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François de Rugy
Question N° 110447 au Ministère du Commerce


Question soumise le 7 juin 2011

M. François de Rugy attire l'attention de M. le secrétaire d'État auprès de la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation, sur le scandale des commissions d'intervention bancaire. Parmi les différents frais facturés aux détenteurs de cartes bancaires, la "commission d'intervention" constitue sans conteste une aberration : perçue par la banque en raison d'une opération entraînant une irrégularité de fonctionnement du compte nécessitant un traitement particulier, cette commission - qui frappe durement nos concitoyens en difficultés financières - semble aujourd'hui représenter une source de recettes pour les banques. Selon une récente étude de l'UFC-Que choisir, le produit de ces commissions d'intervention représenterait ainsi au total 1,775 milliard d'euros, alors même que la charge informatique et en temps de traitement qu'elles sont censées compenser s'élèverait à 172 millions d'euros. Ces commissions, qui se cumulent aux agios, sont multipliables à l'infini, puisqu'elles concernent, pour les cartes à débit immédiat, chaque opération entraînant un découvert non autorisé, sans limitation de nombre. Appliquée à des personnes par définition en difficulté de trésorerie (découvert), cette commission peut atteindre jusqu'à 376 euros par mois. De telles pratiques sont insupportables, et malgré de nombreuses mises en garde et protestations élevées par les organisations de consommateurs, rien n'indique que les banques, malgré des engagements récurrents, aient réellement l'intention de les faire cesser. Aussi, il lui demande quelles mesures le Gouvernement est décidé à prendre pour répondre aux exigences de transparence et de confiance qui devraient caractériser les relations entre les établissements bancaires et leurs clients et pour faire cesser ce qui s'apparente à un véritable racket réalisé au détriment de nos concitoyens les plus en difficulté.

