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André Gerin
Question N° 121624 au Ministère des Affaires étrangères


Question soumise le 8 novembre 2011

M. André Gerin attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes, sur les élections présidentielles qui se sont déroulées, le 9 octobre 2011, au Cameroun. M. Le ministre d'État déclarait, à l'Assemblée nationale le 11 octobre 2011, en réponse à un député, que l'on pouvait « considérer aujourd'hui qu'elles ont eu lieu dans des conditions acceptables ». Ce scrutin a vu la réélection de M. Paul Biya, qui se présentait pour la sixième fois après 29 ans de règne. Comme lors des précédentes consultations et à l'instar d'autres dictatures, dont plusieurs viennent de tomber en Afrique, la préparation et le déroulement n'ont laissé aucune chance de parvenir à un changement de pouvoir. Le régime a, une nouvelle fois, organisé sa reconduction au terme d'une élection présidentielle à un tour, bouclée en six semaines, avec les moyens d'empêcher de s'exprimer librement les opposants. L'Elecam, l'institution chargée de gérer le processus électoral, n'a garanti aucune transparence sur ce dernier, depuis les conditions d'inscription des électeurs jusqu'à la sincérité des résultats. Le Président de la République, devant la conférence des ambassadeurs, le 31 août 2011, reconnaissait que, durant des décennies, notre diplomatie, en Afrique, avait reposé sur un objectif de « stabilité » des régions en place, c'est-à-dire, en clair, de soutien à plusieurs dictatures, au nom, à l'évidence, des intérêts économiques et politiques français. C'est ainsi qu'étaient reçus à l'Élysée, récemment encore, MM Ben Ali, Kadhafi et Moubarak que leurs peuples respectifs ont renversés depuis. La levée des peuples arabes a bousculé la « stabilité », dont nous connaissons le prix pour les populations concernées. Comment, dès lors, expliquer cet entêtement persistant des autorités françaises à soutenir le régime de M. Biya ? Le Cameroun demeure ainsi notre premier partenaire en matière de coopération militaire à hauteur de 4 milliards d'euros par an. Un nouveau partenariat de défense entre les deux pays vient d'être signé et cette coopération comporte aussi un volet d'enseignement aux techniques de « maintien de l'ordre », à l'image de ce qu'avait proposé Mme la ministre des affaires étrangères de l'époque à M. Ben Ali pour « rétablir l'ordre » en Tunisie, alors que se déployait le mouvement populaire qui allait emporter le dictateur. Il souhaite qu'il lui précise quelle est aujourd'hui la doctrine diplomatique de la France. Est-elle à géométrie variable tantôt appelant de ses voeux la « stabilité » des dictateurs encore en place, telle au Cameroun, et en apportant notre aide pour les maintenir, tantôt épousant à l'inverse le sens de l'Histoire quand les peuples se soulèvent pour se débarrasser des tyrans ? La France ne s'honorerait-elle pas plutôt à aider partout les peuples à conquérir leur liberté.

Réponse émise le 13 décembre 2011

La France s'est exprimée à plusieurs reprises sur l'élection présidentielle qui s'est tenue le 9 novembre 2011 au Cameroun. Tout en soulignant que ce scrutin s'était déroulé dans le calme, elle a formulé des recommandations sur la base des rapports des missions d'observation présentes (Organisation internationale de la francophonie, Commonwealth et Communauté économique des États d'Afrique centrale, Transparency international Cameroon). À cette occasion, le ministère des affaires étrangères et européennes a rappelé les améliorations à apporter au système électoral camerounais, notamment par l'instauration du bulletin de vote unique et d'un code électoral unifié. En outre, de nombreux dysfonctionnements ont été observés dans l'organisation de ces élections. ELECAM, l'organisme en charge des opérations électorales, a rencontré plusieurs difficultés : présence de doublons sur les listes électorales, retards dans la distribution des cartes d'électeurs et d'ouverture des bureaux de vote. Les capacités de cet organisme récemment créé et handicapé par son manque d'expérience devront impérativement être renforcées dans la perspective des élections législatives et locales qui se tiendront en 2012. La France accordera une attention particulière à ces scrutins qui seront déterminants pour l'avenir politique du pays. Les autorités camerounaises ont été encouragées à parfaire leur dispositif institutionnel par la création du Conseil constitutionnel et du Sénat. La mise en place de ces institutions garantira l'équilibre du système politique camerounais, en conformité avec la constitution de 1996, et permettra de préparer l'avenir. Le ministère des affaires étrangères et européennes entretient un dialogue étroit et constant avec toutes les composantes de la classe politique et de la société civile camerounaises. À l'occasion de la campagne électorale, les membres de l'opposition et les candidats à l'élection présidentielle ont pu être reçus, à leur demande, soit à l'ambassade de France, soit au ministère des affaires étrangères et européennes à Paris. La coopération de défense et de sécurité avec le Cameroun est ancienne et se poursuivra. Ce pays représente en effet un enjeu majeur sur le plan de la sécurité en Afrique centrale et dans le golfe de Guinée. L'accord rénové de partenariat de défense a été conclu le 21 mai 2009 dans un souci de transparence et de cohérence avec les engagements européens qui visent à soutenir l'architecture de paix et de sécurité en Afrique centrale. Le Cameroun accueille trois écoles nationales à vocation régionale qui bénéficient également du soutien de la France. Le volet d'enseignement aux techniques de maintien de l'ordre vise à former des unités de police des États de la sous-région aux standards et aux exigences du département des opérations de maintien de la paix (DOMP) des Nations unies. La France est déterminée à favoriser le développement des pratiques démocratiques au Cameroun, en encourageant ce pays à mettre en oeuvre les réformes renforçant le cadre institutionnel et permettant de fiabiliser le processus électoral dans la perspective des élections de 2012. Elle poursuivra ces objectifs à travers un dialogue politique constant et exigeant à l'égard des autorités camerounaises.

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