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Jean-Louis Gagnaire
Question N° 14664 au Ministère de la Santé


Question soumise le 15 janvier 2008

M. Jean-Louis Gagnaire attire l'attention de Mme la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports sur l'obésité infantile. Si l'obésité est devenue une préoccupation pour les politiques de santé publique, la situation reste néanmoins très préoccupante. Un scénario catastrophe à l'américaine avec une généralisation de l'obésité n'est malheureusement pas à exclure. Pire, nombre d'indicateurs permettent d'établir un parallèle inquiétant. L'obésité infantile progresse de 5,7 % par an, un taux comparable à ceux que les États-Unis ont connus il y a trente ans. La France compte aujourd'hui 1,5 million enfants obèses. Les politiques publiques de ces dernières années n'ont malheureusement pas permis d'infléchir cette tendance. Les recommandations du programme national de nutrition santé restent trop souvent lettre morte, la circulaire sur la qualité nutritionnelle n'est que trop peu appliquée par les établissements scolaires, les engagements de l'industrie agroalimentaire sur la base du volontariat sont marginaux et les messages sanitaires issus de la loi sur la santé publique de 2004 n'ont pas d'impact sur les enfants. Si la science n'apporte pas encore de réponses définitives sur le rôle respectif des différentes causes de l'obésité, modes de vie sédentaires, malbouffe ou encore facteur génétique, ses conséquences sont clairement établies : les personnes souffrant d'obésité sont plus exposées que la moyenne aux attaques cérébrales, au diabète, aux maladies cardiovasculaires, à des déficiences articulaires et visuelles ou encore à la dépression. Leur espérance de vie peut ainsi être amputée d'une dizaine d'années. La gravité de ces risques et la progression de l'obésité imposent la construction de politiques publiques offensives. Or celles-ci se cantonnent aujourd'hui au mode de la recommandation et refusent d'adopter le registre de la contrainte. Une enquête de l'UFC-Que Choisir dont elle a eu connaissance montre par exemple le rôle néfaste des publicités sur les enfants. 87 % des publicités alimentaires diffusées pendant les programmes spécifiquement destinés aux enfants portent sur des produits très gras ou sucrés. On ne peut en la matière pas compter sur des démarches volontaires de la part de l'industrie agro- alimentaire, laquelle cherche logiquement à influer sur les habitudes alimentaires des enfants, ni sur de vagues messages d'alerte dont l'inefficacité est démontrée. On peut même s'interroger sur la légitimité d'exposer les enfants à ces publicités, même amendées de messages d'avertissement. L'enfant est par nature irresponsable et doit donc être protégé. Les messages d'avertissement n'ont de légitimité qu'auprès d'un public adulte et responsable capable de mesurer les risques que telle ou telle pratique lui fait encourir. Il ne paraît donc pas surréaliste de réfléchir désormais à l'interdiction totale de ces publicités pendant les programmes pour enfants, interdiction que pratique déjà la Grande-Bretagne. L'INSERM, l'AFSSA, le PNNS mais aussi la FAO et l'OMS demandent d'ailleurs aux pouvoirs publics de recourir à l'interdiction de ces publicités. Il lui demande donc quelles mesures elle compte prendre afin de mettre en place une lutte active et contraignante contre l'obésité infantile. Il lui demande tout particulièrement quelles sont les positions du Gouvernement sur la publicité pour les aliments trop gras ou sucrés.

