M. Jean-Jacques Urvoas attire l'attention de M. le ministre de la défense et des anciens combattants sur le rapport au Parlement relatif aux exportations d'armement de la France en 2010, rendu public le 26 octobre 2011. Il déplore la grande opacité qui continue à entourer la communication gouvernementale sur le sujet. Cette opacité tient d'abord à la teneur du document lui-même. Celui-ci est en effet publié plus d'un an après les ventes d'armes dont il rend compte, ce qui a par exemple pour incidence, à ce jour, de priver la représentation nationale de toute information concernant les exportations réalisées en 2011 vers la Tunisie, la Libye ou Bahreïn. Il apparaît d'autre part que les données contenues dans le rapport en question manquent singulièrement de précision, ce qui, de fait, rend impossible l'identification de ce qui a été transféré, à qui et pour quelle utilisation. Rappelons qu'a contrario, de nombreux pays européens sont en mesure de publier in extenso, sur une base au moins trimestrielle, l'ensemble des autorisations et des refus à l'exportation d'équipements militaires. Les informations publiées par exemple par les gouvernements britannique ou hollandais comportent plus de données (utilisateur final, notifications de refus, types, voire modèles de matériel au-delà de la seule liste militaire de l'UE, etc.) et sont régulièrement accessibles par une mise en ligne tous les trois mois. L'opacité constatée tient ensuite à l'absence de tout débat parlementaire de fond relatif à ce rapport, dont la présentation relève de la simple formalité. Dans ce domaine également, le fossé par rapport à la pratique dans un grand nombre d'autres pays européens se révèle insondable. En Grande-Bretagne et aux Pays-Bas encore, mais aussi en Espagne et en Suède, un vaste débat parlementaire est organisé sur le rapport annuel remis par le ministre de la défense, qui débouche sur la formulation de recommandations, voire sur la publication d'un contre rapport. Il semble donc opportun qu'en matière d'exportation d'armements, la France élève son niveau d'exigence en termes de contrôle, ce qui passe par une implication effective des deux chambres. Il s'agit là d'une exigence d'autant plus impérieuse que doit se dérouler en juillet 2012 aux Nations-unies une conférence en vue de l'adoption d'un traité international sur le commerce des armes classiques, destiné à promouvoir une réglementation susceptible d'empêcher les atteintes graves au droit international. Il lui demande dès lors quelles mesures compte prendre le Gouvernement afin que cette exigence soit satisfaite dans les meilleurs délais.
Soucieuse d’œuvrer à la préservation des facteurs de stabilité à l’échelle de la planète, la France participe activement au développement du processus d’échange d’informations en matière de transferts d’armements.
Depuis la création en 1992 du registre des Nations unies sur les armes classiques, notre pays communique ainsi chaque année au secrétariat général les données relatives à ses exportations et importations d’armements conventionnels, aux dotations de ses forces armées, ainsi qu’aux achats liés à la production nationale concernant les armements majeurs. De plus, la France prend part aux réflexions tendant à améliorer et universaliser ce document.
Au sein de l’Union européenne, la France a également largement contribué à l’adoption de la position commune 2008/944/PESC du Conseil du 8 décembre 2008, qui définit des règles communes régissant le contrôle des exportations de technologie et d’équipements militaires. Ce texte, doté d’un caractère juridiquement contraignant, a remplacé l’ancien code de conduite de l’Union européenne en matière d’exportation d’armements. La France transmet enfin annuellement les informations se rapportant à ses ventes au COARM, groupe d’experts de la politique étrangère et de sécurité commune spécialisés dans les questions d’exportation d’armes conventionnelles.
La décision d’autoriser ou de refuser l’exportation d’un produit lié à la défense s’inscrit toujours dans le strict cadre de l’action diplomatique de notre pays et prend en compte les situations de conflit et d’atteinte grave aux droits de l’homme pouvant se produire dans les pays destinataires des ventes. La France considère ainsi que toute fourniture de matériels susceptibles d’être utilisés à des fins de répression contre des populations civiles doit être prohibée. Dans le respect de ses engagements diplomatiques, elle s’oppose en outre aux exportations vers un pays participant à un conflit ouvert, même en l’absence d’embargo international. Enfin, dans le cadre de la politique globale de maîtrise des armements, notre pays joue un rôle majeur en faveur de l’émergence d’un traité international sur le commerce des armes, ayant pour ambition, au moyen de règles harmonisées, d’amener l’ensemble des États à adopter des comportements responsables et transparents dans ce domaine.
Par ailleurs, la production et les ventes de matériels de défense représentant un enjeu majeur pour notre économie et notre politique de sécurité et de défense, l’État apporte un soutien aux entreprises exerçant cette activité, afin de faciliter leurs exportations. Cette aide étatique, indispensable sur un marché très concurrentiel, intervient toutefois dans un cadre de grande vigilance et de contrôle extrêmement rigoureux. La réforme du contrôle des exportations en cours, résultant notamment de la transposition de la directive 2009/43/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 mai 2009 simplifiant les conditions des transferts de produits liés à la défense dans la Communauté, a pour but de fluidifier ce processus tout en maintenant un niveau de contrôle élevé.
Les ventes de matériels d’armement par la France sont donc réalisées en toute transparence. De plus, elles sont précédées d’une analyse approfondie du contexte politique international et donnent lieu à la mise en œuvre d’un strict dispositif de contrôle. Le bilan détaillé des exportations effectuées au titre de l’année 2011 sera ainsi exposé à la représentation nationale dans le prochain rapport du Gouvernement au Parlement.
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