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Simon Renucci
Question N° 111704 au Ministère du Travail


Question soumise le 21 juin 2011

M. Simon Renucci attire l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé sur l'enquête Santé et itinéraire professionnel (Sip) publiée en mars 2011 par la direction des études et des statistiques du ministère du travail (Dares). On y apprend que 35 % des personnes âgés de 50 à 59 ans déclarent avoir été exposés pendant 15 ans ou plus à l'une au moins des quatre pénibilités reconnues comme portant atteinte à l'espérance de vie, ou à l'espérance de vie sans incapacité : travail de nuit, travail répétitif, travail physiquement exigeant, produits toxiques. 40 % d'entres elles déclarent avoir cumulé au moins deux pénibilités physiques durant leur parcours professionnel. De même, ces personnes exposées durablement à des pénibilités physiques sont en moins bonne santé : 24 % se déclarent limitées dans leurs activités quotidiennes à cause d'un problème de santé, contre 17 % seulement chez les autres seniors du même âge. Et, comme on peut s'y attendre, elles sont moins souvent en emploi après 50 ans : 68 % seulement des personnes exposées à au moins une pénibilité et 62 % de celles exposées à au moins trois pénibilités sont en emploi après 50 ans, contre 75 % des personnes qui n'ont pas été exposées. L'Association des accidentés de la vie, la FNATH et l'Association nationale de défense des victimes de l'amiante (Andeva) s'interrogent sur les raisons de la publication tardive de ces données, en mars 2011, c'est-à-dire lorsque la réforme des retraites a été entièrement bouclée, alors que l'enquête a été lancée en 2006-2007. Par ailleurs, ces associations regrettent que les décrets d'application « pénibilités » soient encore plus restrictifs que l'esprit de la loi votée en novembre. Initialement le projet de loi prévoyait la possibilité d'un départ anticipé à 60 ans et à taux plein pour les salariés justifiant d'une incapacité de plus de 20 %. Par la suite cette mesure avait été élargie aux salariés justifiant d'un taux d'incapacité permanente partielle (IPP) de 10 % à 20 %. Cependant, un des décrets d'application de ces mesures, pris en janvier 2011, a ajouté une condition supplémentaire : ces mêmes salariés devront également justifier de dix-sept ans d'exposition au moins à un facteur de pénibilité. En outre, un nouveau décret vise à définir la proportion minimale de salariés exposés aux facteurs de pénibilité qui déclenche l'obligation de négocier dans les entreprises de cinquante salariés ou plus. Or cette proportion est déjà très élevée puisqu'elle a été fixée à 50 % de l'effectif des entreprises. Ainsi, de très nombreuses entreprises sont dispensées de l'obligation de négocier sur la pénibilité au travail. De nouveaux textes réglementaires sont attendus dans les prochains mois pour une entrée en application au 1er janvier 2012. Il lui demande s'il envisage de prendre en compte les résultats de cette enquête pour les prochains décrets afin de maintenir un encadrement raisonné de la pénibilité au travail.