Réponse émise le 27 décembre 2011

Le Gouvernement est attentif à la tarification des services bancaires. Des progrès importants doivent être réalisés, en particulier pour renforcer la transparence des tarifs et pour limiter le coût des incidents pour les clientèles plus fragiles. Une réforme d'envergure est actuellement en cours pour répondre à ces difficultés. Le diagnostic formulé par le Gouvernement est toutefois différent sur plusieurs points des conclusions d'une l'enquête publiée le 23 mai 2011 par l'UFC-Que-choisir. Les coûts directs des cartes bancaires - essentiellement les cotisations - constituent effectivement une proportion importante des frais bancaires acquittés par les Français et des revenus des banques de détail, comme le souligne l'association. Le niveau des frais liés à la carte bancaire provient de ce que plusieurs autres services de la « banque au quotidien » sont gratuits ou faiblement rémunérés. C'est par exemple le cas du chèque, qui est gratuit tandis qu'il correspond à 20 % des paiements effectués en France hors espèces et constitue un centre de coût important pour les établissements bancaires. Il en va de même pour les retraits d'espèces, gratuits dans le réseau du consommateur et bon marché, par rapport aux autres pays européens, dans les autres réseaux. De ce fait, la carte bancaire représente mécaniquement une part prépondérante dans le total des frais bancaires acquittés par les Français et un élément déterminant de l'offre des banques. Ce constat ne traduit pas en lui-même une situation abusive qui porterait atteinte aux intérêts des consommateurs. Les coûts indirects des cartes bancaires - portés principalement par les commerçants lorsqu'ils acceptent une transaction par carte - font, pour leur part, l'objet d'une attention toute particulière des pouvoirs publics dont l'objectif reste toujours celui d'une promotion des moyens de paiement les plus sûrs et efficaces pour le consommateur. La carte fait partie, incontestablement, de ces moyens de paiement et sa promotion est indispensable auprès de tous les types de commerce et pour tous les types de montants. C'est la raison pour laquelle un rapport a été produit par trois parlementaires (R. Mallié, B. Debré et F. Branget) afin d'établir une liste de mesures permettant de développer la carte de paiement dans le plus grand nombre de situations. Dans le cadre de ces travaux, dont les conclusions ont été rendues en juillet 2011, les établissements bancaires ont pris des engagements forts. D'ici à mars 2012, ils mettront à disposition des commerçants un récapitulatif annuel détaillé de l'ensemble des frais acquittés pour l'encaissement des paiements par carte (RAFEC). Ils se sont également engagés à proposer des offres d'entrée de gamme pour les petits commerçants, soit pour des volumes inférieurs à 12 000 euros de chiffre d'affaires encaissé par carte, qui doivent permettre une diminution de 30 % des commissions dès sa mise en place d'ici à mars 2012. Enfin, les établissements bancaires devront proposer une offre attractive pour les paiements par carte de petit montant, permettant une baisse des commissions de l'ordre de 45 %. Le comité consultatif du secteur financier (CCSF) veillera au respect de ces engagements et un groupe de travail associant les fédérations de banques et de commerçants sera constitué pour veiller à une acceptation plus large de la carte bancaire pour des faibles montants. En outre, les frais indirects associés aux cartes de paiement ont fait l'objet d'un examen par les autorités de concurrence nationales qui, sans remettre en cause la pertinence des commissions interbancaires de paiement liées aux transactions par carte, ont souhaité que le niveau de ces commissions soit réduit. Dans ce cadre, au terme d'une procédure négociée avec le GIE cartes bancaires, qui regroupe plus de 130 acteurs bancaires, l'Autorité de la concurrence a rendu publique le 7 juillet une décision tendant à faire baisser de manière substantielle la plupart des commissions interbancaires liées aux transactions par carte. La commission interbancaire de paiement baisse ainsi de près de 36 % et la commission interbancaire de retrait de près de 21 %. La mise en oeuvre de ces engagements à compter du 1er octobre 2011 devrait permettre d'enclencher une diminution des frais que les banques appliquent à leurs clients, commerçants comme particuliers. Elle devrait en outre donner lieu à un développement de l'utilisation de la carte. La justification économique des frais liés aux cartes bancaires est aussi plus forte que ne le suggère l'UFC. L'association estime que 42 % du prix des cotisations de carte n'est pas justifié économiquement. Pour ce faire, elle déduit du prix moyen des cartes les coûts de fabrication et de mise en service de la carte, les coûts des services inclus dans la carte (comme les assurances voyage) et la cotisation Visa ou Mastercard. Cependant, cette estimation ne prend pas en compte plusieurs éléments déterminants du coût des cartes bancaires pour l'établissement. La rémunération des personnels, l'entretien du réseau physique d'agences et de distributeurs ainsi que la gestion du système informatique nécessaire au fonctionnement des cartes ne sont pas inclus dans ce calcul, alors qu'ils constituent un déterminant fondamental des tarifs bancaires et de la qualité