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Élisabeth Guigou
Question N° 117820 au Ministère des Affaires étrangères


Question soumise le 13 septembre 2011

Mme Élisabeth Guigou attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes, sur la mise en oeuvre du règlement (CE) n° 1236-2005 relatif au commerce de biens susceptibles d'être utilisés en vue d'infliger la peine capitale, la torture ou d'autres traitements cruels, inhumains ou dégradants. Amnesty international a publié un rapport dès mars 2010 sur les lacunes de ce réglement. Le comité du régime commun en charge d'appliquer le réglement a repris la plupart des recommandations de l'ONG, le Parlement européen a adopté une résolution sur le sujet le 17 juin 2010. Cependant, ni la Commission ni les États membres n'ont pris les mesures pour appliquer ces recommandations. L'objectif de ce réglement est d'empêcher les entreprises de l'Union européenne d'exporter des produits destinés à la torture ou à la peine de mort. Or certaines substances anesthésiantes commercialisées par des entreprises européennes sont utilisées pour l'exécution de la peine capitale aux États-unis. Ces substances, utilisées pour certaines en médecine vétérinaire, ne sont pas interdites à l'exportation par le réglement. Il est donc urgent de remédier à la contradiction entre l'objectif du réglement et la réalité de sa mise en oeuvre. Elle lui demande de bien vouloir lui préciser la position de la France sur ce sujet.

Réponse émise le 25 octobre 2011

Le règlement 1236/2005 du Conseil de l'Union européenne, du 27 juin 2005, concernant le commerce de certains biens susceptibles d'être utilisés en vue d'infliger la peine capitale, la torture ou d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, est entré en vigueur en 2006. Ce règlement a pour objectif la mise en place d'un régime de contrôle spécifique visant à contribuer à la prévention de la violation du droit fondamental de tout être humain de ne pas être soumis à la torture ou à d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il s'appuie sur divers textes internationaux : le pacte international relatif aux droits civils et politiques, la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, la convention des Nations unies de 1984 contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Il répond au souhait que la France avait exprimé, pour prévenir la dissémination des biens pouvant servir à torturer ou exécuter les personnes. Ce règlement instaure des mécanismes de prohibition, de contrôle et de retenue des marchandises qui n'ont aucune autre utilisation pratique que celle d'infliger la peine capitale ou la torture et d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. L'exportation et l'importation de ces biens peuvent être autorisées s'il est prouvé que ces biens seront utilisés exclusivement à des fins d'exposition publique dans un musée, en raison de leur signification historique. Par ailleurs, est également instauré un dispositif de contrôle pour l'exportation de produits qui peuvent être utilisés pour la peine capitale ou à des fins de torture, mais qui ont aussi des utilisations légitimes. Pour ces équipements, une autorisation préalable d'exportation est exigée. Au niveau national, le non-respect de cette réglementation constitue une violation d'une mesure de prohibition, au sens de l'article 38 du code des douanes, et, par conséquent, un délit douanier qui est prévu aux articles 417 à 428 de ce code (contrebande, importation ou exportation sans déclaration en cas de fausse déclaration en douane ayant pour but ou pour effet d'éluder la mesure de prohibition) et qui est sanctionné par les dispositions de l'article 414 du code des douanes (peine de prison de trois ans, amende comprise entre une et deux fois la valeur des marchandises, confiscation des marchandises avec une aggravation de ces sanctions en cas d'infraction commise en bande organisée). Ce dispositif est d'ailleurs mentionné dans le rapport de l'Omega Research Foundation (« Appendice premier : législation nationale introduite par les États membres en matière pénale »), qui indique que « l'article 38 du code des douanes rend illégales l'importation ou l'exportation des biens interdits, y compris ceux couverts par le règlement 1236/2005 de l'Union européenne. Les articles 414 et 417-428 du code des douanes en définissent le régime pénal ». Concernant les formalités douanières, le règlement prévoit une procédure de demande d'autorisation d'exportation ou d'importation de biens énumérés à l'annexe II et à l'annexe III du règlement 1236/2005 du Conseil du 27 juin 2005. Le formulaire de demande (CERFA12722*01) a été mis en ligne et est accessible à tous les opérateurs. Le rapport des ONG Amnesty international et de l'Omega Research Foundation souligne, à juste titre, qu'il s'agit du premier dispositif multilatéral de contrôle du commerce de ce type dans le monde, permettant ainsi de combler un vide substantiel dans la protection des droits de l'Homme à travers le contrôle des exportations. Ce dispositif vient d'ailleurs de recevoir sa complète traduction en droit interne, avec la publication au Journal officiel du 18 août 2011 du décret n° 2011-975 du 16 août 2011. Si l'évaluation de la mise en oeuvre de l'actuelle réglementation des exportations faisait apparaître des lacunes ou des failles, le Gouvernement, conjointement avec la Commission européenne et les autres États membres de l'Union européenne, rechercherait les pistes de réforme permettant de s'assurer que certains biens ne se transforment pas en instruments illicites. Elle proposera notamment à ses partenaires une révision de la liste des biens visés en annexe III du règlement 1236/2005 de l'Union européenne, qui peuvent être utilisés pour la peine capitale ou à des fins de torture mais qui ont aussi des utilisations légitimes, ainsi que de leur régime de délivrance d'autorisation d'exportation.

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