M. Philippe Tourtelier attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire sur la disponibilité des ressources alimentaires pour les abeilles. Les experts scientifiques montrent que les abeilles qui ont accès à un mélange de pollens de différentes plantes sont en meilleure santé que celles qui ne se nourrissent que d'un seul type de pollen. De même, le miel issu de plantes ou fleurs différentes serait également « meilleur ». L'existence d'un environnement jouissant d'une biodiversité suffisante pour préserver l'écosystème qu'est la pollinisation est essentielle. L'intérêt de disposer de ressources alimentaires diversifiées pour les abeilles est déterminant et en conséquence cela l'est pour les productions agricoles. En effet, plus des deux tiers du miel est produit sur des parcelles de grandes cultures agricoles (colza et tournesol). Ces productions jouent donc un rôle majeur dans l'économie apicole. La floraison intervient fin mai-début juin, soit à une période-clé pour assurer le maintien du cheptel et le développement de colonies affaiblies. La situation très difficile de l'apiculture française est connue. Depuis plus de 10 ans, la production nationale décroît (18 000 tonnes en 2007 contre 25 000 tonnes en 2004). Le marché est fortement déficitaire, et nous importons du miel d'Argentine, de Chine... Les quelques 70 000 apiculteurs français doivent, par ailleurs, affronter la prolifération du frelon asiatique, un important fléau encore sans solution efficace. Le déclin des abeilles, sauvages ou domestiques, demeure un très grave problème que l'usage des pesticides ou le développement de cultures OGM plein champ aggravent encore. Pour tendre vers une agriculture durable, l'apiculture est une opportunité. Pourtant, les agriculteurs qui en ont conscience rencontrent des difficultés spécifiques. Le colza est en effet une plante délicate sur le plan agronomique (difficultés « d'installation » de la plante, de protection face aux ravageurs). D'un point de vue technique, les producteurs doivent également faire face à de gros problèmes de désherbage. Pour beaucoup d'apiculteurs, l'enjeu serait d'encourager le développement du colza au delà des régions actuelles. Même chose pour le tournesol, qui connaît des surfaces cultivées en lente diminution. Avec les agriculteurs qui ont intégré que les abeilles contribuent aux rendements de leurs productions en pollinisant leurs cultures, les apiculteurs souhaitent un soutien et des actes. Les agriculteurs et apiculteurs du réseau biodiversité abeilles proposent de soutenir les productions oléagineuses sur le territoire, ce qui permettrait de faire « coup double » : accompagner les agriculteurs qui concilient production et respect de l'environnement et aide effective aux apiculteurs. Il lui demande donc de quelle manière il compte agir en ce sens dans l'intérêt de l'agriculture, de la biodiversité et de l'environnement.
Les choix effectués par les exploitants agricoles en matière d'assolement résultent de plusieurs facteurs : les conditions agronomiques et climatiques d'une part, et des aspects économiques d'autre part. Les conditions climatiques et pédologiques ne permettent pas l'implantation, sur tout le territoire français, d'espèces mellifères. De même, la rentabilité économique de certaines grandes cultures (blé notamment) pousse à leur implantation prioritaire, en lieu et place d'espèces plus favorables à l'alimentation des abeilles. Aussi, les choix effectués par les agriculteurs ne répondent pas forcément aux besoins alimentaires des abeilles et aux attentes des apiculteurs. Face à ce constat, il existe plusieurs mesures visant à encourager la diversité des assolements et l'implantation d'espèces mellifères, afin de protéger les abeilles, dont le rôle essentiel pour la production agricole n'est plus à démontrer. Dans le cadre de l'actuelle politique agricole commune (PAC), la conditionnalité soumet le versemennt des aides des premier et second piliers au respect d'exigences en matière d'environnement, de santé publique, de protection animale, de santé des animaux et des végétaux ainsi qu'au respect des normes de Bonnes Conditions Agricoles et Environnementales (BCAE). L'une des BCAE, relative au « maintien des particularités topographiques », prévoit que 3 % de la surface agricole utile de chaque exploitation soient consacrés à des éléments fixes du paysage. Les différentes particularités topographiques qui peuvent être retenues ont été précisées (haies, bandes tampons, bordures de champs, jachères spécifiques, etc.) et contribuent à la diversification de l'alimentation des insectes pollinisateurs. Il s'agit, en particulier, des jachères apicoles ou mellifères. D'autres normes BCAE, comme l'interdiction de retourner les prairies naturelles ou l'obligation de mettre en place des bandes tampon le long des cours d'eau, favorisent également l'alimentation des insectes pollinisateurs. De plus, plusieurs mesures agroenvironnementales existantes répondent à l'objectif de diversification de l'alimentation des insectes pollinisateurs, notamment les mesures d'amélioration du potentiel pollinisateur, les mesures favorisant la biodiversité et les dispositifs de type « prairies fleuries ». Enfin, le débat sur l'avenir de la PAC s'est ouvert sur la base des propositions de la Commission européenne. Certaines d'entre elles ont trait aux pratiques agricoles bénéfiques pour l'environnement. Ces nouvelles conditions en termes de diversité des cultures et de surfaces d'intérêt écologique devront cependant être négociées au regard de leur validité économique.
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