M. André Gerin attire l'attention de M. le Premier ministre sur les surprenantes déclarations de membres du Gouvernement ou de la majorité parlementaire à propos de la mise en oeuvre de la réforme des retraites. Le 1er juillet dernier est entrée en application l'une des dispositions régressives de la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 visant à repousser l'âge légal de départ à la retraite au rythme de quatre mois de cotisations supplémentaires par an pour atteindre 62 ans en 2018. À peine cette mesure entrée dans les faits, le ministre du travail, de l'emploi et de la santé déclare être prêt à signer un décret, en décembre prochain, portant à 166 trimestres, soit 41,5 années, la durée de cotisations pour la génération née en 1955. Cette annonce, selon le ministre, répondrait aux conclusions du rapport du Conseil d'orientation des retraites (COR), qui vient d'être déposé et qui établit un constat d'allongement de la durée de la vie. Cette dernière atteindrait 22,4 ans au-delà de 60 ans pour les hommes en 2010 contre 21,8 ans en 2006, 27,2 ans pour les femmes contre 26,7 ans précédemment. Les organisations syndicales contestent ces évaluations et rappellent, en outre, que les avis du COR ne constituent que des recommandations. Le ministre argue de la loi de réforme des retraites de 2003 pour justifier un allongement de la durée de cotisations à mesure de l'accroissement de l'espérance de vie. La loi de 2003 a fixé la durée de cotisation à 163 trimestres pour la génération de 1951, à 164 trimestres pour la génération de 1952 à compter de 2012 et à 165 trimestres pour les générations de 1953 et suivantes en 2013. Et lors de la réforme de 2010, le passage à 166 trimestres n'était évoqué que pour les générations nées à partir de 1958 à l'horizon 2020. Aucun cadre législatif ne fixe donc la nouvelle régression sociale annoncée par le ministre pour la fin de cette année. Il serait, en outre, temps de tirer les leçons des réformes qui se sont succédées : celle de 1993 avec le passage des 10 aux 25 meilleures années pour le calcul des pensions et qui s'est conclu par une diminution de 15 % des retraites, celles de 2003 et de 2010 qui pénalisent doublement les salariés par l'augmentation de la durée des cotisations et le recul de l'âge légal du départ. Toutes ces dispositions appauvrissent nos concitoyens qui ont derrière eux toute une vie de travail, mettent en cause notre système de retraite par répartition et font le lit des assurances, reposent enfin sur l'illusion que nous pourrions contenir les dépenses quand la vraie question repose sur l'accroissement des recettes. Il rappelle, de ce point de vue, les propositions des parlementaires communistes relatives aux gaspillages annuels de 20 milliards d'exonérations de cotisations patronales, à l'exigence de mettre à contribution les revenus financiers des grands troupes industriels et bancaires, d'élargir ainsi l'assiette des cotisations. Il lui demande de rappeler aux membres de son Gouvernement que les dispositions législatives ne peuvent être piétinées et qu'il serait temps enfin de prendre de vraies mesures de sauvegarde et de développement de notre système de retraites par répartition.
Le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a pris connaissance avec intérêt de la question relative à l'allongement supplémentaire de la durée de cotisation pour les générations nées à partir de 1955. Depuis la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites, la règle d'évolution de la durée d'assurance requise pour bénéficier d'une pension de retraite à taux plein est fixée de manière à maintenir constant le ratio entre durée d'assurance et durée moyenne de retraite : ce faisant, ce dispositif contribue au rétablissement de l'équilibre des régimes de retraite et garantit l'équité inter générationnelle. Le niveau de référence du rapport entre la durée d'assurance et la durée moyenne de retraite est celui observé en 2003 : la durée d'assurance était alors égale à 40 ans et l'espérance de vie à 60 ans estimée en 1998 (cinq ans auparavant) était de 22,39 années, soit un ratio de 40 / 22,39, ou 1,79. Il est en effet légitime que la durée de perception de la retraite s'élevant avec l'acccroissement de l'espérance de vie, la durée d'activité croisse également. La loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites, sans remettre en cause cette règle d'évolution, a prévu une procédure annuelle de détermination de la durée d'assurance fixée par décret, pris après avis technique du Conseil d'orientation des retraites portant sur l'évolution du rapport entre la durée d'assurance ou la durée de services et bonifications et la durée moyenne de retraite. Un décret est ainsi publié avant le 31 décembre de l'année au cours de laquelle la génération concernée atteint 56 ans. C'est ainsi que le décret n° 2011-916 du 1er août 2011 a fixé la durée d'assurance applicable aux assurés nés en 1955, soit 166 trimestres. Cette procédure annuelle permet aux assurés d'avoir une meilleure connaissance des règles applicables à leur génération et par conséquent, parallèlement au relèvement progressif des bornes d'âge, de prévoir la date de leur départ en retraite en fonction des données connues, au moins cinq ans avant la liquidation de leur pension. En outre, la loi du 9 novembre 2010 précitée aménage aussi le dispositif de départs anticipés pour les carrières longues en l'étendant aux assurés ayant commencé à travailler avant 18 ans (au lieu de 17 ans jusqu'à présent). Enfin, la loi adapte également, entre autres, le dispositif de départs anticipés pour les assurés handicapés et crée un nouveau dispositif de départ anticipé à la retraite au titre de la pénibilité. Ce nouveau dispositif de retraite anticipée, qui s'applique de façon similaire dans le régime général et le régime agricole (salariés et non salariés), a été mis en oeuvre par les décrets n° 2011-352, 2011-353 et 2011-354 et l'arrêté du 30 mars 2011. Il est applicable aux pensions prenant effet à compter du 1er juillet 2011 et permet : - un maintien à 60 ans de l'âge légal de départ en retraite (alors que l'âge d'ouverture du droit est porté progressivement à 62 ans) ; - l'obtention du taux plein, quelle que soit la durée d'assurance effectivement accomplie. La retraite à raison de la pénibilité est réservée aux personnes pour lesquelles il existe un lien direct entre l'activité professionnelle exercée et la maladie professionnelle ou l'accident dont ils ont été victimes. La loi de 2010 susvisée a ainsi pris en compte, grâce à ce nouveau dispositif de retraite anticipée, la situation des assurés directement impactés par la pénibilité de leurs emplois.
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