M. André Gerin attire l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé sur le projet de réforme de gouvernance du fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA). Le FIVA est un établissement public national à caractère administratif qui indemnise les victimes de l'amiante. Face aux nombreuses procédures et à l'engorgement des tribunaux, il a été créé en décembre 2000 avec pour objectif d'assurer aux victimes et à leurs familles une réparation intégrale en évitant des procédures longues et difficiles. Son conseil d'administration composé de 22 membres est réparti comme suit : un président membre de la Cour de cassation, cinq représentants de l'État, huit représentants des organisations siégeant à la commission des accidents du travail et des maladies professionnelles du régime général de sécurité sociale, quatre membres proposés par les organisations nationales d'aides aux victimes de l'amiante et de quatre personnalités qualifiées dans les domaines de compétence du fonds. Dans cette instance, ni les représentants des payeurs, ni ceux des bénéficiaires ne disposent de la majorité, ce qui permet une répartition homogène de la composante, le contrôle du dispositif étant conservé par les ministères de tutelle. Ce système d'indemnisation équitable et transparent, qui est pourtant loin d'avoir rendu justice à toutes les victimes, qui ont tant de mal à faire valoir leurs droits va être remis en question par le Gouvernement. Dans le projet de réforme de gouvernance du FIVA, la représentativité va s'en trouver complètement bouleversée : la présidence devrait être remise à un membre du conseil d'État choisi par les ministres de tutelles, une augmentation significative de la représentation des employeurs est prévue. Ils vont donc se retrouver en surnombre au sein de ce conseil d'administration, ce qui aura pour conséquence de leur donner une majorité automatique. Ils pourront ainsi décider sans encombre des indemnisations à accorder aux victimes, celles-là mêmes qu'ils n'ont pas su ou pas voulu protéger de cette catastrophe sanitaire qu'est l'amiante. Cette nouvelle organisation prévue dans le projet de réforme de gouvernance est incompatible avec la déontologie et créatrice de conflits d'intérêts, ce qui est inacceptable. L'amiante a déjà provoqué 35 000 décès. 60 000 à 100 000 autres décès sont attendus d'ici à 2030. Elle est aussi à l'origine de plus de la moitié des cancers professionnels. Les victimes de cette maladie professionnelle n'ont pas à subir la double peine : celle d'avoir contracté une pathologie dont l'employeur est responsable et celle de ne pas être ou faiblement indemnisés. Il lui demande de renoncer à modifier la gouvernance du FIVA, de conserver les dispositions réglementaires actuelles définissant les pouvoirs et la composition du conseil d'administration, de renforcer les moyens pour les victimes de faire valoir leurs droits, qui rencontrent tant de difficultés pour la reconnaissance de la mise en cause grave et souvent irréversible de leur santé.
Le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a pris connaissance avec intérêt de la question relative aux modifications de la gouvernance du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA). Le sort des personnes exposées à l'amiante et de leurs proches est une préoccupation constante du Gouvernement. C'est ainsi que sur proposition de celui-ci la dernière loi de financement de la sécurité sociale a porté de 4 à 10 ans la durée de prescription prévue pour l'indemnisation des préjudices qu'ils ont subis, avec des conditions d'entrée en vigueur permettant l'application de cette mesure y compris aux victimes dont la demande d'indemnisation était prescrite. Le décret n° 2011-1250 du 7 octobre 2011 ne remet pas en cause, au profit du patronat, l'équilibre entre les organisations représentées au conseil de ce fonds. Les organisations syndicales de salariés (CGT, CGT-FO, CFTC et CFDT), qui ont examiné ce projet de décret lors de la commission des accidents du travail et des maladies professionnelles du 21 juin 2011, ne l'ont d'ailleurs pas accueilli défavorablement. Il élargit le champ de recrutement du président du conseil d'administration du FIVA. Aujourd'hui, en effet, en application du décret actuel, seul un magistrat de l'ordre judiciaire peut présider ce conseil, alors que la loi parle de magistrat sans préciser qu'il doit s'agir d'un magistrat de l'ordre judiciaire. Or le FIVA n'est pas un premier degré de juridiction de l'ordre judiciaire : c'est un établissement public administratif placé sous la tutelle conjointe des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget qui peuvent à ce titre s'opposer aux délibérations de son conseil d'administration ; celui-ci définit la politique d'indemnisation du fonds, mais celle-ci, au contraire de dispositions législatives ou réglementaires, ne lie pas les juridictions, devant lesquelles la victime peut toujours contester l'indemnisation qui lui est proposée. Le conseil d'administration doit donc avant tout être le lieu où s'élaborent, entre les partenaires sociaux, les associations de victimes et l'État, dans un esprit constructif et d'écoute, les orientations qui déterminent le niveau d'indemnisation des victimes de l'amiante. Son président, à cet égard, joue un rôle déterminant ; son indépendance est nécessaire ; il n'est pas indispensable, en revanche, qu'il soit un magistrat de l'ordre judiciaire. C'est pourquoi le Gouvernement souhaite élargir le champ de recrutement du président aux présidents de tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ainsi qu'aux magistrats de la Cour des comptes. L'indépendance de ces institutions vis-à-vis de l'État ne saurait être contestée, comme l'a par exemple montré la reconnaissance, par les juridictions administratives, en 2001 et 2004, de la responsabilité de l'État dans la survenue du drame de l'amiante. Par décret publié le 8 octobre 2011, Mme Claire Favre, présidente de la Cour de cassation a été nommée présidente du conseil d'administration du FIVA à l'occasion du renouvellement de sa composition. Il apparaît enfin utile de signaler que le décret n° 2011-1250 du 7 octobre 2011 comporte par ailleurs deux dispositions, aux articles 2 et 3 qui permettent de faciliter les demandes d'indemnisation déposées auprès du FIVA. À ce titre, il modifie la composition de la commission d'examen des circonstances d'exposition à l'amiante en élargissant son champ de recrutement avec l'objectif de fluidifier la régularité de son fonctionnement et éviter qu'elle soit empêchée de se réunir faute de disponibilité de ses membres. Par ailleurs, il supprime l'obligation pour les victimes de pathologies réputées en relation avec l'amiante que le certificat médical soit établi par un médecin spécialiste ou compétent en pneumologie ou en oncologie.
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