M. Jean-Yves Le Déaut attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration sur le rapport de 250 pages publié le 7 juillet dernier. Dans ce très sérieux rapport, pour lequel la Cour des comptes a mené une enquête dans une cinquantaine de villes des régions Île-de-France, Rhône-Alpes ou PACA, la Cour passe au crible les forces de sécurité publique (SP), celles étant dans la rue, le gros des troupes de la police et de la gendarmerie (80 000 fonctionnaires chacune). Sur la période 2002-2010, écrivent les rapporteurs, les résultats sont "contrastés" au regard des statistiques qui ont montré un « recul des atteintes aux biens » mais une « hausse » des violences aux personnes. Cette « exigence d'une plus grande efficacité de la lutte contre la délinquance doit être satisfaite » depuis 2009 « avec des moyens en diminution ». Il lui demande quelle est sa réaction à la lecture de cette étude et s'il en approuve les conclusions, très critiques à l'égard de la politique menée par la majorité depuis le début du quinquennat de l'actuel Président de la République.
Le rapport public de la Cour des comptes intitulé « L’organisation et la gestion des forces de sécurité publique » a appelé de la part du ministre de l’intérieur des observations qu’il a fait connaître à la Cour par courrier du 23 juin 2011 et exposées publiquement à plusieurs reprises. Ce rapport contient des propositions intéressantes, mais également un nombre important d’inexactitudes, d’erreurs d’analyse, d’oublis et d’appréciations manquant parfois d’objectivité. Les auteurs de ce document ayant voulu porter une appréciation sur l’efficacité de la politique de sécurité intérieure, il est également dommage que leur analyse se soit limitée à la seule période 2002-2009. L’inscription de leur étude dans un temps un peu plus long aurait certainement permis de mieux révéler les contrastes entre les résultats obtenus aujourd’hui et les politiques de sécurité menées antérieurement, afin d’en tirer tous les enseignements utiles en matière d’« organisation et de gestion des forces de sécurité publique ». Si le format d’une question écrite ne permet pas une réponse circonstanciée à l’ensemble des observations et recommandations formulées dans ce rapport, le ministre de l’intérieur souhaite signaler les points suivants. L’appréciation portée par les auteurs du rapport sur le caractère prétendument contrasté des résultats obtenus depuis 2002 dans la lutte contre la délinquance impose de rappeler certaines réalités. Entre 1997 et 2002, la délinquance générale avait augmenté de 17,8 %. Depuis 2002, la délinquance générale a reculé de 17 %, alors que la population française a augmenté dans le même temps de 3,2 millions d’habitants, et l’année 2010 a constitué la huitième année consécutive de baisse de la délinquance. Les infractions révélées par l’activité des services, qui traduisent la détermination et l’engagement du Gouvernement, des policiers, et des gendarmes, ont augmenté depuis 2002 de 40 % et de plus de 8 % au cours des six premiers mois de l’année 2011. Le taux d’élucidation des crimes et délits, principal indicateur de l’efficacité des forces de l’ordre, est passé de 26 % à 37 %. Au-delà des chiffres, le résultat humain de cette politique est important : plus de 500 000 victimes ont été évitées depuis 2002. Sur certains points les résultats ne sont pas satisfaisants et exigent des progrès supplémentaires. Il en est ainsi des atteintes volontaires à l’intégrité physique. La mobilisation des forces de l’ordre permet cependant d’obtenir des résultats et l’augmentation constatée depuis 2002 est sans commune mesure avec celle observée entre 1997 et 2002 (+ 60,8 %). La hausse du nombre d’atteintes aux personnes est en effet de mieux en mieux contenue : elle était de + 2,5 % en 2010 et a été de + 1,22 % au cours du premier semestre 2011. S’agissant de l’évolution contrainte des moyens, nul ne peut raisonnablement ignorer la nécessité d’une maîtrise accrue de la dépense publique à laquelle encourage d'ailleurs la Cour des comptes. En tout état de cause, l’évaluation de l’action publique ne saurait se limiter au nombre de fonctionnaires. Les rapporteurs adoptent à cet égard une lecture trop systématiquement quantitative des ressources et des moyens disponibles, en omettant la dimension qualitative. Or, le service rendu à la population dépend avant tout de l’organisation et de l’efficacité des forces de sécurité, de leur présence effective sur la voie publique et du sentiment de sécurité ressenti par la population. Contrairement à ce qui est affirmé, la participation du ministère de l’intérieur à l’effort de réduction de l’emploi public « n’annule » pas le renforcement antérieur des effectifs. La présence des forces de l’ordre sur la voie publique a même augmenté de plus de 10 % entre 2005 et 2009. Par ailleurs, une vision globale de la présentation de l’évolution des effectifs de police implique d’intégrer les efforts constants de réorganisation du travail des policiers. D’importantes réformes ont de ce point de vue permis de renforcer le potentiel opérationnel des forces de l’ordre (réforme des forces mobiles, recentrage des forces de sécurité sur leur cœur de métier) et des initiatives majeures ont été prises pour optimiser leur emploi, mieux coordonner leur action et l’adapter aux évolutions de la délinquance (rattachement de la gendarmerie nationale au ministère de l’intérieur, création des communautés de brigades pour la gendarmerie nationale, police d’agglomération, etc.). Sur le plan juridique comme sur le plan opérationnel (fichiers de police, police technique et scientifique, etc.), les moyens ont été renforcés et modernisés. Concernant les moyens de fonctionnement, d’équipement et d’investissement, la police nationale apporte naturellement sa contribution à l’effort collectif de réduction de la dette publique, mais sans qu’il soit porté atteinte à son potentiel opérationnel, les efforts consentis portant essentiellement sur les postes supports, tandis que les mutualisations et les synergies entre la police et la gendarmerie permettent des économies ou des « non dépenses » substantielles. Si la sécurité est une mission régalienne de l’Etat, elle est aussi l’affaire de tous, et notamment des maires, chargés de la police municipale. Le législateur leur a d’ailleurs confié, par la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance, un rôle central. Les polices municipales constituent la troisième force de sécurité intérieure et jouent un rôle essentiel pour assurer la sécurité de nos concitoyens, sous l’autorité des maires. Pour autant, dans le respect de la libre administration des communes, le ministère de l’intérieur s’attache à professionnaliser encore davantage les polices municipales et à améliorer leur coordination avec les forces de sécurité de l’Etat. S’agissant du développement de la vidéoprotection, la Cour des comptes met en doute son efficacité sans s’appuyer sur des éléments probants. Pourtant, le Gouvernement français s’est engagé, à la suite en particulier des attentats de Londres en juillet 2005, dans une politique dynamique de développement de la vidéoprotection à l’instar de la plupart de nos partenaires européens et les retours d’expérience comme les témoignages d’élus et de professionnels de la sécurité sont encourageants, tant sur le plan de la dissuasion que de l’élucidation facilitée des crimes et délits. Il est intéressant d’ailleurs de noter que les élus dont la commune est dotée d’un tel dispositif ont en général plutôt tendance, en dépit de son coût, à l’étendre qu’à le supprimer. « L’organisation et la gestion des forces de sécurité publique » visent un seul objectif : fournir aux Français un service public de la sécurité moderne, efficace, au plus près de leurs besoins. Tel est le sens de l’action menée par le ministre de l’intérieur, sous l’autorité du Premier ministre et conformément aux orientations fixées par le Président de la République. A ce jour, cette politique produit des résultats concrets et positifs, qui témoignent de l’ampleur du travail accompli depuis 2002.
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