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Simon Renucci
Question N° 16451 au Ministère du des sceaux


Question soumise le 12 février 2008

M. Simon Renucci attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les risques pour les droits et liberté fondamentaux engendrés par les textes relatifs aux prélèvements génétiques et au fichier national des empreintes génétiques. Il entend souligner l'atteinte au droit à la présomption d'innocence et à la vie privée protégés par la Convention européenne de la sauvegarde des droits et libertés fondamentaux, résultant de l'article L 706-55 du code de procédure pénale, qui donne le droit à un officier de police judiciaire de soumettre d'office à un prélèvement d'empreintes génétiques, une personne à l'encontre de laquelle il existe seulement des indices rendant vraisemblable qu'elle ait commis une infraction. Il en résulte que dans la majorité des cas, les prélèvements ADN s'effectuent sans l'autorisation ni le contrôle d'un magistrat. Cette situation a conduit à de nombreux abus tels que le prélèvement d'ADN de femmes enceintes de plus de huit mois ou de mineurs sans l'autorisation de leurs représentants légaux, ou à des prélèvements injustifiés au regard des faits pour lesquels les personnes étaient entendues par les autorités de police. Plusieurs décisions de justice récentes ont d'ailleurs condamné cette pratique systématique du prélèvement ADN par les officiers de police judiciaire en relaxant les personnes qui avaient refusé de s'y soumettre. Compte tenu de ces dérives, il lui demande bien vouloir prendre les mesures nécessaires pour que seuls les prélèvements d'empreintes génétiques formellement autorisés et contrôlés par un magistrat soient dorénavant possibles.

Réponse émise le 25 mai 2010

Le second alinéa de l'article 706-54 du code de procédure pénale dispose que les empreintes génétiques des personnes à l'encontre desquelles il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu'elles aient commis l'une des infractions mentionnées à l'article 706-55 du code de procédure pénale sont enregistrées au fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG) : la décision d'enregistrement est prise par un officier de police judiciaire, d'office ou à la demande du procureur de la République ou du juge d'instruction. Un officier de police judiciaire peut donc, dans certains cas, prendre l'initiative d'un prélèvement biologique sur une personne, destiné à permettre l'analyse d'identification de son empreinte génétique, sans autorisation préalable d'un magistrat : c'est également le cas, en matière d'empreintes digitales. Pour autant, ce pouvoir d'initiative dévolu aux officiers de police judiciaire ne s'exerce pas sans contrôle de l'autorité judiciaire. D'une part, le FNAEG est placé sous le contrôle d'un magistrat du parquet hors hiérarchie, assisté par un comité de contrôle. D'autre part, aux termes de l'article 706-54 du code de procédure pénale, l'autorité judiciaire exerce un contrôle a posteriori sur l'enregistrement des profils génétiques au FNAEG. Le procureur de la République peut ordonner d'office l'effacement du profil génétique du traitement. Il peut également être saisi à cette fin par l'intéressé qui, en l'absence de suite favorable à sa demande, pourra saisir le juge des libertés et de la détention dont la décision pourra, elle-même, être contestée devant le président de la chambre de l'instruction. Il convient de rappeler, par ailleurs, que le prélèvement biologique, réalisé avec un écouvillon buccal, ne met en effet pas en péril l'intégrité physique de la personne prélevée, et est assimilé à un prélèvement externe. Pour le Conseil constitutionnel, de tels prélèvements, réalisés sur des suspects ou témoins ou victimes, quelle que soit l'infraction, ne constituent pas une atteinte à l'inviolabilité du corps humain ou à la liberté individuelle : ils n'imposent en outre aux intéressés « aucune rigueurqui ne serait pas nécessaire » (décision du 13 mars 2003n° 2003-467 DC). Il doit être enfin précisé que les motifs qui ont conduit plusieurs juridictions à relaxer des prévenus poursuivis pour avoir refusé un prélèvement aux fins d'analyse génétique sont divers : certains n'ont pas tenu à une irrégularité avérée du prélèvement, mais à l'insuffisance des éléments de la procédure pour vérifier sa régularité. Plusieurs pourvois sont, en tout état de cause, pendants devant la chambre criminelle de la Cour de cassation. Il importe, en conclusion, de ne recourir au prélèvement et à l'enregistrement des profils génétiques que pour servir les seules finalités du FNAEG que constituent l'identification et la recherche d'auteurs des infractions énumérées à l'article 706-55 du code de procédure pénale. Le strict respect de cette finalité, et ce sous le contrôle ci-dessus décrit de l'autorité judiciaire, permet de préserver l'équilibre qui doit impérativement être instauré entre protection des libertés individuelles et sécurité publique.

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