du service rendu au consommateur. Ceci est d'autant plus significatif que les réseaux bancaires français sont caractérisés par un nombre d'agences, de distributeurs et de conseillers par client plus élevé que les autres banques européennes, comme le souligne le rapport sur la tarification des services bancaires remis au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie le 8 juillet 2010. De plus, la rémunération de ces services est en grande partie portée par les cotisations de carte bancaire, puisque d'autres services de la banque au quotidien sont gratuits (chèque, retraits dans le réseau). Enfin, lors d'une intervention devant le CCSF le 21 novembre dernier, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie s'est vu présenter le premier rapport de l'Observatoire des tarifs bancaires, qui permet d'évaluer les premiers résultats de la réforme des frais bancaires qui fait suite au rapport sur la tarification des services bancaires et qui visait à renforcer la transparence des frais bancaires et à limiter les frais d'incidents pour les clientèles fragiles. Le Gouvernement est en particulier très attentif aux difficultés que la multiplication des frais d'incident peut engendrer pour certains consommateurs. La majorité des consommateurs ne s'acquittent d'aucun ou que d'un nombre limité de frais d'incident et de commissions d'interventions, mais environ 1 % de la clientèle des banques, souvent plus fragile, fait face à des frais d'incident excessifs. Le premier rapport de l'observatoire confirme que les établissements bancaires ont mis en place, conformément à leurs engagements, une offre spécifiquement adaptée aux consommateurs qui font face à des frais d'incident excessifs, pour environ 3 euros par mois. Cette offre, lancée en juin 2011 - certaines banques l'avaient déjà fait par anticipation -, présente les caractéristiques suivantes : elle comprend une carte « antidépassement » à autorisation systématique qui remplace ainsi le chéquier ; elle inclut un système d'alerte sur le solde du compte permettant, par l'envoi par exemple d'un SMS, de signaler au client qu'il est proche d'un éventuel dépassement de découvert ; pour les bénéficiaires de cette offre, les banques se sont engagées à ramener les frais pour incidents à des niveaux modestes et à les faire baisser de 50 %. Ils sont de plus plafonnés en nombre, afin d'éviter les phénomènes de « cascade de frais » qui sont relevés actuellement. Cette réforme s'ajoute aux mesures qui ont été prises ces dernières années pour limiter le coût des incidents de paiement pour les consommateurs : le décret du 16 novembre 2007 a plafonné les frais d'incident à 50 euros pour un chèque impayé de plus de 50 euros et 30 euros pour un chèque impayé de moins de 50 euros ; à un montant inférieur au montant de l'ordre de paiement pour les virements et prélèvements de moins de 20 euros et à 20 euros pour les virements et prélèvements d'un montant supérieur ; pour assurer une plus grande transparence sur les frais acquittés par les clients des banques, notamment les frais pour incident, la loi « Chatel » du 3 janvier 2008 a créé un récapitulatif annuel des frais acquittés par le consommateur. Ces relevés sont adressés aux clients depuis 2009. C'est ce dispositif qui permet aujourd'hui une prise de conscience par les clients du poids des frais qu'ils acquittent et un ajustement de leurs modalités d'utilisation ou des services que leur banque leur fournit ; à compter du 1er novembre 2009, la transposition de la directive sur les services de paiement (ordonnance n° 2009-866 du 15 juillet 2009 relative aux conditions régissant la fourniture de services de paiement et portant création des établissements de paiement) a supprimé les frais de mise en opposition sur carte bancaire. Le Gouvernement a promu l'usage de la carte à autorisation systématique, notamment pour les publics les plus fragiles. Comme le note l'UFC elle-même, le nombre de ces cartes s'est fortement accru depuis dix ans, passant de un million à plus de huit millions aujourd'hui. Pour autant, comme l'indique le rapport sur la tarification des services bancaires, les paiements par carte sont à l'origine d'une minorité des incidents de paiement, contrairement à l'hypothèse formulée par l'UFC. Ce sont les prélèvements automatiques et les paiements par chèque qui représentent l'essentiel des incidents. Dès lors, le passage d'un système semi-offline à un système online, comme le préconise l'association, ne serait pas de nature à résoudre les problèmes identifiés. En réalité, pour la majorité des Français bancarisés, qui n'ont pas de difficulté d'incidents de paiement par carte, une vérification plus fréquente du solde lors des paiements par carte n'est pas nécessaire. Elle serait génératrice de coûts de gestion supplémentaires qui seraient répercutés soit sur les consommateurs, soit sur les commerçants, qui sont d'ailleurs opposés à une telle mesure, sans pour autant répondre directement à la véritable cause des incidents de paiement. Le dispositif actuel, qui repose sur une fixation contractuelle du seuil de vérification souhaité par le titulaire ou par le commerçant ainsi que sur des vérifications aléatoires, est plus propice à maintenir un équilibre entre vérification régulière et maîtrise des coûts.

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