Réponse émise le 15 novembre 2011

Le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a pris connaissance avec intérêt de la question relative à l'enquête santé et itinéraire professionnel (SIP) publiée en mars 2011 par la Direction des études et des statistiques (DARES). La loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites a ouvert un droit à retraite à taux plein dès l'âge de soixante ans au profit des personnes atteintes dans leur état de santé pour des raisons imputables au travail. Trois décrets parus au Journal officiel du 31 mars 2011 (décrets n° 2011-352, n° 2011-353 et n° 2011-354 du 30 mars 2011) ont apporté au code de la sécurité sociale et au code rural les modifications nécessaires. Il convient tout d'abord de souligner qu'il n'existe aucune donnée statistique permettant de recenser le nombre de salariés exposés à au moins un facteur de pénibilité tel que défini par le décret n° 2011-354 du 30 mars 2011 précité. On dispose seulement d'enquêtes réalisées antérieurement à cette définition, telle celle citée par l'honorable parlementaire. C'est l'un des enjeux des dispositions votées dans le cadre de la loi du 9 novembre 2010 que d'améliorer la connaissance des postes pénibles, en vue notamment de développer la prévention au sein des entreprises et le suivi postprofessionnel une fois le salarié parti de l'entreprise. S'agissant du droit à retraite, le texte initialement déposé au Parlement ne concernait que les seuls assurés justifiant d'un taux d'incapacité permanente au moins égal à 20 %. Lors de la discussion au Parlement, le Gouvernement a souhaité élargir ce droit aux assurés dont le taux d'incapacité est inférieur à 20 % mais au moins égal à 10 %. Cette avancée est destinée à permettre à davantage de personnes de bénéficier d'une retraite à raison de la pénibilité. Lorsque le taux d'incapacité est inférieur à 20 %, le bénéfice de la retraite pour pénibilité est subordonné à l'avis d'une commission pluridisciplinaire chargée, d'une part, de vérifier que l'assuré a été exposé, pendant un nombre d'années déterminé par décret, à des facteurs de risques professionnels, d'autre part, d'apprécier l'effectivité du lien entre l'incapacité permanente et l'exposition aux facteurs de risques professionnels. Ces conditions ont été expressément prévues par la loi du 9 novembre 2010. La durée d'exposition requise a été fixée à dix-sept ans par le décret n° 2011-353 du 30 mars 2011 précité. Cette durée a été retenue par analogie avec celle qui sera à l'avenir nécessaire pour bénéficier d'une retraite de la fonction publique au titre des catégories dites actives : il s'agit d'une durée significative pour juger de la pénibilité d'une carrière. Encore convient-il de préciser que la circulaire DSS/SD. 2/2011/151 du 18 avril 2011 (disponible sur le site http://www.sécurité-sociale.fr/ et sur le site http ://www.circulaires.gouv.fr/) a apporté des aménagements pour les salariés victimes d'une maladie professionnelle. Pour ces derniers, il a été considéré que l'exposition peut être présumée remplie, l'instruction en la matière ayant été faite au moment de la reconnaissance de la maladie professionnelle, au travers des tableaux de maladies professionnelles ou via les comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles. Ainsi, seul sera vérifié le fait que l'assuré justifie de dix-sept années d'activité professionnelle ayant donné lieu à cotisations à sa charge, tous régimes confondus (c'est-à-dire y compris ceux n'ouvrant pas droit à retraite pour pénibilité). Cette solution est cohérente avec le fait que présumer remplie une condition d'exposition de dix-sept ans suppose que l'assuré a au moins travaillé dix-sept années. Par ailleurs, la loi portant réforme des retraites impose à certaines entreprises l'obligation de conclure des accords ou des plans d'action en faveur de la prévention de la pénibilité. Les entreprises ne respectant pas cette obligation seront soumises à une pénalité égale à 1 % de la masse salariale des salariés concernés, versée au profit de la branche accidents du travail et maladies professionnelles. Les décrets n° 2011-823 et n° 2011-824 (parus au Journal officiel du 9 juillet 2011) ont prévu les dispositions d'application nécessaires à la mise en oeuvre de cette législation nouvelle. En application de ces dispositions, cette obligation de négociation s'impose aux seules entreprises de plus de cinquante salariés dont au moins 50 % des salariés sont exposés aux facteurs de risques professionnels définis par le décret n° 2011-354 du 30 mars 2011 précité. Compte tenu du manque de données statistiques ci-dessus évoqué, ce seuil de 50 % des effectifs est un moyen terme acceptable qui permet de faire entrer dans le dispositif les entreprises dont la majorité des salariés est concernée par la pénibilité. La loi portant réforme des retraites a également instauré, à titre expérimental jusqu'au 31 décembre 2013, un dispositif visant à inciter les branches professionnelles à négocier des mesures d'allègement ou de compensation de la pénibilité au profit des salariés qui ne remplissent pas les conditions pour faire liquider une retraite à taux plein. Les branches pourront négocier quatre types de mesures : temps partiel, tutorat, versement d'une prime ou attribution de jours de congés supplémentaires. Parallèlement, un fonds national de soutien est créé au sein de la CNAMTS (Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés). Financé à parts égales entre la branche chargée des accidents du travail et des maladies professionnelles et l'État, ce fonds contribuera aux actions mises en oeuvre. Le projet de décret nécessaire à cette fin est en cours de finalisation et devrait être soumis prochainement à l'avis des caisses nationales. Enfin, il convient de rappeler que la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites a introduit d'autres obligations en matière de prévention de la pénibilité. En particulier : la prévention de la pénibilité, qui fait désormais partie des obligations de l'employeur (art. 61 de la loi du 9 novembre 2010), cette obligation s'appliquant à toutes les entreprises quelle que soit leur taille ; les nouvelles responsabilités en matière de prévention de la pénibilité, qui ont été confiées au CHSCT (comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail) : il lui appartient désormais procéder à l'analyse des salariés exposés à des facteurs de pénibilité (art. 62 de la loi précitée).

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