Mme Annick Le Loch attire l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé sur les conséquences de l'arrêt rendu par la cour d'appel de Douai le 27 octobre 2011 concernant les victimes de l'amiante indemnisées par le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA). Suite au pourvoi en cassation du FIVA, la cour d'appel de Douai a ordonné à certaines victimes, environ 300 personnes, de rembourser une partie des sommes perçues légalement et pouvant aller de 5 000 à 15 000 euros. Cette décision est vécue comme particulièrement injuste car non seulement ces personnes ont été victimes d'un préjudice important en matière de santé mais elles sont aujourd'hui considérées comme bénéficiaires de sommes indûment perçues. Cela ne fait qu'ajouter de l'injustice au scandale sanitaire de l'amiante et le montant des remboursements demandés pourrait obérer la situation financière de nombreuses victimes. Si les 7 et 14 décembre 2011, le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a demandé au FIVA de prendre les dispositions nécessaires afin que les remboursements prononcés par la justice n'aggravent pas la détresse des victimes et de leurs proches, elle souhaiterait qu'il lui précise sa démarche auprès du FIVA et comment il entend, dans ce dossier, faire respecter le principe de réparation intégrale du préjudice subi.
Le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a pris connaissance avec intérêt de la question relative aux décisions de la Cour d'appel (CA) de Douai au sujet de l'indemnisation de victimes de l'amiante. Rendus le 27 octobre 2011 sur renvoi de la Cour de cassation, les arrêts de la CA de Douai ont pour conséquence d'obliger ces victimes à rembourser au Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA) une partie des sommes qu'elles avaient reçues en exécution d'arrêts rendus par la même cour d'appel en 2008. L'Association nationale des victimes de l'amiante (ANDEVA) exige que le FIVA abandonne en totalité ses créances dans ces affaires. Elle estime en effet, que la manière dont celui-ci s'est défendu devant la Cour de cassation a pu laisser croire aux victimes concernées que les sommes qu'elles avaient perçues après les arrêts de 2008 leur étaient définitivement acquises. Deux sujets sont abordés par ces arrêts, en premier lieu, celui de la déductibilité de l'indemnisation du préjudice physiollogique versée par la sécurité sociale de celle versée par le FIVA. Si le FIVA doit assurer une indemnisation intégrale des victimes de l'amiante, cette indemnisation intégrale doit cependant tenir compte de ce que la victime perçoit par ailleurs, en particulier de la sécurité sociale. Il s'agit d'une simple question d'équité ; indemniser intégralement ne signifie pas pour autant indemniser deux fois. C'est pourquoi, en application de l'article 53 - IV de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000, le FIVA doit déduire de son offre d'indemnisation le montant des prestations versées par les organismes de sécurité sociale au titre du même préjudice. La Cour de cassation a rappelé ce principe à la CA de Douai en cassant ses précédents arrêts. A cet égard, il est étonnant que les avocats des victimes aient poussé celles-ci à engager un contentieux contre le FIVA, compte tenu de l'issue prévisible de ce contentieux. Enfin, il faut relever que le président de l'ANDEVA lui-même convient, finalement, que la décision de la CA de Douai n'est pas contestable sur ce point. En second lieu, les arrêts abordent la question de la valeur du point d'incapacité. La CA de Douai a rejeté la demande des victimes de retenir une valeur linéaire du point d'incapacité au profit d'une valeur dite « progressive », c'est-à-dire qui croit avec le taux d'incapacité. Or cette décision applique simplement la position adoptée par le conseil d'administration du FIVA, composé de représentants de l'Etat, des employeurs, des syndicats et des associations de victimes. Celui-ci a choisi que la réparation soit d'autant plus importante que la pathologie est grave. Il s'agit également de la position retenue par la majorité des autres CA qui ont eu à se prononcer sur le sujet et, de manière générale, par le droit commun de la réparation des dommages corporels et les fonds qui indemnisent de façon intégrale les victimes. Là encore, le conseil dispensé aux victimes par leurs avocats peut s'avérer déroutant. Le président de l'ANDEVA reproche au FIVA ne pas avoir soulevé ce moyen devant la Cour de cassation mais « d'avoir profité de la rédaction insuffisamment précise de la décision de cassation partielle qui portait sur un autre point - la déductibilité de l'indemnisation servie par la sécurité sociale - pour faire remettre en cause par la CA de renvoi ce principe ». La première question qui se pose donc est de savoir si le FIVA aurait dû soulever, devant la Cour de cassation, le sujet de la détermination de la valeur du point. La réponse est négative : la valeur du point ne procède pas de l'application d'une règle de droit, de sorte qu'elle relève de l'appréciation souveraine des juges du fonds, comme le rappelle d'ailleurs l'ANDEVA dans une note à ses associations. Or, la Cour de cassation ne peut se prononcer que sur des questions de droit. La seconde question est celle de savoir si le FIVA était fondé à soulever ce sujet devant la cour de renvoi. La réponse est positive : si la CA de Douai, sur renvoi de la Cour de cassation, s'est de nouveau prononcée en 2011 sur la question de la valeur du point d'incapacité, c'est en raison de l'étendue de la cassation décidée par la Cour. La Cour de cassation a, en effet, cassé les décisions de la CA de Douai de 2008 sur l'intégralité de l'indemnisation du déficit fonctionnel. Or la cassation replace les parties dans l'état où elles se trouvaient avant le jugement cassé et permet la réouverture des débats sur le fond devant la cour de renvoi y compris sur des points qui n'ont pas été soulevés devant la Cour de cassation. La valeur du point d'incapacité entrant dans le calcul de l'indemnisation du déficit fonctionnel, il était dès lors logique que le FIVA, qui doit appliquer les délibérations de son conseil, soulève de nouveau cette question devant la cour d'appel de Douai, qui a choisi de se prononcer dans un sens contraire à celui retenu en 2008. Aucune faute ne paraît donc avoir été commise par la direction du FIVA. Enfin, et contrairement à ce que prétend l'ANDEVA, aucun commandement de payer n'a été signifié aux victimes par huissier à l'initiative du FIVA. Seuls les arrêts de la Cour de cassation ont été notifiés par huissiers à l'initiative des cabinets d'avocats du fonds aux victimes, comme cela est la règle pour de telles décisions. Cependant, le gouvernement est sensible à la situation difficile dans laquelle se trouvent les victimes. C'est pourquoi, il a été demandé à la présidente du FIVA, en lien avec le conseil d'administration du fonds, d'élaborer les solutions les plus adaptées aux victimes. Ces solutions offrent différentes possibilités, de l'étalement des paiements jusqu'à la remise gracieuse pour les cas les plus critiques, comme cela a déjà été fait par le FIVA. Elles procéderont nécessairement de décisions prises au cas par cas, seul moyen d'assurer l'égalité de traitement entre l'ensemble des personnes concernées, notamment par rapport à celles qui ont d'ores et déjà remboursé ou commencé à rembourser le FIVA.
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