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Delphine Batho
Question N° 120261 au Ministère du Travail


Question soumise le 18 octobre 2011

Mme Delphine Batho interroge M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé sur l'utilisation de l'aluminium comme adjuvant dans les vaccins. L'origine de la Miofasciite à Macrophages serait liée à l'hydroxyde d'aluminium largement utilisé comme adjuvant de nombreux vaccins injectables par voie intramusculaire. Cette maladie entraîne notamment des douleurs musculaires et articulaires, des difficultés cognitives qui poussent les malades à cesser toute activité professionnelle. Dès lors, elle lui demande, dans un premier temps, s'il entend financer la recherche sur l'impact à long terme de l'aluminium vaccinal pour la santé et, dans un second temps en attendant les résultats, s'il compte mettre à disposition du public le DTPolio sans aluminium ou son équivalent.

Réponse émise le 3 janvier 2012

De nombreux vaccins comportent dans leur composition des substances dénommées adjuvants, dont l'ajout permet d'augmenter de façon spécifique la réponse immunitaire pour une même dose d'antigène vaccinal. L'utilisation d'un adjuvant permet ainsi de réduire la quantité d'antigène par dose de vaccin tout en conservant une réponse vaccinale optimale, et ainsi, de produire davantage de doses, dans un rapport qui peut aller de 1 à 2 à 1 à 4 pour une même quantité globale d'antigènes disponibles. L'utilisation d'un adjuvant peut aussi s'avérer utile en cas de mutation du virus, car ces adjuvants sont susceptibles de favoriser une efficacité immunitaire plus large, c'est-à-dire en assurant un certain degré de protection vaccinale face à une souche virale modifiée. L'ensemble de ces considérations ont ainsi conduit à privilégier à l'échelon européen le choix du développement de vaccins contenant un adjuvant. D'une manière générale, l'existence de risques d'effets indésirables liés à l'utilisation du produit, l'ensemble des risques de survenue d'effets indésirables, qui sont identifiés au cours des essais cliniques conduits dans le cadre de la demande d'autorisation de mise sur le marché (AMM), sont mentionnés dans le résumé des caractéristiques du produit (RCP) de la spécialité concernée et figurent dans la notice d'information destinée au patient. Pour autant, les essais cliniques conduits et fournis à l'appui du dossier de demande d'AMM ne permettent pas toujours d'identifier et a fortiori de mesurer parfaitement les risques d'une spécialité en conditions réelles d'emploi. C'est pourquoi un processus de suivi des effets indésirables des médicaments est mis en oeuvre au niveau européen ainsi qu'au niveau national, dans le cadre du système national de pharmacovigilance, destiné à surveiller et à prévenir les risques d'effets indésirables, potentiels ou avérés, des médicaments lors de leur commercialisation. La pharmacovigilance comporte ainsi le signalement des effets indésirables et le recueil des informations les concernant, l'enregistrement, l'évaluation, l'exploitation de ces informations aux fins de prévention, la réalisation d'études ou de travaux concernant leur sécurité d'emploi (enquêtes nationales, suivi national et européen etc.), ainsi que la mise en place d'actions telles que les modifications des informations destinées aux professionnels de santé et aux patients, la suspension et le retrait de l'AMM. Certains d'entre eux sont toutefois soumis à une surveillance plus spécifique à titre préventif, soit parce qu'il s'agit d'une nouvelle substance active ou d'une nouvelle classe pharmacologique, soit, pour un médicament déjà commercialisé, en raison de la détection de nouveaux signaux nécessitant une exploration approfondie. La liste publiée des médicaments sous surveillance concerne donc l'ensemble de ces médicaments, pour lesquels il est apparu nécessaire de renforcer leur surveillance, soit sous la forme d'un plan de gestion des risques (PGR) européen et/ou national, soit sous forme d'une enquête de pharmacovigilance. En ce sens, dès 1998, l'Agence française de sécurité des produits de santé (AFSSAPS) a