M. Jacques Myard appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur le prosélytisme qui se développe en milieu carcéral au mépris du principe de laïcité. La liberté de conscience et de religion est garantie dans les prisons comme partout en France. Dans les établissements pénitentiaires, elle est encadrée tant pour respecter le principe de laïcité que pour permettre la bonne marche du service. Or depuis quelques années, les personnels de surveillance constatent un prosélytisme islamiste très virulent au sein des établissements qui perturbe leur organisation, menace leur sécurité, et entrave leur mission. Le succès de cette idéologie tient à son caractère radical qui la pose en contre-pouvoir face à une administration dont la légitimité est ainsi contestée. L'exercice même du culte se fait au mépris du règlement, et donne lieu à des rassemblements et des réunions en langue étrangère qui facilitent l'organisation dont l'objectif est l'encadrement de la population carcérale. Le prosélytisme prend la forme d'un endoctrinement systématique des détenus, qu'ils soient musulmans ou non. Les non pratiquants, ou les non musulmans subissent ainsi un harcèlement, des pressions, voire des brimades pour les forcer à se convertir et se soumettre ainsi à la hiérarchie religieuse qui se met en place. Cette dérive est particulièrement inquiétante lorsque l'on connaît les risques de radicalisation de la délinquance au sein des prisons. Il est évident que la religion en tant que telle n'est pas en cause, tant qu'il s'agit de pratique individuelle. Il est légitime que les aumôniers des différentes religions soient officiellement présents dans les prisons. Mais en l'occurrence, il s'agit là d'un véritable détournement de la liberté de conscience et de religion par des individus n'ayant aucune qualification ni légitimité en la matière, et qui manipulent et intimident leurs codétenus. C'est inadmissible. Il lui demande en conséquence comment il entend faire respecter les principes de la République et la laïcité dans les établissements pénitentiaires, c'est-à-dire garantir aux détenus la liberté de conscience et de pratique religieuse sans que cette dernière perturbe la vie collective.
L'espace carcéral n'est pas épargné par des manifestations liées au prosélytisme religieux. Face à ce phénomène, l'administration pénitentiaire est vigilante et mobilisée. Ses actions, engagées depuis plusieurs années se sont déployées dans plusieurs directions, afin d'identifier ce phénomène, le prévenir et le combattre. L'administration pénitentiaire a, tout d'abord, développé des supports favorisant la connaissance et la détection des dérives liées au prosélytisme religieux. Consciente que ces phénomènes ne sont pas toujours convenablement identifiés et désireuse de combattre les amalgames, l'administration pénitentiaire participe à plusieurs initiatives destinées à offrir une appréhension à la fois plus large et plus profonde de ces phénomènes. La direction de l’administration pénitentiaire a élaboré un outil de détection des phénomènes de radicalisation qui rend compte, notamment, des dérives prosélytes. Ce support, à caractère statistique, permet, d'une part, de quantifier ce phénomène et, d'autre part, d'identifier les structures pénitentiaires les plus affectées par celui-ci. Cet outil a fait l'objet d'une présentation dans chacune des directions interrégionales des services pénitentiaires où il a été exposé aux chefs d'établissements qui ont la charge de le faire vivre localement, avec l'appui des délégués interrégionaux du renseignement. Il est proposé aux personnels en formation à l'école nationale d'administration pénitentiaire une sensibilisation aux phénomènes de radicalisation, lors des interventions à caractère pédagogique. Par ailleurs, soucieuse de lutter contre les réflexes et les replis communautaristes qui peuvent se nourrir d'une suspicion de traitement différencié, l'administration pénitentiaire a constamment œuvré ces dernières années pour promouvoir un égal accès à l'ensemble des cultes. La structuration des aumôneries, via le principe d'un agrément, constitue en cela une garantie tant pour l'administration pénitentiaire que pour les personnes détenues. L'administration pénitentiaire dispose alors, en effet, d'un interlocuteur, garant du respect des principes religieux, et d'une autorité sur les aumôniers régionaux et locaux. Les aumôniers agréés sont les seuls à pouvoir encadrer les manifestations cultuelles collectives. En 2010, l'aumônerie orthodoxe a fait l'objet d'un agrément. Avant elle, l'aumônerie nationale musulmane avait été créée en 2006. Cette reconnaissance institutionnelle s'est accompagnée d'une allocation de moyens matériels, en progression depuis 2006. Ce point n'est pas neutre. Peu présents ou peu nombreux, les aumôniers musulmans peuvent voir leur légitimité contestée par des personnes radicalisées susceptibles d'exercer un ascendant quotidien sur le reste de la population pénale incarcérée. Depuis 2006, l'augmentation du nombre d'aumôniers musulmans est régulière. Celui-ci atteignait, en 2009, 142 personnes, soit un doublement des effectifs depuis 2006. Parallèlement, le budget de l'aumônerie musulmane s'est accru constamment sur ces trois dernières années : sa part est passée de 11,1 % à 15,7 %. Depuis 2008, sur instruction du directeur de l'administration pénitentiaire, les salles polycultuelles se sont généralisées dans l'ensemble des établissements, facilitant ainsi, pour chaque communauté religieuse, la possibilité de se réunir dans un lieu adapté. Une circulaire du 13 juillet 2007 a fixé les orientations générales de la pratique du culte musulman dans les lieux de détention. Enfin, l'administration pénitentiaire lutte, au quotidien, dans ses établissements, contre les manifestations de prosélytisme. Les décisions prises ont été confortées par le juge administratif de manière constante depuis 2008.
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