M. Daniel Garrigue attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire sur la menace de modification, lors du comité de gestion des vins du 24 janvier prochain, de l'annexe XI du règlement n° 1234-2007 du Conseil de l'Union européenne portant sur le titre alcoométrique total maximum applicable aux vins « liquoreux ». En effet, cette modification aurait pour conséquence d'interdire, à partir de la récolte 2012, la production de vins AOP ayant un titre alcoométrique total supérieur à 15° s'ils sont enrichis. Il fait observer au ministre qu'à ce jour la dérogation prévue au paragraphe 7b de l'annexe XV bis du même règlement ne pose pas de limite à la capacité des États membres à fixer un titre alcoométrique volumique total (TAVT) pour leurs vins AOP enrichis suivant les différentes zones. C'est au demeurant cette interprétation qui a prévalu au niveau communautaire après la création du VQPRD il y a quarante ans. Cette dérogation est d'autant plus nécessaire que les vins liquoreux sont issus de raisins récoltés tardivement et par triées successives, soumis, particulièrement sur la façade atlantique, à des aléas climatiques extrêmement importants. Les pratiques d'enrichissement qui réduisent, de ce fait, la prise de risques pour les viticulteurs sont elles-mêmes étroitement encadrées. Remettre en cause cette possibilité risquerait de profondément déstabiliser des vignobles qui par un travail de qualité particulièrement exigeant ont su affirmer leur image et maintenir leurs marchés. Il lui demande en conséquence quelles initiatives il compte prendre pour faire prévaloir l'interprétation qui s'est imposée jusqu'à ce jour au sein de l'Union européenne.
Depuis la nouvelle Organisation Commune de Marché (OCM), entrée en vigueur en juillet 2008, la réglementation communautaire ne permet plus d'enrichir les vins dont le titre alcoométrique total dépasse 15 % vol. L'annexe XI ter du règlement (CE) n° 1234/2007 du Conseil prévoit désormais que le vin «a un titre alcoométrique total (TAV) non supérieur à 15 % vol », mais que toutefois « pour les vins bénéficiant d’une appellation d’origine protégée et obtenus sans aucun enrichissement, la limite maximale du titre alcoométrique total peut dépasser 15 % vol ».
Le Gouvernement est intervenu à plusieurs reprises auprès des services de la Commission Européenne pour que cette pratique, qui figure dans les cahiers des charges des appellations des vins liquoreux concernés, puisse être maintenue, en insistant sur le fait qu'il s'agissait d'une pratique historique autorisée la précédente réglementation (règlement (CE) n° 1493/1999) et qu'elle est techniquement justifiée. En effet, les producteurs soutiennent que le recours ponctuel à l'enrichissement en sucre peut s'avérer nécessaire pour certains lots dont la richesse naturelle en sucre des raisins est insuffisante en raison d’une dégradation des conditions météorologiques au cours de la longue période de vendanges qui caractérise ces vins.
La Commission Européenne, en réponse à la demande des autorités françaises, a proposé un projet de texte modifiant l'annexe XI ter du règlement (CE) n° 1234/2007 partie 1.c en ajoutant une disposition dérogatoire supplémentaire pour autoriser certains vins ayant été enrichis à avoir un TAV total supérieur à 15 % vol, de façon temporaire jusqu'au 31 juillet 2012. Cette proposition permettait de régulariser la situation des trois dernières campagnes, le temps que des études complémentaires de la part des Etats membres concernés soient entreprises afin de fonder les conditions qui justifient l'enrichissement.
Les Organismes de Défense et de Gestion (ODG) des appellations concernées et les organisations professionnelles de la filière s’y sont cependant opposés. Si celle-ci permettait en effet de sécuriser juridiquement les pratiques passées et les produits actuellement sur le marché, elle ne répondait pas à leur demande d'autorisation de la pratique d'enrichissement sans limite de temps.
Les ODG ont demandé son retrait. Le gouvernement a relayé cette opposition auprès de la Commission Européenne qui en a pris acte. Si cette dernière devait confirmer son refus de valider les cahiers des charges des vins concernés, les ODG seraient alors fondés à saisir la Cour de Justice de l’Union Européenne afin qu’elle tranche ce différent.
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