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Philippe Duron
Question N° 12825 au Ministère de la Justice


Question soumise le 11 décembre 2007

M. Philippe Duron interroge Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur le projet de loi portant adaptation du droit pénal français au statut de Rome, projet déposé au Sénat le 15 mai 2007. L'adaptation du droit français à ce texte fondateur de la Cour pénale internationale (CPI) était attendue avec impatience, puisque cela fait déjà sept ans que la France a ratifié le statut de la CPI. Cependant, de nombreuses associations de défense des droits de l'homme, parmi lesquelles Amnesty International, soulèvent avec inquiétude deux lacunes du projet de loi. La première concerne l'incrimination des crimes de guerre en droit français. Si le projet de loi introduit enfin des dispositions relatives aux crimes de guerre en droit français, il n'instaure pas pour autant le régime d'imprescriptibilité pour ces crimes, crimes qui sont par ailleurs considérés, dans leur traduction en droit interne, comme des crimes de droit commun. La France ne disposerait donc toujours pas des outils juridiques nécessaires pour juger les crimes de guerre. La deuxième lacune relevée par Amnesty International, c'est l'absence de disposition relative à la compétence territoriale du juge français : le projet de loi ne reconnaît pas aux tribunaux français la compétence universelle pour les crimes relevant du statut de Rome. Or la compétence universelle, reconnue dans de nombreux pays européens, permet de « poursuivre et juger les auteurs de crimes de guerre, crime contre l'humanité et génocide quels que soient le lieu du crime et la nationalité de l'auteur ou celle de la victime ». Sans cet élargissement de la compétence territoriale, la France pourrait héberger des criminels de guerre en toute impunité. Il interroge donc sur ses intentions quant à ce projet de loi et sur les articles qu'elle compte y introduire pour que la France reste « la patrie des droits de l'homme ».

Réponse émise le 7 décembre 2010

En adoptant la loi du 26 février 2002 relative à la coopération avec la Cour pénale internationale, la France a respecté tous ses engagements au regard de la convention portant statut de la Cour pénale internationale. En effet, cette convention n'impose aux États qui y sont parties ni la création d'incriminations spécifiques dans leur droit interne pour les crimes qui relèvent de la compétence de cette cour, ni la reconnaissance d'une compétence juridictionnelle élargie. La législation française était donc, avant même l'entrée en vigueur du statut de Rome de la Cour pénale internationale, en parfaite conformité avec les obligations résultant de ce statut. Néanmoins, le Gouvernement a soumis au Parlement un projet de loi comportant toutes les dispositions nécessaires pour incriminer, de la manière la plus complète possible, les comportements prohibés par ladite convention, notamment crimes ou délits de guerre, et prévoyant des règles de complicité élargies. En outre, le Gouvernement a accepté d'instaurer une compétence juridictionnelle élargie pour les tribunaux français, ce qui constitue une avancée incontestable : aucune disposition du statut de Rome n'impose aux États parties de se reconnaître compétents pour juger les génocides, les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre commis à l'étranger, par des étrangers, à l'encontre de victimes étrangères. La France n'a jamais instauré une telle compétence en l'absence de stipulation prévue par une convention internationale. Néanmoins, le Gouvernement a soutenu l'amendement déposé par le rapporteur du Sénat élargissant la compétence des juridictions pénales françaises au-delà de leur compétence habituelle. Depuis 2002, en application des articles 627-4 à 627-15 du code de procédure pénale, qui permettent l'arrestation et la remise à la Cour pénale internationale des auteurs de crimes contre l'humanité et de crimes ou délits de guerre qu'elle ne peut juger en raison de la territorialité des faits, de la nationalité de l'auteur et de la victime, la France peut dénoncer de tels faits à la Cour pénale internationale et en arrêter les auteurs qui se seraient refugiés sur le territoire de la République afin de les remettre à cette Cour. En outre, en application des dispositions adoptées par le Parlement, la France pourrait juger elle-même de tels criminels, dès lors qu'ils résideraient habituellement sur le territoire français. Ce texte, adopté à l'unanimité par le Sénat le 10 juin 2008, a été voté par l'Assemblée nationale le 13 juillet 2010. Le Conseil constitutionnel a déclaré conformes à la Constitution les dispositions de la loi portant adaptation du droit pénal à l'institution de la Cour pénale internationale contestées par certains députés et sénateurs et la loi a été promulguée le 9 août 2010.

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