Mme Martine Faure attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les conditions d'exercice du métier de journaliste et sur le respect du secret des sources, pierre angulaire de la liberté de la presse. Perquisitions dans les locaux des journaux et des agences de presse, saisies des ordinateurs et des disques durs, interpellations et placements en garde-à-vue de journalistes se multiplient, jusqu'à la récente mise en examen de l'un d'entre eux pour « compromission et divulgation du secret de la défense ». La volonté de remonter à l'origine des fuites, aussi légitime soit-elle, ne peut, en aucun cas, justifier le recours à des moyens d'investigation réservés habituellement à des malfaiteurs, et cela à seule fin de contraindre des professionnels à révéler l'origine de leurs informations. À l'occasion du colloque organisé par Presse-Liberté le 20 juin 2006, le précédent garde des sceaux avait annoncé publiquement sa volonté d'inscrire le secret des sources comme principe fondamental dans la loi de 1881 et d'accompagner cette réforme de garanties procédurales au profit des journalistes. Par ailleurs, la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) a estimé, dans un arrêt rendu le 7 juin 2007, que la condamnation de deux journalistes qui avaient refusé de communiquer leurs sources, constituait une violation de la liberté d'expression. Compte tenu de ces éléments, elle lui demande si elle a l'intention de tenir les engagements de son prédécesseur et de renforcer la protection des sources journalistiques, mettant ainsi en conformité le droit français avec le droit européen.
La garde des sceaux, ministre de la justice, a l'honneur d'indiquer à l'honorable parlementaire qu'elle est particulièrement attachée à la protection du secret des sources qui est garante d'une information pluraliste, libre et éclairée. Le projet de loi déposé par le Gouvernement le 12 mars 2008 consacre pour la première fois dans notre droit le secret des sources des journalistes. Ce texte, dont les dispositions avaient été annoncées par le Président de la République lors de ses voeux à la presse, a été adopté par l'Assemblée nationale le 15 mai 2008. Il reconnaît solennellement et garantit dans la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse le secret des sources des journalistes. Le champ d'application de ce projet de loi est très étendu puisqu'il retient une définition plus large du journaliste professionnel que celle du code du travail et quels que soient les médias pour lesquels ils exercent, ce qui comprend Internet. Il préserve le secret des sources quelle que soit la personne par l'intermédiaire de laquelle des enquêteurs pourraient chercher à savoir comment et grâce à qui un journaliste s'est procuré une information. Il consacre un droit au secret absolu aux journalistes qui pourront refuser en toutes circonstances de livrer leurs sources sans risquer de sanctions. Ce texte encadre très strictement les actes d'enquête permettant de remonter à la source d'information d'un journaliste. Ces actes ne peuvent être réalisés qu'à titre exceptionnel, lorsqu'ils sont indispensables à la progression d'une enquête portant sur les faits d'une extrême gravité. Et même réalisés dans ces conditions très limitatives, ces actes ne devront pas porter une atteinte disproportionnée au secret des sources ; ils devront être cantonnés au strict nécessaire. Enfin le régime très protecteur des perquisitions et saisies réalisées aux cabinets et domiciles des avocats est étendu aux locaux de presse, domiciles et véhicules professionnels des journalistes. Dans ces conditions, une protection inédite et optimale du secret des sources et instaurée au profit de la presse et dans l'intérêt de l'information du public. Notre droit sera ainsi en parfaite conformité avec les exigences du Conseil de l'Europe et de la Cour européenne des droits de l'homme.
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