pris en compte le signal d'un potentiel risque des sels aluminiques- dans les vaccins, et a mis en place des mesures de suivi dédiées afin de répertorier les cas qui étaient notifiés par les patients, les professionnels de santé et/ou les associations de patients. C'est ainsi le cas des vaccins contre le virus de l'hépatite B contenant tous un adjuvant aluminique. Ces vaccins figurent sur la liste des médicaments sous surveillance, publiée sur le site Internet de l'AFSSAPS (www.afssaps.fr) en raison du signalement de plusieurs cas postvaccinaux de sclérose en plaques en 1993 et de myofasciite à macrophages (MMF) en 2000, même si à l'heure actuelle, les données disponibles portant sur l'évaluation de ces effets indésirables ne permettent pas d'établir une association causale entre la survenue de ces pathologies et la vaccination anti-hépatite B. De même, un dispositif de surveillance des effets des vaccins pandémiques H1N1 a par exemple été mis en place afin de suivre régulièrement et attentivement le profil de sécurité de chacun de ces vaccins et d'analyser rapidement si nécessaire tout signal. Au-delà du risque connu et défini d'encéphalopathie et d'ostéomalacie en lien avec une accumulation d'aluminium qui n'est pas susceptible de survenir au vu de la quantité et de la durée limitée d'administration des vaccins, les diverses études scientifiques qui ont été conduites en Europe et dans le monde, n'ont pas permis d'établir un lien entre l'utilisation de vaccins avec adjuvants et l'apparition de perturbations du système immunitaire aux conséquences graves dans la période suivant la vaccination. Ces études ont porté en particulier sur les sels d'aluminium, principaux adjuvants utilisés de longue date dans les vaccins. Le recul de pharmacovigilance avec ces adjuvants est très important, et ne fait apparaître globalement que des effets indésirables locaux et bénins. Par ailleurs, les autres réseaux de pharmacovigilance tant européens qu'internationaux, et notamment l'Organisation mondiale de la santé (OMS) ont été consultés et chacun confirme l'absence de signal de ce type. En effet, les vaccins adjuvantés par un sel d'aluminium sont utilisés dans l'ensemble du monde, constituant ainsi une large population de référence. Pour autant, un nouveau risque a été plus récemment détecté suite à l'observation d'une persistance d'aluminium au niveau du site d'injection intramusculaire du vaccin anti-hépatite B (VHB), aboutissant à une remise en cause par un groupe de neurologues dénommé le Germmad (groupe d'études et de recherche sur les maladies musculaires acquises et dysimmunitaires, incluant les médecins R. Gherardi, F. Cherin, F.-J. Authier) de la sécurité des vaccins contenant un adjuvant à base de sels d'aluminium. Décrite pour la 1re fois en 1998, la myofasciite à macrophages (MMF) est un nouveau type de lésion histopathologique caractérisé par un infiltrat inflammatoire et des agrégats autour des fibres musculaires et des fascias. Le syndrome clinique observé chez les porteurs de cette lésion est polymorphe. Il se caractérise le plus souvent par une asthénie (fatigue) persistante avec des douleurs musculaires et des arthralgies (douleurs articulaires). Afin de rechercher une éventuelle relation entre la lésion histologique de MMF, les symptômes cliniques et les vaccinations, plusieurs démarches ont été entreprises dès 2002 : une enquête de pharmacovigilance, prenant en compte les notifications de l'association des patients d'entraide aux malades de la myofasciite à macrophages (E3M). À ce jour, 425 cas ont été validés, la majorité d'entre eux ayant été rapportée entre 2002 et 2004. Dans tous les cas, la relation de causalité entre la vaccination et la survenue des signes cliniques n'est pas démontrée. Une étude « cas témoin » en 2003 à la demande de l'AFSSAPS qui n'a pas confirmé l'association entre la MMF et l'existence de myalgies ou d'arthralgies. La plus grande fréquence de fatigue observée dans cette étude chez les sujets présentant l'entité histologique, ne permettait pas de conclure à la réalité de l'association, ce qui représente une raison de la