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Jacqueline Fraysse
Question N° 114551 au Ministère du Travail


Question soumise le 19 juillet 2011

Mme Jacqueline Fraysse alerte M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé sur les multiples infractions et fraudes constatées sur le chantier de l'EPR à Flamanville et sur les conséquences à en tirer. Un procès-verbal de l'Autorité de sûreté nucléaire, dévoilé par le journal « l'Humanité », a montré la généralisation de la non-déclaration des accidents du travail, nombreux sur un chantier compliqué et probablement mal maîtrisé. La justice a également ouvert une enquête préliminaire pour travail dissimulé portant sur une centaine de salariés. Enfin, il semblerait que les cotisations sociales d'un certain nombre d'ouvriers étrangers aient été détournées, en infraction avec les législations française et européenne. S'il n'appartient qu'à la justice de se prononcer sur ces fraudes et infractions, force est de constater qu'elles font écho aux auditions de la Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale sur les fraudes sociales, dont le rapport a été enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 29 juin dernier. Ces auditions montraient bien que le travail dissimulé constitue la grande majorité de cette fraude, et à ce titre, elle confirme son regret, exprimé dans une contribution annexée au rapport, que les conclusions de celui-ci n'avancent aucune préconisation en matière de déclaration des accidents du travail. À Flamanville, ces fraudes ont été favorisées par la généralisation de la sous-traitance qui caractérise ce chantier et, plus généralement, tous ceux de cette envergure. Pour autant, cette cascade de sous-traitance ne doit pas permettre de diluer les responsabilités, et notamment celles d'EDF, maître d'oeuvre du chantier, et de Bouygues, responsable du génie civil et qui assure, par ailleurs, l'organisation de l'infirmerie. Dans le cas contraire, cela soulignerait l'urgence de modifications législatives afin d'imposer des règles sociales dès les appels d'offres, de limiter la sous-traitance et de renforcer le rôle et la responsabilité des donneurs d'ordre sur leurs sous-traitants. Lors de son audition devant la Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale, le 1er juin dernier, le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a affirmé que « la lutte contre la fraude est un impératif ». Elle lui demande donc quelles mesures il entend prendre pour prévenir et sanctionner plus efficacement la sous-déclaration des accidents du travail, le travail dissimulé et le détournement des cotisations sociales.

Réponse émise le 29 novembre 2011

Le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a pris connaissance avec intérêt de la question relative à la lutte contre la fraude à la sécurité sociale. La lutte contre la fraude à la sécurité sociale est une priorité forte de l'action gouvernementale, en particulier sur les deux domaines évoqués que sont le travail dissimulé et les fraudes aux cotisations sociales, d'une part, et la sous-déclaration des accidents de travail, d'autre part. Avec près de 10 000 procès-verbaux d'infraction dressés par les agents de contrôle (inspecteurs du travail et inspecteurs du recouvrement principalement) et les officiers de police judiciaire et 7 898 condamnations prononcées par les tribunaux répressifs en 2009, le travail dissimulé est la fraude la plus réprimée et celle qui représente les enjeux financiers les plus élevés, comme le rappelle le récent rapport de la mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS). En 2010, 185 Meuros de redressements ont été notifiés à ce titre par les unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF), soit une hausse de plus de 40 % par rapport à 2009, et un objectif supérieur à 190 Meuros pour 2011 a été fixé lors de la Commission nationale de lutte contre le travail illégal réunie le 30 mars dernier. Ces progrès tiennent beaucoup au fait que l'arsenal répressif a été très nettement renforcé au cours des dernières années. Il a notamment été instauré en 2008 une procédure de redressement forfaitaire (redressement sur la base de six mois de rémunération au salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC), qui est utilisée lorsque aucun élément ne permet de connaître la date d'embauche ou la rémunération versée au salarié non déclaré. Quant au dispositif d'annulation des exonérations et réductions de cotisations sociales en cas de constat de travail dissimulé, mis en place en 2006, il a vu son champ d'application étendu en 2009 à l'ensemble des situations de travail dissimulé et vise également depuis 2010 les entreprises donneurs d'ordre complices du délit de travail dissimulé commis par leur(s) sous-traitant(s). Le renforcement du cadre préventif et répressif de la lutte contre le travail dissimulé reste à poursuivre, en particulier pour que les agents de contrôle soient en capacité de mieux sanctionner les abus et les fraudes constatés dans le cadre du développement des prestations de services transnationales. Ainsi un décret va être très prochainement publié afin d'améliorer l'accomplissement par les maîtres d'ouvrage et donneurs d'ordre publics et privés de leurs obligations de vigilance vis-à-vis de leurs sous-traitants. L'adaptation du dispositif, rendue nécessaire par les dispositions de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 et la loi du 17 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité, conjugue plusieurs dispositions : enrichissement des informations à destination des donneurs d'ordre sur la situation effective de leur(s) sous-traitant(s), sécurisation et dématérialisation des attestations émises par les URSSAF, et renforcement des obligations à l'égard des entreprises étrangères détachant des salariés en France, dans le respect des dispositions prévues au plan communautaire et dans les conventions bilatérales de sécurité sociale en vigueur. Pour ce qui concerne la sous-déclaration des accidents de travail, le rapport 2011 de la commission présidée par M. Diricq, conseiller maître à la Cour des comptes, évalue dans une fourchette de 587 à 1 110 Meuros le coût réel pour la branche maladie de la sous-déclaration des assurances accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP), soit un ordre de grandeur légèrement supérieur à celui de 2008 (564 à 1 015 Meuros). Si une bonne partie de cette sous-déclaration semble davantage concerner les maladies professionnelles pour des raisons multiples sans rapport avec des situations de fraudes à la sécurité sociale (méconnaissance par la victime de ses droits ou de l'origine professionnelle de son affection, complexité de la procédure de reconnaissance, insuffisante formation ou information des médecins), il n'en demeure pas moins que des fraudes existent et doivent être sévèrement réprimées. C'est pourquoi le Gouvernement a entrepris de renforcer sévèrement les sanctions en ce domaine. La législation issue des lois de financement de la sécurité sociale pour 2010 et 2011 prévoit ainsi désormais la mise à la charge de l'employeur des frais supportés par la branche AT-MP (remboursement de soins, indemnités journalières, rentes, etc.) en cas de non-déclaration d'un accident de travail ou de recours au travail non déclaré. En outre, le dispositif des pénalités financières, codifié à l'article L. 162-1-14 du code de la sécurité sociale, prévu à l'origine pour sanctionner les manquements et les fraudes des professionnels de santé, des assurés et des entreprises à l'égard des organismes d'assurance-maladie a été étendu à la législation AT. Ainsi, une pénalité est désormais due pour « toute fausse déclaration portée sur la déclaration d'accident du travail ou tout non respect par les employeurs des obligations relatives à ladite déclaration ou à la remise de la feuille d'accident à la victime ». Ces dispositions nouvelles sont en cours de mise en oeuvre dans les organismes d'assurance-maladie et il est envisagé par décret de permettre également aux baisses d'assurance-retraite et de de la santé au travail (CARSAT) de pouvoir appliquer ces pénalités dans l'exercice de leurs missions.

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