M. Jean-Paul Lecoq attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes, sur le sort des prisonniers d'opinion sahraouis incarcérés au Maroc. En novembre 2010, au moment du démantèlement du camp de Gdeim Izik, environ 20 000 personnes se sont rassemblées pendant 3 semaines sous des tentes à proximité de la capitale du Sahara occidental. La forte mobilisation sahraouie et la violence du démantèlement ont entraîné des affrontements entre Sahraouis et forces de police marocaines. Cette mobilisation mal vécue par le pouvoir marocain avait conduit à l'incarcération de près de 200 personnes, la majorité d'entre elles a été libérée assez vite. Il y a actuellement 85 prisonniers d'opinion sahraouis dans les prisons marocaines, la plupart d'entre eux est déjà passée en jugement pour des peines allant de 3 mois à 15 ans de prison, essentiellement, pour avoir participé à des rassemblements depuis une dizaine d'années. À la prison de Salé, 24 détenus considérés comme les "organisateurs" du "désordre" n'ont toujours pas été jugés. Ils ont fait une grève de la faim pour obtenir un procès ou leur libération et ce procès devait se tenir le 13 janvier dernier. Mais à la veille du jugement, on leur a annoncé que celui-ci était reporté sans aucune explication, ni date de report. Pourtant, les prisonniers avaient arrêté leur grève de la faim après les deux engagements pris par le Conseil national des droits de l'Homme. D'une part, le respect du droit des prisonniers conformément aux normes internationales correspondant aux conventions signées par le Maroc, d'après le témoignage d'observateurs internationaux, cet aspect est à peu près satisfait : les visites et les sorties dans la cour de la prison sont plus nombreuses et les détenus ont un accès au téléphone et aux journaux. D'autre part, le droit à un procès équitable devant une juridiction civile, cet engagement n'a pas été tenu puisqu'il était prévu le 13 janvier un procès devant une cour militaire alors que ce sont des civils. Ces prisonniers ont besoin d'un large appui international pour faire bouger le pouvoir marocain, d'autant que depuis le 21 juin 2011, le Maroc a obtenu le statut de partenaire pour la démocratie au sein du Conseil de l'Europe. Pour ce faire, le parlement marocain a dû prendre des engagements visant à renforcer la démocratie, l'État de droit et le respect des droits de l'Homme et des libertés fondamentales. Or, selon cette logique, il n'est pas censé détenir de prisonniers politiques. Il l'interroge donc sur les mesures que compte prendre le Gouvernement, à savoir, s'il a l'intention d'intervenir auprès des autorités marocaines pour inciter au respect des droits des prisonniers d'opinion.
La France a déploré les heurts violents du 8 novembre 2010 à Laâyoune, qui ont fait treize victimes, dont onze parmi les forces de l'ordre marocaines, de nombreux blessés et d'importants dégâts matériels. Plusieurs enquêtes ont été diligentées sur le démantèlement du campement de Gdeim Izik, décidé afin de préserver l'ordre public. Ces enquêtes ont été menées tant par les autorités marocaines, au moyen d'une commission d'enquête parlementaire, que par les organisations non gouvernementales, treize marocaines et trois étrangères. Les rapports, rendus publics, ont fourni un tableau nuancé de la réalité, qui incite à ne pas juger hâtivement tant la situation sur place est complexe. Les enquêtes judiciaires ont donné lieu à l'inculpation de deux cent vingt-cinq personnes, notamment pour constitution de bande criminelle, agression physique, incendie volontaire ou utilisation d'arme blanche. S'agissant des vingt-quatre Sahraouis en détention préventive à la prison de Salé, ceux-ci sont présentés devant le Triibunal permanent des Forces armées royales pour, notamment, constitution de bande criminelle, violences sur les forces de l'ordre ayant entraîné la mort sans l'intention de la donner et mutilation de cadavre. Conformément au droit marocain, ce tribunal est compétent dans les cas où des militaires sont impliqués et en cas de détention ou utilisation d'armes ou d'explosifs. Le Conseil national des droits de l'Homme, ayant été informé de la grève de la faim engagée par ces détenus, s'est autosaisi le 2 décembre 2011 de leur situation. Le Secrétaire général du Conseil national des droits de l'Homme a rendu visite aux détenus et tenu une réunion entre une délégation de ces derniers, le directeur de la prison et un représentant de l'administration pénitentiaire. Ces efforts ont permis la suspension de la grève de la faim et l'amélioration de leurs conditions de détention. Deux des détenus, gravement malades, ont été mis en liberté provisoire le 13 décembre 2011. La procédure judiciaire suit son cours dans l'attente de la tenue d'un procès, prévu le 13 janvier 2012 puis reporté. Le Conseil national des droits de l'Homme a par ailleurs indiqué qu'il entendait, conformément à ses prérogatives, observer ce procès. La France demeure attentive au déroulement de cette procédure judiciaire. Enfin, des décisions fortes ont été prises par le Maroc au cours de l'année 2011 en matière de protection et de promotion des droits de l'Homme et pour une meilleure prise en compte des besoins économiques et sociaux, y compris au Sahara occidental. La révision de la constitution, à l'initiative du Roi Mohammed VI, a été approuvée massivement par référendum le 1er juillet 2011. Elle constitue une avancée notamment en matière de protection des droits de l'Homme et des libertés publiques. Le Conseil national des droits de l'Homme, dont l'indépendance a été renforcée, a ouvert à l'automne 2011 deux bureaux régionaux au Sahara occidental (Lâayoune et Dakhla). La France encourage pleinement le processus de réformes politiques en cours au Maroc, qui contribuera à améliorer la situation des droits de l'Homme et des libertés fondamentales dans ce pays, notamment s'agissant des personnes emprisonnées.
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