faiblesse statistique et de la non spécificité de ce symptôme pris isolément. Dans sa séance du 5 mai 2004, le conseil scientifique de l'AFSSAPS avait jugé qu'en l'état actuel des connaissances, la balance bénéfice/risque des vaccins contenant un adjuvant aluminique n'était pas remise en cause et qu'il n'était pas nécessaire de réaliser de nouvelles études épidémiologiques. Cet avis allait dans le même sens que celui du Comité scientifique pour la sécurité des vaccins de l'OMS, qui s'était prononcé en 2003. Néanmoins, sous l'égide de l'AFSSAPS, un groupe de travail a été mis en place au mois de janvier 2005 avec pour objectif d'étudier l'existence d'un profil immunologique particulier chez les patients porteurs de lésions histologiques, de mieux caractériser le syndrome clinique associé à la lésion, et de proposer de nouvelles études épidémiologiques afin de différencier le lien entre le syndrome clinique et le vaccin aluminique. En ce sens, plusieurs réunions en présence du GERMMAD et des experts ont permis de progresser et de constater que ces études précliniques étaient limitées et ne pouvaient pas permettre d'établir un lien de causalité entre la présence de la lésion et la survenue du syndrome clinique. Des investigations cliniques devaient donc être mises en place. Compte tenu de tous ces éléments, l'AFSSAPS continue de travailler sur cette problématique pour tenter de mieux la caractériser et d'identifier éventuellement un facteur causal pour lequel des mesures concrètes pourraient être proposées. La substitution automatique d'un adjuvant vers un autre adjuvant n'est pas envisageable de façon simple et rapide. En effet, cela supposerait de reprendre des études en laboratoire pour rechercher le nouvel optimum (si cet optimum peut même être raisonnablement trouvé), puis de confirmer l'efficacité vaccinale du nouveau couple « antigène-adjuvant » dans la combinaison de dose qui aura été retenue, et enfin d'établir le profil de sécurité de ce nouveau vaccin avec un nouvel adjuvant. Il est à signaler que dans les années 1970-1980, le phosphate de calcium a été fréquemment utilisé comme adjuvant particulaire en première intention. Toutefois, sur la base de nombreuses observations et après de nombreux essais réalisés par les firmes pharmaceutiques développant des vaccins, ce sont les sels d'aluminium qui sont apparus les meilleurs candidats pour leur pouvoir adjuvant plus élevé et parfois même une meilleure tolérance au point d'injection. La littérature est néanmoins diverse sur cette question puisqu'il est possible de trouver des références qui établissent une meilleure efficacité et tolérance du phosphate de calcium et de reconnaître son caractère de sel « naturel », ce que ne sont pas les sels d'aluminium. Cependant ces données en faveur du phosphate de calcium restent plus en retrait avec un niveau de démonstration plus faible que les éléments en faveur des sels d'aluminium. Les vaccins pandémiques avec adjuvant utilisés dans le cadre de la campagne de vaccination contre la grippe A (H1N1) comportaient des adjuvants d'une génération plus récente, dite « huile dans l'eau ». Leur composition incorporait essentiellement du squalène (substance lipidique qui est présente notamment dans les aliments). Les études précliniques réalisées chez plusieurs espèces animales n'ont pas montré de toxicité particulière, notamment de foeto-toxicité, ou de tératogénicité. Les études cliniques effectuées chez l'homme avec des vaccins comportant ces mêmes adjuvants n'ont pas fait apparaître de signal de risque, hormis une augmentation des réactions locales au point d'injection de type rougeur et douleur. Enfin, il faut rappeler qu'il existe déjà un vaccin contre la grippe saisonnière contenant un adjuvant à base de squalène. Il s'agit du vaccin Gripguard qui est autorisé depuis 2001 en France et a déjà été utilisé très largement (environ 45 000 000 de doses), dans le monde et globalement en Europe. Le suivi de pharmacovigilance n'a pas fait apparaître de problème de tolérance ou de réactions immunologiques anormales.

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