Réponse émise le 4 mars 2008

L'obésité infantile est devenue un enjeu de santé publique majeur dans la plupart des pays industrialisés. En France, près d'un enfant sur six est obèse aujourd'hui, soit trois à quatre fois plus que dans les années 70. Or, on sait que l'obésité persiste à l'âge adulte chez 80 % des enfants de plus de dix ans atteints et qu'elle augmente, entre autres, le risque de maladies cardio-vasculaires. Face à cette situation préoccupante, les pouvoirs publics ont lancé dès 2001 le programme national nutrition santé (PNNS) qui s'est fixé notamment pour objectif de diminuer de 20 % la prévalence du surpoids et de l'obésité chez les adultes et d'interrompre la croissance de la prévalence du surpoids et de l'obésité chez les enfants. Ces objectifs ont été repris dans la loi relative à la politique de santé publique du 9 août 2004 et dans le second PNNS 2006-2010. Le 12 décembre 2007, les résultats d'études nationales et régionales sur la prévalence de l'obésité et la consommation alimentaire des Français ont été dévoilés lors du colloque du PNNS organisé à Paris : l'étude individuelle nationale de consommation alimentaire 2 (INCA2) menée par l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) a permis d'estimer l'évolution de la consommation alimentaire depuis 1998 (date de la précédente étude INCA qui utilisait une méthodologie similaire) ; l'étude nationale nutrition santé (ENNS) menée par l'Institut de veille sanitaire (InVS) a permis d'estimer la situation en 2006 au regard des objectifs du PNNS et des repères de consommation alimentaires du PNNS diffusés vers la population. Les indicateurs relatifs à l'activité physique (partie intégrante de la question nutritionnelle) ont également été relevés. De plus, l'ENNS a permis de disposer d'indicateurs précis sur les prévalences de l'obésité et du surpoids (chez l'adulte et l'enfant). Avec 3,5 % d'obésité et 14,3 % de surpoids chez les enfants, les résultats montrent une stabilité des chiffres chez les enfants de sept-neuf ans depuis une étude similaire menée en 2000. Ces données sont confirmées par diverses études plus locales. L'un des objectifs du PNNS est donc atteint. De plus, la France a une prévalence de l'obésité et du surpoids chez les enfants parmi les plus faibles par rapport aux autres pays européens. Cependant, ce chiffre masque un accroissement des écarts entre les enfants des classes aisées et défavorisées de la population. En tout état de cause, la lutte contre l'obésité infantile doit s'inscrire dans une démarche globale de prévention et d'éducation, telle que promue par le PNNS. C'est ainsi que, dans ce cadre, de nombreux documents ont été élaborés et largement diffusés à destination tant des professionnels de santé que du grand public ; des outils facilitant un dépistage et une prise en charge précoces du risque d'obésité ont été adressés aux professionnels de santé, un logiciel a été mis à leur disposition afin de faciliter le diagnostic et le lien avec les autres professionnels et les familles. Ont été également développés l'implication des collectivités territoriales dans la dynamique nationale au travers de chartes spécifiques et l'engagement des industriels sur la composition de leurs produits au travers de chartes de qualité. Depuis la rentrée scolaire 2005, les distributeurs automatiques de produits alimentaires ont été supprimés des établissements scolaires. Une circulaire de l'éducation nationale demande la suppression de la collation matinale systématique dans les écoles. De plus, le décret et l'arrêté du 27 février 2007 sur les messages publicitaires et promotionnels en faveur de certains aliments et boissons devant être accompagnés d'informations à caractère sanitaire, ont été publiés en application de la loi relative à la politique de santé publique d'août 2004. Pour les enfants, compte tenu de leur difficulté de lecture, les messages sont délivrés oralement durant les encarts qui encadrent les plages publicitaires. Plusieurs études réalisées par l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (INPES) montrent une très grande acceptabilité d'une information sanitaire dans les messages publicitaires en faveur des boissons avec ajouts de sucre, de sel ou d'édulcorant de synthèse. De tels messages incitent à la réflexion et aux changements de comportements. Plus particulièrement, chez les jeunes, les résultats en termes de mémorisation, compréhension et agrément sont très largement positifs. Au cours du premier trimestre 2008, les pouvoirs publics proposeront aux interprofessions, entreprises et annonceurs de s'inscrire dans une démarche volontaire d'engagements afin que soient mieux encadrées les publicités pour certains aliments diffusées lors de programmes télévisés destinés aux enfants. En ce qui concerne la restauration scolaire, le PNNS2 prévoit un texte juridique plus contraignant que la circulaire du 25 juin 2001 relative à la composition des repas servis en restauration scolaire. Les modalités de mise en place sont actuellement à l'étude et devraient être effectives d'ici la fin de l'année 2008. Par ailleurs, la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports a prévu une concertation entre les ministères et les partenaires concernés, afin d'envisager le retrait des confiseries et les sucreries aux caisses des grands magasins. Enfin, l'installation d'un observatoire de la qualité de l'alimentation (MALI), fruit d'une collaboration étroite entre les ministères chargés de la santé, de l'agriculture et de la consommation, l'Institut national de recherche agronomique (INRA) et l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA), permettra de suivre l'évolution de la qualité de l'offre alimentaire sur le plan nutritionnel et socio-économique.

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