sur le risque sanitaire lié à la participation de ses personnels aux campagnes d'expérimentations nucléaires au centre d'expérimentation du Pacifique (CEP) entre 1966 et 1996. Cette étude, menée actuellement par un organisme extérieur au ministère de la défense, « SEPIA-SANTE », a débuté en janvier dernier et s'étendra sur une période de 2 ans. L'objectif de cette enquête est d'évaluer l'existence d'une éventuelle surmortalité parmi ces personnels, due en particulier à des pathologies néoplasiques, en comparant, d'une part, la mortalité des vétérans ayant une dosimétrie nulle à celle des vétérans ayant une dosimétrie non nulle, et, d'autre part, la mortalité de ces deux groupes à celle de la population française en tenant compte de l'âge, du sexe et de la période considérée. Un comité de pilotage, constitué des membres du comité scientifique de l'Observatoire de la santé des vétérans, composé d'experts appartenant pour la plupart aux agences et instituts sanitaires civils, est chargé de suivre le déroulement de cette étude et d'en garantir l'indépendance scientifique. Les résultats de cette étude devraient être connus au cours du 1er semestre 2010. D'autre part, d'anciens militaires, personnels civils ou retraités du ministère de la défense ayant séjourné sur les sites d'expérimentation nucléaires français ont exprimé au ministre de la défense le souhait de bénéficier d'une consultation médicale auprès du service de santé des armées. Le ministre a répondu favorablement à ces demandes en donnant des directives, fin janvier 2008, pour qu'ils puissent consulter dans les services médicaux des unités des trois armées et de la gendarmerie. À l'occasion de cette consultation médicale gratuite, réalisée selon les pratiques médicales et réglementaires, par un médecin généraliste militaire, les intéressés seront informés sur les démarches leur permettant d'accéder à leurs dossiers médical et dosimétrique et, s'ils le souhaitent, un courrier sera adressé à leur médecin traitant en vue de la réalisation d'éventuels examens complémentaires. Enfin, la réglementation actuelle limite l'attribution du titre de reconnaissance de la nation ainsi que celle de la médaille qui lui est attachée, aux seuls militaires et civils français ayant servi au cours de conflits armés ou d'opérations ouvrant droit à la carte du combattant. Cependant, d'autres distinctions ont permis et permettent encore de récompenser les vétérans du CEP. Ainsi, les militaires ayant servi à partir de 1981 sur le site de Mururoa et étant titulaires de la médaille de défense nationale peuvent lui adjoindre l'agrafe « Mururoa-Hao ». Mais, surtout, civils et militaires ayant oeuvré sur les sites des essais nucléaires peuvent voir la qualité de leur service ainsi que leur dévouement pris en compte pour l'attribution des ordres nationaux et, pour les seuls militaires, de la médaille militaire.

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