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David Habib
Question N° 15506 au Ministère de la Justice


Question soumise le 29 janvier 2008

M. David Habib attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les inquiétudes que suscite, chez les conseillers prud'hommes, un projet de décret concernant le temps de travail qu'ils doivent consacrer à l'étude et à la rédaction d'une décision de justice. Les conseillers prud'hommes rappelle à Mme Rachida Dati que cette manière de décider à l'avance du temps nécessaire pour étudier et rédiger un dossier, n'existe dans aucune autre juridiction et n'est imposée à aucun autre juge. Si une telle disposition était mise en place, elle nuirait à la qualité des décisions rendues par les conseillers prud'hommes ainsi qu'à la durée des procédures. En effet, si le décret prévoit de définir des dépassements du temps, l'assentiment des conseillers présents, employeurs et salariés sera indispensable, risquant de poser des problèmes en cas de désaccord entre les conseillers sur le temps à consacrer à une affaire au détriment du justiciable. À l'heure actuelle, les chefs des juridictions exercent déjà un contrôle des temps passés à l'exercice du mandat. Sur les six premiers mois de l'année 2007, au conseil des prud'hommes de Pau, 391 affaires ont été inscrites au fond et 99 en référé. À titre d'exemple, l'application de ce décret amènerait une diminution des temps d'au moins 50 %. Les conseillers prud'hommes s'appuient également sur un arrêt récent de la Cour d'Appel de Chambéry du 12 septembre 2007 (arrêt 07/459) pour justifier leur démarche. Cet arrêt stipule qu'« il convient de retenir que nulle autorité ne saurait être comptable du temps que le juge consacre à son activité juridictionnelle. Il est seul face à sa conscience pour apprécier les conditions strictement nécessaires à l'élaboration de sa décision ». Aussi, il lui demande donc de renoncer à ce projet de décret qui réduirait l'efficacité de la juridiction des prud'hommes et de l'ordre judiciaire en général.

Réponse émise le 1er avril 2008

La garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que le régime juridique de l'indemnisation des conseillers prud'hommes reposait sur des textes anciens dont l'interprétation a conduit à des pratiques hétérogènes sur l'ensemble du territoire et à une évolution des dépenses difficilement maîtrisable. Le procureur général honoraire Henri Desclaux a rendu sur cette question un rapport, le 5 octobre 2005, qui a été bien accueilli par les organisations syndicales. C'est pourquoi le projet de réforme a entendu suivre en tout point les conclusions de ce rapport. Ainsi, la loi n° 2006-1770 du 30 décembre 2006 a été adoptée par les deux assemblées et validée par le Conseil constitutionnel. De plus, les projets de décret en Conseil d'État et décret simple soumis au Conseil supérieur de la prud'homie ont, depuis l'origine, exclu toute indemnisation forfaitaire des conseillers prud'hommes et consacré le principe d'une indemnisation au réel. Après un large travail de concertation au sein du Conseil supérieur de la prud'homie qui s'est réuni les 5 mai, 13 octobre 2006 puis les 26 février et 22 juin 2007, le dernier état des textes prévoit deux modes d'indemnisation se superposant selon le temps de rédaction nécessaire : un mode déclaratif reposant sur le seul conseiller rédacteur jusqu'à trois heures ; un mode délibératif reposant sur la formation de jugement jusqu'à cinq heures, puis sur le président, au-delà. Par ailleurs, les durées maximales indemnisables des activités administratives des présidents et vice-présidents des conseils de prud'hommes et de sections dans les juridictions de taille importante ont été augmentées, selon les cas, d'une, deux et trois heures mensuelles. Elles ont été triplées pour les sections des conseils de prud'hommes de Bobigny, Lyon, Marseille et Nanterre, passant de 16 heures annuelles à 60 heures par an. À la suite du rapport conjoint du directeur des services judiciaires et du directeur général du travail, déposé le 20 septembre 2007 et faisant le point de l'état des négociations, la ministre de la justice et le ministre du travail, des relations sociales et des solidarités ont décidé : d'augmenter le taux de vacation à 7,1 (soit 17 % d'augmentation) ; de permettre que l'étude des dossiers après audience soit toujours effectuée par deux conseillers, pour respecter le paritarisme. Le projet de décret en Conseil d'État sur l'indemnisation des conseillers prud'hommes a fait l'objet d'un examen devant la section sociale du Conseil d'État le 15 janvier dernier. Cet examen a donné lieu à des modifications des décrets essentiellement sur la forme. Les décrets relatifs à l'indemnisation des conseillers sont actuellement en cours de publication au journal officiel. Une circulaire d'application sera également diffusée à la suite de leur publication. Enfin, la cour de cassation ne s'étant pas encore prononcée sur cet arrêt à l'encontre duquel un pourvoi a été formé, l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Chambéry le 12 septembre 2007 ne peut être considéré comme faisant jurisprudence.

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