M. Michel Voisin alerte Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi sur l'impérieuse nécessité de créer un droit opposable au crédit bancaire. L'encadrement de l'accès au crédit dans notre pays est laissé à la libre appréciation des seuls établissements bancaires qui sous couvert de règles non écrites, de fichiers officieux et autres usages sans contrôles décident de qui à droit à quoi et ce, sans qu'un recours ne soit possible dans la quasi-totalité des cas. Ainsi, pour les personnes atteintes de longue maladie (VIH-SIDA, cancers...), le droit au crédit est une gageure et pourtant ces personnes ont besoin, peut-être plus que d'autres, d'avoir recours au crédit : immobilier, trésorerie, consommation... Par ailleurs, d'autres personnes ayant été fichées (officieusement) sont non pas interdites de crédit, mais inéligibles pendant de nombreuses années sans pour autant être encore en difficulté financière, et ce à la seule initiative des établissements bancaires. Enfin, à l'inverse, nombre de crédits sont octroyés sur la seule bonne foi du demandeur, alors que la création d'un véritable fichier des encours serait techniquement possible et impérieusement nécessaire. Aussi, il lui demande quelles sont ses intentions quant à la création d'un droit opposable au crédit et quant à la rédaction d'une véritable loi d'encadrement du crédit.
Les prêts à des personnes dont la solvabilité est incertaine sont à l'origine du phénomène de surendettement. L'action d'emprunter ne peut ainsi résulter d'un droit. Elle doit au contraire reposer sur un jugement responsable du prêteur quant à la situation financière de l'emprunteur. C'est à cette condition que le crédit est utile à nos concitoyens. À défaut, il peut conduire au surendettement contre lequel le Gouvernement lutte activement. Par ailleurs, le risque financier de non-remboursement des crédits est intégralement supporté par les établissements prêteurs. En empêchant les établissements de ne prêter qu'aux emprunteurs dont la situation financière permet le remboursement du crédit, un droit au crédit met potentiellement en danger ces établissements : ce sont alors les capacités et donc l'offre de crédit de l'économie qui sont amoindries au détriment des ménages et des entreprises. Pour autant, si l'État se préoccupe de l'adaptation des outils de prévention du surendettement, il s'intéresse également aux questions d'accès au crédit et stimule les réflexions mais aussi les actions en la matière. Pour prendre quelques exemples récents : la création du fonds de cohésion sociale en 2005 a permis de renforcer le soutien au financement de petits crédits affectés à la création ou au développement d'entreprises par les chômeurs et les titulaires de minima sociaux. De nouvelles expérimentations sont en cours qui visent à étendre le champ de ces actions à des prêts dédiés à l'insertion professionnelle et sociale de publics fragilisés ; l'introduction en France d'une modification des dispositions hypothécaires pour faciliter le recours au crédit en disposant de manière plus souple qu'auparavant des garanties hypothécaires en contrepartie de l'accès à des liquidités (prêt viager hypothécaire et hypothèque rechargeable institués par l'ordonnance du 23 mars 2006) ; la négociation en 2006 de la convention « S'assurer et emprunter avec un risque aggravé de santé » (AERAS) qui permet de mutualiser les garanties d'assurances pour les personnes présentant des risques aggravés de santé (www.aeras-infos.fr). L'État est présent sur un accès élargi au crédit mais selon des modalités qui responsabilisent les emprunteurs et les prêteurs. L'instauration d'un droit opposable au crédit n'irait pas dans le bon sens de ce point de vue. La mise en place d'un fichier national recensant les concours de crédit est aujourd'hui une question controversée. Il y a autant d'associations de consommateurs favorables au « fichier positif » que d'associations qui y sont opposées. Certaines sociétés financières considèrent que ce serait un facteur de développement du crédit mais la majorité des établissements de crédit n'approuvent pas ce dispositif. La Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) ainsi que le Comité consultatif du secteur financier n'y est pas favorable. C'est aussi une position défavorable qui a été retenue par le Conseil économique et social dans l'avis rendu par Mme Crosemarie en octobre 2007. La question de la pertinence d'un dispositif de centralisation de 100 % des crédits pour 4 % de crédits posant problème est complexe à trancher. Le Gouvernement est ouvert à la discussion mais il estime qu'il n'existe pas aujourd'hui un consensus suffisamment large pour légiférer sur cette question.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.